Intervention de Jack Ralite

Réunion du 12 janvier 2009 à 21h45
Communication audiovisuelle — Article 5

Photo de Jack RaliteJack Ralite :

L’article 5 porte sur la composition du conseil d’administration de France Télévisions.

Selon le projet gouvernemental, cette instance comprend quinze membres ainsi répartis : le président, nommé par le Président de la République ; cinq représentants de l’État ; deux parlementaires désignés par les commissions chargées des affaires culturelles des deux assemblées, soit un représentant de chaque assemblée ; cinq personnalités qualifiées désignées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel ; deux élus du personnel.

Une telle répartition montre qu’il existera, quoi qu’il arrive, une majorité qualifiée pour faire valider toute délibération proposée au conseil d’administration.

Quelles observations peut-on encore formuler sur ce qui s’apparente à une mise en coupe réglée de l’audiovisuel public ?

On peut, dans un premier temps, se reporter à l’existant, c’est-à-dire à l’état de la loi de 2000 qui avait mis en place la société France Télévisions.

L’article 47-1 de la loi de 1986 modifiée par la loi d’août 2000 prévoyait la répartition suivante des postes :

« Le conseil d’administration de la société France Télévisions comprend quatorze membres dont le mandat est de cinq ans :

« 1° Deux parlementaires désignés respectivement par l’Assemblée nationale et par le Sénat ;

« 2° Cinq représentants de l’État ;

« 3° Cinq personnalités qualifiées nommées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, dont une au moins est issue du mouvement associatif, une autre au moins est issue du monde de la création ou de la production audiovisuelle ou cinématographique et une au moins est issue de l’outre-mer français ;

« 4° Deux représentants du personnel élus conformément aux dispositions du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel nomme pour cinq ans, à la majorité des membres qui le composent, le président du conseil d’administration de la société France Télévisions parmi les personnalités qu’il a désignées. »

Il apparaît donc clairement que le projet de loi dont nous discutons a pour objet, d’une part, d’accroître le nombre d’administrateurs désignés par le pouvoir exécutif et, d’autre part, de renvoyer aux seules commissions compétentes, et non aux assemblées parlementaires, la nomination des représentants respectifs de chaque chambre, ce qui ne traduit en aucune façon un quelconque progrès des droits du Parlement.

Pour faire bonne mesure, les personnalités qualifiées nommées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel peuvent fort bien n’avoir qu’un lien extrêmement ténu avec le secteur audiovisuel puisque rien, dans le texte proposé, ne contraint d’assurer une représentation du milieu associatif, de la création audiovisuelle ou encore de l’outre-mer. Quant à la représentation du personnel, elle est maintenue à deux sièges, donc réduite de manière relative.

Ce n’est donc pas à une avancée démocratique que procède l’article 5, mais à un recul.

Ce dispositif institutionnel marque en effet un recul par rapport non seulement à l’existant, mais également à la situation de l’ancien ORTF, où les sièges du conseil d’administration se répartissaient équitablement entre représentants de l’État et représentants de la société civile, comme des personnels de l’Office.

Notons que, à l’époque, c’était le conseil d’administration lui-même qui désignait son président, généralement choisi parmi les représentants de l’État, et son vice-président ; je crois savoir qu’il était de coutume que ce vice-président soit issu de l’autre partie du conseil.

Même en 1974, lorsque le pouvoir giscardien a démantelé l’ORTF, les sociétés de programme avaient respecté cette règle de parité puisque, par exemple, le conseil d’administration d’Antenne 2 comptait six membres : deux représentants de l’État, un parlementaire, deux personnalités qualifiées issues de la presse écrite et du monde culturel, un représentant du personnel. Là encore, c’était le conseil lui-même qui élisait son président, dont la nomination était ensuite validée par décision du conseil des ministres.

Le dispositif institutionnel mis en place par l’article 5 du projet de loi est donc nettement moins positif que l’existant. Il marque même un recul eu égard non seulement au statut des sociétés qui, aux termes de la loi d’août 1974, avaient succédé à l’ex-ORTF, mais aussi au statut de l’Office tel qu’il était conçu dans la loi de 1964.

Je ne saurais donc conclure autrement qu’en posant une question simple : à quand faut-il que nous remontions dans le passé de l’audiovisuel public pour trouver une telle mainmise du pouvoir sur la télévision et la radio ?

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