Intervention de Jean-Paul Emorine

Réunion du 10 février 2005 à 15h00
Développement des territoires ruraux — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Jean-Paul EmorineJean-Paul Emorine, rapporteur :

Il a, c'est ma conviction, apporté une véritable valeur ajoutée, tant en première qu'en deuxième lecture, aux nombreuses dispositions concernant les zones humides et la chasse.

La commission mixte paritaire, qui s'est réunie le jeudi 3 février 2005, a examiné les quatre-vingt-six articles qui restaient en discussion. Elle a adopté dans une rédaction concertée trente articles. Trente-huit autres articles ont été adoptés dans la rédaction retenue par le Sénat en deuxième lecture ; un article a été adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale ; un autre a été supprimé. Enfin, la commission mixte paritaire a maintenu la suppression de seize articles.

D'emblée, permettez-moi de souligner quelques grands sujets de satisfaction.

Sur le délicat problème de la publicité relative au vin, la commission mixte paritaire n'a pu que valider la solution équilibrée retenue par le Sénat en deuxième lecture, sur proposition du Gouvernement. Ce texte, qui a le mérite de bénéficier tout à la fois du soutien des organisations professionnelles et de celui des associations de santé publique, est véritablement le fruit d'un processus concerté associant le Sénat, qui, notamment par la voix de notre collègue Gérard César, a pris l'initiative de la mesure, l'Assemblée nationale, qui s'est efforcée de préciser le champ d'application de la disposition, enfin, le Gouvernement, qui nous a présenté une solution de compromis.

L'extension des avantages de la zone de revitalisation rurale aux reprises d'activités commerciales et artisanales, mais aussi à celles des professions libérales, très chères à notre collègue Jacques Blanc, est un autre sujet de satisfaction. En dépit de ses réserves initiales, le Gouvernement a fini par se rallier aux solutions plus généreuses, mais finalement plus cohérentes, souhaitées par le Parlement.

La présence territoriale des services publics - encore un sujet bien difficile - a fait l'objet d'un consensus.

Il convenait, sur ce point, de faire preuve non seulement de volontarisme, mais aussi de réalisme. Le retour de l'Etat et de ses objectifs d'aménagement du territoire et de services rendus aux usagers dans le jeu des décisions portant réorganisation des services publics sur le territoire apparaît comme un progrès indéniable, de même que la concertation locale, qui permettra un débat entre les élus du territoire et les représentants du service public concerné.

C'est bien sûr avec un peu de recul que nous pourrons juger du « plus » que ce nouveau dispositif aura apporté à nos territoires ruraux confrontés aux fermetures de services publics.

L'adoption par la commission mixte paritaire de la mesure, ardemment défendue par notre collègue Daniel Soulage, tendant à instaurer un système de coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente des fruits et légumes périssables pendant les périodes de crise conjoncturelle est un nouveau sujet de satisfaction.

Je voudrais encore me réjouir de l'adoption, dès la première lecture, sur l'initiative de la commission des affaires économiques, de la disposition prévoyant la tenue, chaque année, d'une conférence de la ruralité qui permettra, sous la présidence du ministre chargé des affaires rurales, l'organisation d'un débat entre toutes les parties intéressées non seulement sur les problèmes actuels du monde rural, mais encore sur la mise en oeuvre de la présente loi et sur les moyens de l'améliorer.

Après les sujets de satisfaction, monsieur le secrétaire d'Etat, j'en viens aux sujets de « vigilance ».

Malgré les procès d'intention sur les amendements adoptés en deuxième lecture et confirmés par la commission mixte paritaire, le Sénat sera extrêmement vigilant - j'insiste sur ce point - sur la préservation de la loi Littoral.

Comment, en effet, ne pas qualifier de procès d'intention les déclarations de celles et de ceux qui feignent de confondre les rivages maritimes et les estuaires, larges de plusieurs kilomètres - ce sont eux que la loi Littoral protège -avec les ruisseaux et les étiers de 80 centimètres de large, qui font l'objet des amendements précités ?

Le régime social applicable aux entreprises du paysage a fait l'objet d'un long débat entre les assemblées et le Gouvernement. Chacun se souvient que les deux commissions parlementaires auraient préféré que l'affiliation de ces entreprises aux caisses du bâtiment et des travaux publics soit conditionnée par un seuil significatif d'activités non strictement paysagères. Le Gouvernement, on le sait, a seulement prévu, dans un décret, un seuil de 10 %.

Compte tenu des attentes des professionnels du secteur paysager et de la force de leurs arguments, il nous reste à exprimer le souhait que le Gouvernement saura faire évoluer ce seuil, qui nous paraît à bien des égards imposé et insatisfaisant.

S'agissant du problème du loup en zone d'élevage, la commission mixte paritaire a favorablement accueilli les arguments du Sénat qui a jugé, suivant l'avis d'une majorité des membres de sa commission des affaires économiques, qu'un nouveau dispositif législatif n'était pas indispensable dès lors que sont actuellement mises en oeuvre des mesures de régulation de l'espèce dans des conditions compatibles avec nos engagements internationaux et communautaires. Il s'agit, d'une part, de la convention de Berne ratifiée par la France en 1990 et, d'autre part, de la mise en oeuvre de la directive européenne « Habitats » à travers le réseau Natura 2000.

Rappelons que la directive impose un système de protection stricte des espèces animales telles que le loup, mais prévoit aussi une possibilité de dérogation à cette obligation pour prévenir des dommages importants à l'élevage. C'est au niveau réglementaire que la France a transposé en droit interne ce mécanisme dérogatoire lui permettant de réguler les populations de grands prédateurs.

Le Sénat restera, bien sûr, très attentif à la question de la régulation des loups, afin de répondre aux attentes, à bon droit angoissées, des éleveurs, notamment en zone de montagne, confrontés aux attaques des troupeaux. Il est de mon rôle d'appeler l'attention du ministre de l'environnement sur la grande vigilance que nécessite une régulation équilibrée.

Sur la question du maillage territorial en matière de santé publique vétérinaire et de protection des végétaux, nous avons souhaité maintenir la priorité donnée aux laboratoires départementaux, en faveur desquels les conseils généraux ont consenti d'importants investissements pour la réalisation des analyses animales et végétales.

Pour autant, cela doit être clairement affirmé, il n'a jamais été question de mettre ainsi en péril les laboratoires privés dynamiques ; je pense en particulier à ceux du grand Ouest, dont la compétence technique et la capacité de traitement sont reconnues par tous. Nous y serons attentifs.

Je me dois, enfin, d'évoquer un sujet de déception. Le Gouvernement va en effet nous présenter un amendement de suppression de l'article 34 bis, adopté par la commission mixte paritaire, tendant à permettre l'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée à tous les travaux de transformation de bâtiments agricoles situés dans des zones de revitalisation rurale en logements locatifs.

Sur le fond, les arguments développés en commission mixte me paraissent toujours valables : le patrimoine en cause est un patrimoine menacé ; les bâtiments concernés sont adjacents à la résidence principale. En outre, la mesure souhaitée par la commission mixte n'est pas d'un coût financier important.

Le Gouvernement fait valoir que l'adoption d'une telle disposition fragiliserait la position de la France dans les négociations européennes sur le périmètre du taux réduit de la TVA. Nous le comprenons, mais nous le regrettons.

Cela étant, un seul sujet de regret - limité - face à toutes les raisons de se réjouir que procure le texte, c'est en définitive bien peu. C'est pourquoi nous avons décidé de l'adopter.

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