Intervention de Jack Ralite

Réunion du 25 novembre 2008 à 10h00
Loi de finances pour 2009 — Article 23

Photo de Jack RaliteJack Ralite :

Mais là, la maladie est bien réelle et j’en veux faire la démonstration à travers quatre dates récentes.

La première est le 24 octobre 2008, à l’Assemblée Nationale : notre collègue Patrice Martin-Lalande intervient contre l’affectation de 15 millions d’euros de la redevance au GIP pour développer le numérique. Vous-même, monsieur le ministre, faites grise mine et proposez que cet emprunt ne soit possible que pendant trois ans ! Finalement, l’amendement a été retiré !

Sauf que trois ans, c’est le plan de numérisation et que le prélèvement de 2009 de 15 millions sera de 72 millions en 2010 et de 131 millions en 2014, soit 218 millions d’euros ! Il ne faut surtout pas toucher à la redevance quand elle importe au service public mais il faut lui mettre la main dessus quand elle ne lui importe pas !

La deuxième date est le 19 novembre 2008, la semaine dernière. La commission des finances et la commission des affaires culturelles ont reçu M. de Carolis. Je ne reviendrai pas sur sa démonstration, vous pouvez la consulter. Il a conclu en indiquant qu’il manquait 100 millions d’euros pour 2009. M. de Carolis a déclaré également que le plan d’affaires n’était pas réglé ; il ne l’est toujours pas à cette heure-ci, alors qu’à 18 heures commence le débat à l’Assemblée Nationale ! Depuis, d’ailleurs, M. de Carolis a affirmé qu’avec les événements actuels on atteindrait sans doute un déficit de 200 millions à 270 millions d’euros.

Je laisse imaginer ce qu’on en dira quand, l’année prochaine, on ne s’expliquera pas le déficit de France Télévisions ! Cette société nationale qui n’a jamais été en déficit le devient, alors qu’on prétend en faire la réforme historique.

Troisième date, le 21 novembre 2008 : je reçois des syndicalistes de France Télévisions et, parmi eux, un responsable de la CGT chargé par le comité du groupe de réaliser une étude sur ses finances. Il aboutit, lui aussi, aux 100 millions, avec, depuis, un correctif qui va dans le sens des 200 millions à 270 millions d’euros.

Je reprends son raisonnement. Le budget de 2008 prévoyait 800 millions d’euros de ressources publicitaires ; les ressources de compensation prévues par le projet de loi de finances s’élèvent à 450 millions d’euros, il s’agit de la taxe sur les télécommunications, sur les fournisseurs d’accès à internet et sur la publicité : 850 millions moins 450 millions égalent 350 millions d’euros, qu’il reste à trouver pour la période de transition.

France Télévisions évalue la recette possible sur la publicité restante, en journée, et sur le parrainage à 250 millions : 350 millions moins 250 millions égalent 100 millions d’euros. Il manque 100 millions d’euros pour atteindre l’équilibre financier !

L’auteur de cette étude ajoute que, bien évidemment, avec la diminution des taxes, la somme sera plus élevée et que – vous devez y songer – le calcul ne tient pas compte de la compensation de la partie publicité supprimée en programme. Or celle-ci est évaluée, selon ce qu’on y fera, entre 70 millions et 200 millions.

Il n’existe pas de crédit pour le développement ; les compensations des exonérations sont plafonnées ; rien n’est prévu pour le mobile, pour la haute définition ; rien n’est prévu non plus pour l’harmonisation salariale, alors que, certaines chaînes étant plus payées que d’autres, dans le cas d’une entreprise unique, il y aura forcément une demande d’harmonisation. Et puis il y a l’attitude de Bruxelles, qu’on ne connaît pas mais qui n’est pas favorable aux taxes actuellement votées.

La quatrième date est le 25 novembre 2008. Vous le savez sans doute par le journal d’hier, sept membres de la commission Copé sur dix-sept – je devrais dire sur douze, parce que le groupe des professionnels compte deux obligations de réserve, deux étrangers et deux personnes qui ne sont jamais venues ! –, soit 66 % des professionnels membres de la commission nommée par M. Sarkozy écrivent : « Moins de moyens, moins de modernité, moins d’indépendance. [...] on s’achemine vers un audiovisuel public fragilisé, avec une structure bancale, un financement aléatoire. Ce groupe de télévisions, indispensable à la bonne marche de la cité, va être amputé. Il va devoir vivre avec des béquilles. »

Ce matin – je dois le dire, si vous n’avez pas encore lu tous les journaux ! –, l’éditorialiste de la Tribune écrit : « Le projet de réforme tourne à la pantalonnade [...] On ne veut pas la payer. [...] L’État a transformé la mise en place de la réforme et son financement en un invraisemblable concours Lépine. »

J’ai voulu dire cela, parce que nous allons discuter des contenus, et je prendrai ma part aux débats.

En tout état de cause, nous discutons aujourd'hui des questions financières, et cet article 23 ne doit pas être examiné à la va-vite, sans avoir de bases de réflexion approfondie. On ne peut pas discuter de la réforme de l’audiovisuel sans savoir ce qu’il en est vraiment.

D’autant que, au même moment, la commission spéciale de l’Assemblée nationale sur la réforme de l’audiovisuel public a voté une diminution des taxes, faisant passer la taxe sur la publicité applicable à TF 1 de 3 % à 1, 5 % et modulant celle qui est applicable aux opérateurs Télécom et fournisseur d’accès internet de 0, 9 % à 0, 3 %.

Et comment taire l’application maximum par la France – seule à le faire en Europe – de la directive relative aux services de médias audiovisuels, ou directive SMA, qui multiplie les cadeaux, pour TF 1 notamment ? C’est effectivement le secteur privé qui est entièrement bénéficiaire de cette mesure.

Comment ne pas noter que le produit des taxes envisagées n’est pas affecté, de telle sorte qu’il restera disponible pour le Gouvernement qui en fera ce qu’il voudra ?

La commission des finances doit le savoir, comme la commission des affaires culturelles, et comme nous tous.

Vers quoi allons-nous ?

Un député, un peu ultra, M. Frédéric Lefebvre, qui dit tout haut ce que les autres pensent tout bas, …

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