Dans la situation actuelle, on ne peut pas méconnaître, à moins d’être sourd et aveugle et de ne s’intéresser à rien, les profondes connivences qui existent. La confusion des genres est totale.
Qui dira que la presse, la télévision, l’audiovisuel sont indépendants du pouvoir économique ? Le contraire est une évidence. Qui dira que le pouvoir économique est indépendant du pouvoir politique majoritairement en place ? La connivence est visible chaque jour. Il n’est que de voir les décisions qui sont annoncées et la manière dont elles sont prises. C’est très grave par rapport à l’idée que nous nous faisons de la République.
L’indépendance de la presse, qui est en quelque sorte un quatrième pouvoir, doit être garantie par rapport aux pouvoirs politique, économique, judiciaire, etc. Or nous ne pouvons pas dire que c’est le cas de la société dans laquelle nous vivons. Cela rend d’autant plus nécessaire le vote de cet amendement.
Je terminerai mon intervention en considérant les objections qui ont été apportées par Mme la ministre et M. le rapporteur.
D’abord, ils nous disent que ces principes figurent dans la jurisprudence. Est-ce un argument ? Il est évident qu’il existe de nombreuses décisions de justice sur ce sujet. Comment peut-on affirmer que, parce qu’il existe des décisions de justice et une jurisprudence sur un principe, il n’est pas pertinent de l’inscrire dans la Constitution ? Raisonnez a contrario, vous verrez que cet argument ne tient pas !
Ensuite, ils nous disent que ces principes sont énoncés dans des lois. Certes, il serait nécessaire d’adopter des lois plus strictes à cet égard. Mais, là encore, cet argument ne tient pas, parce que, s’il suffisait de dire qu’un principe figure dans la loi pour que celui-ci ne soit pas inscrit dans la Constitution, il n’y aurait plus rien dans la Constitution, il n’y aurait même pas de Constitution. Chacun a donc bien conscience de la grande faiblesse de cet argument.
Enfin, madame la ministre, vous avez évoqué le Comité présidé par Mme Simone Veil, pour laquelle nous avons tous beaucoup de respect, mais cet argument n’est pas valable lorsqu’il s’agit de la réforme de la Constitution de la République française, qui a été confiée au Parlement. Le fait de nous dire qu’un comité a été mis en place, fût-il présidé et constitué d’éminentes personnalités, ne saurait en aucun cas constituer un argument pour ne pas inscrire ce principe fondamental de l’indépendance des médias à l’égard de tous les pouvoirs au frontispice de notre Constitution.
En conclusion, je dirai qu’aucun des trois arguments opposés à l’amendement défendu par M. Assouline ne se justifie.