Enfin, la commission mixte paritaire a confirmé la suppression de 16 articles, proposée par le Sénat.
J'en viens à la position du Gouvernement.
Les travaux des commissions parlementaires ont permis, à chaque lecture du texte, de rapprocher les positions du Gouvernement et du Parlement sur un nombre croissant d'articles.
Un esprit d'ouverture et de dialogue a présidé à la discussion du projet de loi et le Gouvernement y est resté fidèle, prenant toujours acte de la volonté du législateur lorsque certains amendements étaient adoptés contre son avis ; je peux en témoigner.
Cet esprit d'ouverture, nous le conservons tous à l'issue de la commission mixte paritaire. A cet égard, une demi-douzaine d'articles retenus en commission mixte paritaire ne correspondent pas toujours exactement aux solutions qui avaient la préférence du Gouvernement. Mais c'est toute la noblesse du débat parlementaire !
Toutefois, une mesure - celle qui a été introduite à l'article 34 bis qui prévoit l'application du taux réduit de TVA pour la transformation de bâtiments agricoles en logements dans les zones de revitalisation rurale - pose une sérieuse difficulté quant à sa compatibilité communautaire. C'est donc la seule disposition qui fasse l'objet d'un amendement substantiel du Gouvernement sur le texte proposé par la commission mixte paritaire. J'y reviendrai, mais je tenais à souligner dès à présent la spécificité de ce problème.
Les autres amendements qui vous seront soumis aujourd'hui, mesdames, messieurs les sénateurs, relèvent, quant à eux, de l'utile relecture finale du texte.
Ce projet de loi est le fruit du travail d'un certain nombre de ministres ; l'esprit interministériel qui a prévalu n'est pas monnaie courante lorsqu'il s'agit d'élaborer des textes.
Serge Lepeltier, Gilles de Robien, Frédéric de Saint-Sernin, Philippe Douste-Blazy, Xavier Bertrand, Léon Bertrand, Hervé Gaymard - qui est à l'origine de ce texte -, Dominique Bussereau et moi-même avons fourni un travail très utile. Un dialogue a été instauré avec le Parlement, tout particulièrement avec le Sénat.
Ce texte nous permet d'envisager l'avenir du monde rural avec une approche nouvelle. Il constitue en effet une véritable boîte à outils, destinée à faciliter les projets des acteurs du développement rural.
J'insisterai encore une fois - bien que j'entende un peu moins de critiques à ce sujet - sur l'intérêt de la multiplicité de ces outils. Il ne faut pas s'en plaindre : cala traduit simplement la diversité des problèmes que connaît le monde rural.
L'an dernier, la DATAR, a mis en évidence l'existence de trois campagnes : les campagnes des villes, les nouvelles campagnes et les campagnes fragiles. Évidemment, les outils pour ces trois campagnes ne doivent pas être les mêmes.
L'Assemblée nationale et le Sénat ont enrichi ce texte, participant ainsi à accroître l'impression trompeuse de multiplicité de mesures.
En tout état de cause, il me paraît utile de rappeler les mesures importantes qui ont été adoptées à l'issue de la deuxième lecture : la confirmation d'allégements de la fiscalité en ZRR, notamment en faveur de l'installation d'entreprises ; la transposition au secteur agricole de mesures d'exonération de charges sociales pour les associations en ZRR ; une ouverture des interprofessions agricoles sur l'agriculture biologique et les produits de montagne ; l'harmonisation du statut des entreprises équestres ; la possibilité du conventionnement avec des particuliers pour le transport de personnes en milieu rural - il s'agit là d'un outil très concret, utile et attendu ; la possibilité d'ouvrir les groupements d'employeurs aux collectivités territoriales - c'est également une mesure très pragmatique ; des précisions sur le nouveau dispositif de l'aménagement foncier ; l'adoption d'un dispositif d'incitation à l'installation des professionnels de santé en milieu rural ; une simplification des modalités de constitution des associations foncières pastorales ; une sécurisation législative des plans de gestion cynégétique ; la reconnaissance de l'intérêt général de l'agriculture, du pastoralisme et de la forêt en montagne ; une redéfinition des missions du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles, le CNASEA ; la création d'une agence dédiée à l'information et à la communication agricole et rurale, etc.
L'accord de la commission mixte paritaire porte sur des dispositions tout aussi emblématiques. Je souligne d'ailleurs le rôle important joué par votre assemblée à cette occasion : le texte issu de la commission mixte paritaire reprend de nombreuses dispositions d'origine sénatoriale.
Je pense, en particulier, aux mesures parachevant le dispositif en faveur des zones de revitalisation rurale, à l'adaptation de la loi Evin à la publicité sur le vin, qui a été réalisée dans des conditions consensuelles, aux mesures destinées à améliorer la situation du marché des fruits et légumes - votre amendement a été conservé par la CMP, monsieur Soulage, et le Gouvernement a été attentif à l'évolution de ce dossier - à l'adoption des dispositions de protection des espaces agricoles et naturels périurbains, à celles qui sont relatives à l'aménagement foncier, aux précisions sur les différentes dispositions concernant les zones humides et les sites Natura 2000, à la définition des conditions de l'équilibre entre activités cynégétiques et territoires - M. Poniatowski a souligné qu'il s'agissait sans doute du point le plus sensible de ce texte, rappelant sa volonté d'équilibre, que je salue. En la matière, l'Assemblée nationale a repris la rédaction du Sénat.
Je pense enfin - les élus de la montagne y sont sensibles - à l'amélioration du dispositif d'autorisation des unités touristiques nouvelles en montagne et à la redéfinition du champ du service public de l'équarrissage.
Monsieur Emorine, vous souhaitez que soit reconsidéré le seuil de 10 % visé dans le décret que nous devons préparer en application de l'article 10 bis A et qui concerne le régime social des entreprises du paysage. Dominique Bussereau et moi-même suivons cette question avec Gérard Larcher. Nous ferons en sorte de prendre en considération votre requête. En réalité, cette question n'est pas encore tranchée définitivement.
Vous avez par ailleurs souhaité que nous attirions l'attention de M. Lepeltier sur la vigilance à observer en matière de régulation des loups. Je le ferai, mais je ne doute pas qu'il en sera informé.
Les débats en deuxième lecture ont permis d'identifier des chantiers de réflexion et de travail à poursuivre ou à approfondir. Dès l'adoption de ce projet de loi, nous devrons mettre en oeuvre les dispositions prévues ; c'est ce que j'appelle, comme d'autres, le « service après-vote ». Nous étudierons de nouveau les sujets qui méritaient plus de travail et plus de concertation. Je me suis engagé à associer aux groupes de travail les sénateurs intéressés par ces questions. Je le ferai, comme je l'ai fait entre les deux lectures.
Le « service après-vote » consiste aussi à faire en sorte que la rédaction des décrets soit conduite rapidement, dans la concertation. Le Gouvernement est tout à fait prêt à associer le Parlement à l'élaboration de ces décrets d'application, de façon que ceux-ci respectent bien l'esprit du texte. C'est un sujet majeur !
L'ensemble des ministres concernés, notamment Dominique Bussereau, Serge Lepeltier et moi-même, souhaite que ces décrets soient publiés rapidement. Une mission interministérielle sera constituée dans les meilleurs délais, afin de veiller à leur élaboration et poursuivre le plus efficacement possible le travail interministériel qui a permis l'élaboration du projet de loi.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l'ambition que le Gouvernement partage avec vous pour l'avenir de notre monde rural ne s'arrête pas au présent dispositif législatif. Nous avons engagé une démarche globale et cohérente. Ce texte sur le développement des territoires ruraux, « boîte à outils » très pragmatique et diversifiée, en est l'un des éléments. Mais nous avons d'autres axes de travail répondant à l'ambition du Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin pour l'avenir de l'agriculture et du monde rural.
Je rappelle que nous travaillons, avec Dominique Bussereau - c'est une tâche qui m'incombe plus particulièrement - à un plan d'action partenarial pour le développement des industries agroalimentaires, qui assurent le maillage de notre territoire rural et qui sont extrêmement importantes pour l'avenir de l'agriculture : elles représentent 70 % des débouchés de nos agriculteurs.
De même, nous travaillons à la préparation du projet de loi d'orientation agricole, qui doit vous être présenté au printemps prochain. Ce texte, également très important, reprendra un certain nombre de sujets que nous ne pouvions pas inclure dans le présent projet de loi et il sera l'occasion de fixer avec ambition et confiance les grandes lignes de notre agriculture et de notre monde rural pour les vingt prochaines années.
Tout cela s'ajoute aux mesures qui ont d'ores et déjà été prises, notamment dans le cadre des comités interministériels pour l'aménagement et le développement du territoire, les CIADT, pour construire, structurer et moderniser notre monde rural.
La conférence annuelle de la ruralité représentera un moment important pour faire le point sur les avancées de ces dossiers, pour étudier des mesures nouvelles et, le cas échéant, adapter celles sur lesquelles nous avons travaillé dans le cadre de ce texte.
Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de ce dialogue fructueux. Je vous remercie de comprendre que cette ambition doit être collective ; je ne doute pas un seul instant qu'elle le sera.