Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 8 avril 2009 à 14h30
Développement et modernisation des services touristiques — Article 14, amendements 8 1982

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari, rapporteur :

L’adoption de l’amendement n° 8 rectifié signifierait la privatisation de l’ANCV. En effet, cet amendement bouleverse en profondeur l’économie du dispositif mis en place en 1982 : l’ANCV perdrait le monopole d’émission des chèques-vacances, qui seraient émis et commercialisés par des entreprises privées, comme c’est le cas pour le titre-restaurant.

Cela marquerait, de fait, la disparition de la mission sociale de l’Agence, puisque cette dernière ne bénéficierait plus ni des commissions versées par les prestataires et par les acquéreurs ni des produits de trésorerie, qui constituent une véritable manne pour le tourisme social. Ses seules recettes proviendraient, dès lors, des chèques inutilisés, qui ne représentaient, en 2007, qu’un peu plus du tiers des crédits disponibles pour les actions sociales.

La commission ne peut donc qu’être défavorable à cet amendement, qui signerait, de fait, la fin de l’ANCV et la privatisation du système des chèques-vacances.

Certes, le fonctionnement de l’ANCV n’a pas toujours été optimal et une réforme profonde était devenue nécessaire. Cette réforme a été élaborée par les responsables de l’Agence et par la tutelle ; elle trouve son aboutissement dans le projet de loi que nous examinons. Il n’y a donc plus de raison de songer à une telle banalisation du chèques-vacances.

La commission souhaite par conséquent le retrait de l’amendement n° 8 rectifié, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 58 est indiscutablement fondé. Malgré le rapprochement des dispositifs prévu par le projet de loi, une inégalité demeurera en effet entre les PME et les grandes entreprises : quand les chèques-vacances sont délivrés par des comités d’entreprise, ils sont exonérés de CSG et de CRDS, de même que la participation des comités d’entreprise. Tel n’est pas le cas pour les PME. Cette différence de traitement n’a pas de réelle justification.

Elle impose en outre aux PME un travail supplémentaire : lorsque ces entreprises mettent en place des chèques-vacances, elles doivent intégrer la CSG et la CRDS versées à ce titre dans les bulletins de salaires.

Supprimer cette exonération simplifierait la tâche des PME et permettrait une meilleure diffusion des chèques-vacances en leur sein. Dans l’immédiat, le coût de cette mesure serait quasiment nul puisque, pour l’heure, seulement 30 000 salariés de PME bénéficient des chèques-vacances. À l’avenir, si l’usage des chèques-vacances se répandait dans les PME, ce coût deviendrait beaucoup plus important. C’est la raison pour laquelle la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

L’amendement n° 37 apporte des précisions intéressantes, mais la commission y est défavorable, lui préférant l’amendement 59 dans la mesure où ce dernier vise explicitement sur l’ouverture du dispositif aux non-salariés, ce qui correspond à l’une des missions de fait de l’ANCV. La commission souhaite d’ailleurs souligner avec force que l’amendement n° 59 est un amendement de cohérence et ne constitue pas une innovation juridique.

L’amendement n° 38 revient sur le texte de la commission en ouvrant à l’ANCV la simple faculté de recourir à des prestataires pour prospecter les entreprises de moins de cinquante salariés.

La commission est défavorable à cette proposition : lors de l’examen de la loi de 2006, c’est elle qui avait proposé de tirer les conclusions de l’impossibilité pour l’ANCV de diffuser le chèque au sein de PME et de confier à des prestataires sa commercialisation dans ces entreprises. Les faits ont en effet démontré que l’Agence ne parvenait pas à prospecter les petites entreprises. Le recours à l’obligation s’impose donc.

S’agissant du respect de l’égalité entre petites et grandes entreprises, la commission partage le souci des auteurs de l’amendement de voir garantir un principe tout à fait fondamental. Pour autant, le préciser n’est pas nécessaire dès lors que le respect de ce principe découle du droit ordinaire des marchés publics, auquel l’Agence s’est volontairement soumise.

La commission souhaite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 9 rectifié prévoit que l’Agence est tenue de conclure des conventions avec des prestataires privés pour démarcher non seulement les PME, mais aussi toutes les entreprises ainsi que les organismes sociaux, en particulier les comités d’entreprise.

La commission n’est pas favorable à cet élargissement. En effet, si l’ANCV connaît des difficultés pour diffuser les chèques-vacances auprès des PME, elle parvient sans aucun mal à le faire dans les grandes entreprises et dans les comités d’entreprise. Les seules limites à son développement tiennent aux exonérations de CSG et de CRDS dont ne bénéficient pas les chèques-vacances et qui les désavantagent vis-à-vis d’autres produits concurrents.

Je rappelle que deux mesures essentielles du projet de loi relatives l’une au revenu fiscal de référence, l’autre à la non-mensualisation des ressources, permettent une diffusion plus large des chèques-vacances.

En pratique, rien ne justifie donc que l’ANCV doive conclure des conventions pour la diffusion des chèques-vacances auprès de tous les opérateurs. De fait, cela signerait la disparition des services commerciaux de l’Agence, qui ne pourraient décemment faire longtemps concurrence à des opérateurs privés financés par l’Agence.

Pour autant, je comprends les intentions des auteurs de l’amendement, qui soulèvent implicitement la question de la rémunération de ces intermédiaires : sera-t-il rentable pour eux de prospecter les seules PME ? Aux yeux de la commission, cette question n’appelle pas de réponse tranchée de principe ; tout dépendra du montant de la rémunération que l’ANCV versera à ces prestataires.

Sur ce point, monsieur le secrétaire d’État, il serait bon que vous nous apportiez des précisions.

J’en viens à l’amendement n° 39. L’article L. 3321-1 du code du travail, issu de la loi du 3 décembre 2008, prévoit que la liste des établissements publics industriels et commerciaux où est mise en place la participation des salariés est dressée par décret en Conseil d’État. L’ANCV étant un établissement de cette nature, cette mesure est d’ordre réglementaire. Prévoir une telle disposition dans la loi aboutirait à créer un certain flou juridique : certains EPIC relèveraient de la participation au titre de la loi, d’autres au titre du règlement. De fait, il y aurait là une forme d’inégalité peu satisfaisante.

C’est pourquoi, si je partage tout à fait le souci des auteurs de cet amendement, je ne puis néanmoins qu’être défavorable à son adoption.

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