Il faut le reconnaître, ceux qui, parmi nos amis éleveurs, parviendront à passer le cap de cette fièvre catarrhale seront immunisés pour le restant de leurs jours contre toutes les catastrophes qui pourront leur tomber sur la tête ! En effet, depuis dix ans, ils auront absolument tout subi. Ils ont été agressés, accusés de tous les maux de la terre, traités de pollueurs, d'empoisonneurs, de massacreurs de la nature, entre autres. Ils ont subi l'ESB, l'encéphalopathie spongiforme bovine, la grippe aviaire, les fièvres porcines - j'en passe et des meilleures !
Dans presque toutes les situations, ces crises sanitaires ont eu pour origine des contaminations extérieures aux élevages - c'est d'ailleurs cela qui est dramatique : les éleveurs n'y sont pour rien ! - que les mesures d'hygiène et de prévention, appliquées pourtant scrupuleusement par les éleveurs, n'ont jamais permis d'éviter.
Ces risques sanitaires, accentués par l'augmentation des échanges à l'échelle de la planète, deviennent des facteurs prédominants de déstabilisation économique et de déséquilibre des marchés. Les épizooties d'influenza aviaire et de fièvre catarrhale en sont des exemples malheureusement plus que jamais d'actualité.
Particulièrement virulente et géographiquement étendue, la fièvre catarrhale est brutalement apparue depuis le mois de juillet 2006, ainsi que notre collègue Gérard Bailly l'a rappelé. Elle est arrivée par l'Italie du Sud, l'Espagne, la Corse, notamment, où elle était présente depuis un certain nombre d'années.
Cette maladie n'a pas épargné la France métropolitaine : elle est venue d'Afrique du Sud en passant par les Pays-Bas, au cours de l'été 2007. Nous n'avons pas eu de chance : la voilà, elle est bien là. Et nous pouvons vraiment dire que l'ensemble du cheptel français a été touché de plein fouet.
Les chiffres ont été rappelés tout à l'heure. Les miens, qui datent de 2007, sont obsolètes : le 19 octobre 2007, 5 900 cas étaient recensés. Or Gérard Bailly vient de nous apprendre que plus de 18 000 cas étaient actuellement dénombrés. Il est bien difficile aujourd'hui de savoir si certains départements sont épargnés : l'ensemble du territoire semble touché par cette catastrophe.
Toutes les mesures de protection sanitaire ont dû être adoptées dans l'urgence pour lutter contre la diffusion de l'épidémie - elle a, hélas ! continué à se propager -, dans l'attente de l'élaboration d'un vaccin efficace, ce fameux vaccin que tous nous attendons. Il arrive ; il vient, et, de ce point de vue, l'Allier, qui fait partie des départements prioritaires, n'est pas le plus à plaindre. Il n'en reste pas moins qu'il faudra impérativement fabriquer ce vaccin en très grande série.
À chaque crise, l'efficacité des dispositifs de protection et de gestion, indispensables à la maîtrise et à l'éradication de ces maladies, repose sur l'action responsable des éleveurs des zones réglementées et sur leur professionnalisme. Ces professionnels subissent, nous le disons tous, monsieur le ministre, d'insupportables contraintes, qui perturbent complètement les règles habituelles d'organisation de leur exploitation et des marchés, ce qui entraîne les surcoûts que nous savons et des pertes économiques extrêmement importantes.
Les dernières crises sanitaires et la façon dont elles surviennent appellent une nouvelle organisation préventive pour agir avec rapidité et efficacité, pour limiter ainsi les conséquences économiques, tout en assurant les soutiens nécessaires aux éleveurs.
La fièvre catarrhale, qui affecte aujourd'hui non seulement les ruminants domestiques - ovins, caprins et bovins - mais également les ruminants sauvages, a donc un impact sur la commercialisation des produits alimentaires, tels que les viandes, le lait ou leurs dérivés. Cette maladie, comme d'ailleurs la fièvre porcine, provoque de graves perturbations dans le commerce des animaux et de leurs semences ; elle constitue une menace sérieuse pour l'économie de l'élevage français.
Certes, des efforts notables ont déjà été accomplis : il convient de rappeler les différentes mesures qui ont déjà été prises, notamment le montant important des crédits qui ont été réservés dans la loi de finances pour 2008, dans un contexte de forte incertitude sur la potentialité d'une crise. Néanmoins, ces crédits risquent, hélas ! de se révéler insuffisants pour affronter des menaces croissantes de pandémies. En effet, il faut tenir compte de l'évolution rapide, trop rapide de la maladie vers le sud et l'ouest de la France.
La multiplication des épisodes de crise sanitaire nous conduit également à nous interroger sur les missions et le périmètre d'intervention respectifs de l'État et des acteurs économiques. Si la prise en charge sanitaire doit naturellement relever de l'État, en revanche, les coûts économiques induits pour les professionnels en cas de pandémie - je pense à toutes les pertes directes ou indirectes sur le cheptel - sont assumés aujourd'hui par les éleveurs. Or ils devraient l'être par des caisses de solidarité professionnelles, qui restent à inventer.
L'importance de l'impact économique de ces crises sanitaires nous invite à explorer de nouvelles modalités de couverture du risque. Nous devons essayer de réfléchir à la mise en place d'un véritable « plan ORSEC » des crises sanitaires, car, hélas !, depuis un certain nombre d'années, celles-ci nous arrivent toujours au moment où nous nous y attendons le moins.
La mondialisation des risques sanitaires est réelle. C'est pourquoi il est important d'améliorer également la coordination internationale pour la gestion de toutes ces crises, qui reste indissociable d'une meilleure organisation du réseau déconcentré des acteurs de la sécurité sanitaire.
Il est clair que nous devons réaliser des progrès, notamment en matière d'objectifs et d'indicateurs de performance, avec davantage de rigueur, d'exigence, d'ambition, dans un contexte de crise sanitaire qu'il nous faut désormais considérer comme un risque permanent.
Monsieur le ministre, je représente un territoire d'élevage, l'Allier, dans lequel le troupeau allaitant et le troupeau ovin sont très importants. C'est la raison pour laquelle je me permets d'appeler votre attention sur la situation des éleveurs de mon département, qui vivent depuis plus de dix ans des moments extrêmement difficiles, avec toutes les catastrophes qu'ils ont connues. Je comprends d'ailleurs fort bien que mes collègues entreprennent la même démarche pour leur propre département !