Intervention de Bernard Cazeau

Réunion du 13 novembre 2009 à 21h45
Financement de la sécurité sociale pour 2010 — Article 21 et annexe C

Photo de Bernard CazeauBernard Cazeau :

Ma prise de parole vaudra pour l’article 21 et pour articles 22, 23 et 24, ce qui nous fera gagner du temps puisque j’étais inscrit sur chacun de ces trois articles. Ces articles vont d’ailleurs ensemble puisque l’article 21 concerne les prévisions de recettes pour 2010, et les articles suivants les tableaux d’équilibre pour 2010.

Regardons les faits en face : en l’espace de deux ans, la sécurité sociale devrait connaître un triplement de son déficit. Chaque année, ce sont plus de 10 milliards d’euros qui viennent s’ajouter à la dette que nos concitoyens seront dans l’obligation de rembourser ! Le déficit de notre protection sociale pourrait ainsi avoisiner 40 milliards d'euros pour l’année 2011.

M. Philippe Marini, que l’on ne peut guère qualifier de « gauchiste », n’a pas été tendre avec vous à ce sujet, madame la ministre, puisque, lors de l’audition de la commission des finances du jeudi 15 octobre 2009, il a jugé ce chiffre de 0, 75 %, avancé par Mme Christine Lagarde, comme « peu vraisemblable ». Il a ajouté par ailleurs que, « à moins de supposer un rattrapage de la perte de PIB due à la crise, sans mesures nouvelles alourdissant les prélèvements obligatoires, ramener à moyen terme le déficit public à son niveau d’avant la crise – sans parler du fait d’atteindre un niveau proche de l’équilibre – semble un exercice très docile, pour ne pas dire impossible ».

La masse salariale, dont l’évolution est déterminante pour les recettes de la sécurité sociale, diminuerait en 2010 de 0, 4 %. Rappelons qu’1 point de masse salariale, c’est 5 milliards d’euros de moins dans les caisses de l’État. Le taux de chômage devrait aussi fortement augmenter en 2010, passant, selon le dernier rapport Marini, de 9, 4 % en 2009 à 10, 3 % en 2010. Par rapport à la situation antérieure à la crise, le taux de chômage augmenterait ainsi d’environ 3 points, ce qui ferait croître structurellement les dépenses d’indemnisation du chômage d’environ 12 milliards d’euros, soit 0, 6 point de PIB. Cette tendance lourde n’apparaît pas dans l’article 21.

J’en viens aux tableaux d’équilibre de l’année 2010, joints aux articles 22, 23 et 24.

Les chiffres des déficits sont à proprement apocalyptiques : 14, 2 milliards d’euros de déficit pour le régime maladie, 12, 2 milliards d’euros pour le régime vieillesse, 4, 4 milliards pour la famille et 0, 7 milliard pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Jamais, dans l’histoire de la sécurité sociale, nous n’avons connu un déséquilibre aussi élevé !

Or une seule piste est avancée dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour augmenter les recettes : la contribution des assurés sociaux. Cela devient une habitude !

La hausse du forfait hospitalier, décidée par décret, et les nouveaux déremboursements devraient rapporter 310 millions d’euros : cela n’est pas grand-chose au regard du déficit, mais cela va faire exploser le reste à charge des Français, notamment les plus modestes d’entre eux.

Ainsi, près d’un assuré sur cinq reconnaît avoir modifié sa consommation de soins depuis la mise en place des franchises médicales, en 2008 : la part de ces personnes est de 31 % parmi les bas revenus, alors qu’elle n’est que de 9 % parmi les hauts revenus. De fait, les obstacles financiers à l’accès aux soins se multiplient, et cela va continuer ainsi. Selon l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé, l’IRDES, 7 % des Français déclarent déjà ne pas avoir de couverture complémentaire, mais ce taux est de 15 % pour les ménages gagnant moins de 840 euros par mois, de 13 % pour les ménages d’ouvriers et de 18 % pour les chômeurs.

À travers ces articles, vous nous demandez en somme d’avaliser votre attentisme sur les recettes, alors que nous avons formulé, au fil des années, des propositions crédibles et ambitieuses. Nous ne pouvons l’accepter, et nous voterons donc contre ces articles.

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