Intervention de Philippe Marini

Réunion du 29 novembre 2006 à 15h30
Loi de finances pour 2007 — .débat sur l'évolution de la dette

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général :

En tout cas, cette législature s'achèvera sur un signe d'espoir : pour la première fois depuis fort longtemps, si les données prévisionnelles sont respectées, nous devrions être en mesure de stabiliser la dette publique. Mais cela ne saurait suffire ; ce n'est qu'une phase de transition.

Chacun est responsable de sa gestion et, de ce point de vue - je suis légitimement exigeant et jamais complaisant -, il convient de donner quitus de ce résultat au Gouvernement et au ministre délégué au budget qui le représente.

La dette négociable de l'État s'établira, au 31 décembre prochain, à environ 890 milliards d'euros. Elle constitue plus de 95 % de la dette de l'État. Celle-ci représente près de 80 % de la dette des administrations publiques, dont le montant, au 31 décembre 2005, était de 1 138, 4 milliards d'euros. Le ratio d'endettement à la fin de 2005 était de 66, 6 % du produit intérieur brut, soit les deux tiers.

En 2006, des opérations significatives budgétaires, patrimoniales et de trésorerie ont été effectuées. Il convient de bien les appréhender et de ne pas les surestimer.

Cette année, le taux de la dette publique par rapport au produit intérieur brut diminuerait de deux points, pour passer à 64, 6 % du produit intérieur brut.

Par ailleurs, un effort de réduction supplémentaire d'un point en 2007 est prévu. Cependant, il convient de rappeler exactement ce qui s'est passé en 2006.

Au 31 août 2006, 13, 2 milliards d'euros de dettes ont fait l'objet d'un rachat par l'État grâce à des recettes de privatisation, en particulier dans le secteur des autoroutes.

De ce fait, le programme de financement de l'État à moyen et à long terme a pu être revu à la baisse par rapport au programme initial. Il est probable que le plafond d'appel à l'emprunt que nous avons voté l'an dernier ne sera pas atteint, puisque notre vote porte sur un plafond et que le Gouvernement est toujours libre d'équilibrer ses comptes en réalisant moins d'emprunts que prévu.

Par ailleurs, une opération de trésorerie importante a été réalisée ; M. le ministre de l'économie s'en est d'ailleurs beaucoup enorgueilli.

L'encours de la dette à court terme de l'État a été diminué, toujours au 31 août 2006, de 14 milliards d'euros, grâce à la réduction du « matelas de trésorerie », par trois moyens : une réduction des aléas de trésorerie par une amélioration des informations communiquées à l'Agence France Trésor ; une coordination accrue des gestions de trésorerie des administrations ; l'introduction d'un nouveau bon du Trésor à court terme sur le modèle d'un produit voisin du Trésor américain, la première émission de ce type ayant eu lieu le 4 septembre, pour un montant de 2, 5 milliards d'euros.

Ces opérations sont utiles, mais elles ne doivent pas être surestimées, car il ne s'agit que d'opérations de trésorerie. Elles font décroître de deux points, dans le respect de la méthodologie d'Eurostat, le ratio de l'endettement public sur le produit intérieur brut.

Bien entendu, en termes de gestion de l'État et de recherche d'un équilibre durable de ces comptes, tout cela ne joue pas. Je ne nie pas la réalité de ce qui a été réalisé, mais il ne s'agit que d'aménagements de trésorerie.

Au demeurant, en matière d'opérations techniques, on pourrait aller plus loin grâce à une meilleure concentration des moyens et à une consolidation de la dette, qui doit englober celle de la sécurité sociale, dont la CADES ; l'ensemble de la gestion des passifs financiers a bien vocation à être regroupé techniquement sous la responsabilité de l'Agence France Trésor.

Je sais bien qu'il existe des particularités, des adhérences, mais il faut savoir, monsieur le ministre, « secouer » les habitudes pour aller dans le sens de l'intérêt général, c'est-à-dire suivre les orientations qui sont suggérées par la commission des finances du Sénat en la matière.

En 2007, nous approcherons le solde stabilisant. Mais ce n'est là qu'une étape ! Je rappellerai, en conclusion, les différentes phases à envisager pour l'avenir, c'est-à-dire pour la prochaine législature, et je reviendrai aux propositions que nous avons présentées lors du débat d'orientation budgétaire.

Pour la commission des finances du Sénat, l'objectif raisonnable est de parvenir, à la fin de la prochaine législature, à un déficit public d'un point. Aller plus vite dans la voie du désendettement ne représente pas que des avantages ; il faut veiller à la « soutenabilité » de l'effort.

Ramener le déficit public à un point en cinq ans permettra de ramener l'endettement public à 40 % du produit intérieur brut en 2030 seulement, mais cet effort suppose de réaliser une amélioration structurelle du solde public de 30 milliards d'euros d'ici à la fin de la prochaine législature.

Je vous rappelle la décomposition que nous avions présentée de ces économies structurelles : 10 milliards d'euros de vraies économies sur le budget de l'État ; 10 milliards d'euros de vraies économies sur les budgets sociaux ; 10 milliards d'euros d'économies grâce à l'amélioration du rendement de l'ensemble des recettes de l'État et de la sécurité sociale ; sans compter les 10 milliards d'euros que l'on continuera d'économiser en appliquant de manière persévérante les réformes déjà intervenues en matière d'assurance maladie et d'assurance vieillesse.

Monsieur le ministre, s'il est à l'honneur du gouvernement d'avoir atteint le solde stabilisant, il sera au coeur de la responsabilité du prochain gouvernement de se fixer une feuille de route qui permette à notre pays d'alléger son endettement.

De la sorte, nous aurons, dans le concert européen, une place mieux assurée ; nous pourrons mieux nous faire entendre et nous faire respecter, car un État trop endetté est un État dont la voix, hélas ! risque de ne plus être suffisamment écoutée, ...

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