Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous retrouvons pour ce rendez-vous annuel sur l'évolution de la dette de l'État. C'est la LOLF qui a instauré cette nouvelle règle dans les délibérations du Parlement et qui a introduit la fixation, par le Parlement, d'un plafond de variation de la dette de l'État, sur l'initiative de notre collègue Alain Lambert et de Didier Migaud.
Autrefois, la dette était une conséquence du déficit, quasiment mécanique, ce qui explique peut-être la dérive qu'a connue notre pays depuis vingt-cinq ans. Ainsi, n'ayant pas à délibérer sur la dette elle-même, le Parlement constatait, un peu désolé, qu'elle augmentait d'année en année et ne travaillait pas suffisamment sur cette question.
Désormais, comme nous nous prononçons sur le plafond de variation de la dette d'une année sur l'autre, nous pouvons, en observant l'évolution du stock de dette, procéder à un certain nombre de comparaisons non seulement techniques, mais surtout politiques, sur le niveau souhaitable des dépenses. En effet, si les dépenses sont excédentaires par rapport aux recettes, le plafond de la dette va évidemment en être affecté, ce qui nous pousse à prendre en compte l'ensemble de nos finances eu égard à l'endettement supplémentaire que nous créons chaque année, et c'est l'un des mérites du gouvernement actuel. Nous avons absolument besoin de cet éclairage.
Le vote que vous allez émettre, mes chers collègues, a une valeur juridique contraignante, certes pas aussi forte qu'aux États-Unis puisque nous fixons un plafond non pas instantané mais annuel. Cependant, si ce plafond annuel est dépassé, la jurisprudence du Conseil constitutionnel impose au Gouvernement de proposer une loi de finances rectificative pour « remettre les choses d'aplomb » avant la fin de l'exercice. Il faut saluer cette transparence !
De cette façon, le plafond de variation de la dette dont nous débattons aujourd'hui a une valeur juridique et politique strictement identique à celle du déficit budgétaire.
Par conséquent, l'information de nos concitoyens, les contraintes pesant sur le Gouvernement et la clarté des débats devant le Parlement sont renforcées.
Pour 2007, le Gouvernement nous propose de fixer ce plafond de variation de la dette à hauteur de 33, 7 milliards d'euros, contre 41 milliards en 2006. Ce montant correspond à la variation prévue, entre le 31 décembre 2006 et le 31 décembre 2007, de la somme des encours de dette négociable de l'État à moyen et long termes, diminuée des amortissements et des rachats de dette.
Pour comprendre ce calcul, il faut se reporter au tableau de financement figurant à l'article 33 du projet de loi de finances, qui démontre que le besoin de financement de l'État en 2007 devrait atteindre 114, 6 milliards d'euros, répartis entre 72, 9 milliards d'euros au titre de l'amortissement de la dette à moyen et long termes et 41, 7 milliards d'euros au titre du financement du déficit de l'année.
Les ressources de financement seront liées, pour une majeure part, à l'émission de nouvelles obligations du Trésor à moyen et à long termes, mais aussi à une dotation de la Caisse de la dette publique, prévue à hauteur de 3, 1 milliards d'euros, issue de recettes de cessions d'actifs financiers, autrement dit de privatisations.
Le plafond de variation de la dette ainsi défini pour 2007 - 33, 7 milliards d'euros - est nettement inférieur au déficit prévu de 41, 7 milliards d'euros. C'est la politique volontariste qu'entend conduire le Gouvernement qui explique la différence. Je vous laisserai le soin, monsieur le ministre, de nous rappeler les objectifs que vous vous êtes fixés. M. le rapporteur général aura l'occasion de nous faire part de son sentiment sur les techniques auxquelles vous envisagez de recourir.
Cependant, je tiens à rappeler quelques chiffres.
La dette négociable de l'État, qui représente 95 % de sa dette totale, devrait atteindre, au 31 décembre 2006, 887, 9 milliards d'euros. Toutes choses égales par ailleurs - notamment la gestion active menée par l'Agence France Trésor - en projection, pour la fin de l'année 2007, cette dette s'élèverait à 933, 1 milliards d'euros.
La dette globale de l'État représente près de 80 % de la dette des administrations publiques françaises, dont le montant, à la fin de l'année 2005, était de 1 138 milliards d'euros. Le ratio d'endettement de nos administrations était ainsi de 66, 6 % du produit intérieur brut. Certes, il était compris entre la moyenne des vingt-cinq États membres de l'Union européenne et celle de la zone euro, mais il connaît malheureusement une dérive. Or ce n'est pas ce que pourraient souhaiter les citoyens d'un État géré avec le souci des générations futures.
Pour mémoire, la charge de la dette constitue le deuxième poste budgétaire de l'État, après l'éducation nationale, mais avant la défense. Cette charge, en valeur nette, s'élèvera, en 2007, à 39, 2 milliards d'euros, soit une hausse prévue, en volume, de l'ordre de 0, 4 % par rapport à 2006. Eu égard au déficit total, d'un montant de 41, 7 milliards d'euros, le seul service des intérêts de la dette représente pratiquement la totalité du déficit annuel. Cela mérite réflexion. Ainsi, sur 100 euros versés par le contribuable, 15 euros servent à financer la charge de la dette, dépense qui n'est pas véritablement utile.
Encore faut-il savoir que nous vivons sous la menace d'une épée de Damoclès : il n'est pas évident que se maintienne le niveau historiquement bas des taux d'intérêt. Évidemment, l'effet ne sera pas immédiat en raison d'un certain lissage compte tenu des durées d'amortissement.