Ainsi, à l'inverse des réformes sur les retraites ou sur l'assurance maladie, la proposition de loi portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise n'a pas fait l'objet d'évaluations ni d'études prospectives.
Pourtant, toutes les organisations syndicales confondues, quelles que soient leur sensibilité, quels que soient leurs points d'accord et de désaccord, ont protesté contre cette réforme du temps de travail et ses conséquences néfastes, profondes et durables sur les salariés de notre pays. Même le Président de la République avait, à l'époque, qualifié la polémique sur la RTT de « débat imbécile ». Il faut croire qu'il a été dépassé, au sein de sa propre majorité, par les parlementaires les plus libéraux conduits par M. Novelli, qui a eu l'initiative de cette proposition de loi.
Ce dernier affirme d'ailleurs que « la durée du temps de travail ne devrait pas être fixée par la loi », mais que « c'est à la négociation » - il s'agit de la négociation entre les partenaires sociaux - « de le faire ». En disant cela, il exprime clairement son voeu le plus cher, à savoir éradiquer toute forme de droit opposable, de rééquilibrage du rapport de force entre le salarié et l'employeur.
Pour comprendre ce dont il s'agit, il faut se pencher sur le contenu de cette proposition de loi, qui réintroduit le face-à-face entre employeurs et salariés, au mépris des règles collectives, en permettant la négociation directe sur le rachat de jours de repos ou d'heures supplémentaires.
Présentée comme une mise à jour de l'organisation du temps de travail, un « assouplissement », cette proposition de loi n'est en réalité rien d'autre qu'une pure application du dogme libéral.
Une semaine avant les arbitrages du budget pour 2005, le Fonds monétaire international a fait connaître ses préconisations pour la France : il s'agit, entre autres, de stopper les hausses programmées du SMIC et la réduction de la durée du travail, de revoir le fonctionnement du marché du travail, de faciliter les licenciements, d'alléger les charges des entreprises tout en diminuant les dépenses publiques, et de ne pas remplacer les fonctionnaires partant en retraite.
Cela apporte de l'eau au moulin du Gouvernement et éclaire le sens véritable du débat idéologique actuel.
Vaut-il mieux travailler 35 heures ou 36 heures ? Quel doit être le nombre d'heures supplémentaires ? Autant de questions qui sont un trompe-l'oeil pour masquer et faire accepter les choix stratégiques qui visent, en tout lieu, à faire baisser le niveau de rémunération et de protection du travail.
M. Raffarin veut « remettre la France au travail » !