Intervention de Philippe Marini

Réunion du 12 décembre 2006 à 16h00
Loi de finances pour 2007 — Vote sur l'ensemble

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général :

Or, sans la loi organique et sans la capacité qu'elle offre de mieux associer le Parlement aux choix budgétaires, cette prise de conscience aurait été plus difficile et la norme de dépense n'aurait pas réussi à s'imposer en tant que variable clé de la politique budgétaire.

Ces acquis ne doivent pas faire obstacle à notre nécessaire vigilance, et je voudrais, de ce point de vue, aborder quelques questions de méthode.

Tout d'abord, la tentation des débudgétisations existe toujours. Elle est permanente, mais, grâce à leur vertu, les ministres et la majorité parlementaire doivent y résister, puisque ces débudgétisations ne sont pas conformes à l'esprit de la loi organique, qui s'est efforcée de bien limiter les exceptions aux règles d'unité et d'universalité budgétaires.

Lors de la discussion générale, je m'étais permis, afin de frapper un peu les esprits, de parler de l'« agencisation » de l'État pour évoquer la création d'établissements publics ou de personnes morales dédiés à des objectifs spécifiques ou à la mise en oeuvre de politiques particulières : celle-ci est une bonne chose s'il s'agit de bien clarifier l'exercice des responsabilités et de faire avancer la réforme de l'État, mais elle est condamnable si ce n'est qu'une simple commodité pour échapper à l'application de la norme de dépense.

Je n'émets pas un jugement défavorable sur la création d'agences, mais j'en appelle à la vigilance, en particulier pour ce qui concerne les affectations de ressources : il ne faudrait pas que la multiplication des taxes affectées constitue une forme de « prélèvement à la source budgétaire ». Il est important que ces techniques n'obscurcissent pas la vue d'ensemble du Parlement.

En d'autres termes, nous devons rester attentifs à ces tentations, qui existent toujours de la part de tel ou tel groupe représentatif d'un secteur ou d'intérêts organisés, pour capter des ressources en amont et les affecter immédiatement à une ligne de dépense donnée sans passer par le budget général de l'État. La nécessité d'un budget intégré est, à l'évidence, une exigence démocratique.

À cet égard, je rappellerai ce qu'a dit Alain Lambert dans son récent rapport sur l'application de la loi organique relative aux lois de finances. En parlant de la règle de l'unité budgétaire, notre collègue écrivait : « Cette règle a donc une double dimension : le recensement exhaustif des recettes et des dépenses, et leur présence dans un document unique soumis au vote du Parlement. Cette unité budgétaire se justifie notamment par des soucis de visibilité et de contrôle démocratique, mais aussi d'unité de la prévision budgétaire et de l'autorisation parlementaire. Elle permet d'apprécier réellement l'équilibre budgétaire, de connaître de tous les comptes - la pratique ayant montré que les comptes échappant au document unique échappaient aussi à l'autorisation parlementaire, elle doit limiter les débudgétisations qui constituent autant d'économies apparentes - d'apprécier le volume réel des dépenses de l'État et de faciliter les choix budgétaires. »

Ce sont des principes qui avaient déjà cours avec l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, dès le début de la Ve République. Ils ont été validés et actualisés par la loi organique, et il convient naturellement de les respecter.

La commission des finances est également attachée, vous le savez, à la volonté de progresser dans le sens d'une vision plus globale des finances publiques. Nous observons l'augmentation de la part des recettes fiscales dans le total des ressources de la sécurité sociale et l'imbrication toujours plus complexe, voire confuse, des flux financiers entre l'État et la sécurité sociale.

C'est pourquoi la commission des finances a appelé à une remise à plat du mode de financement de la protection sociale qui serait fondée sur la distinction entre les logiques d'assurance et de solidarité et la fiscalisation des branches santé et famille, qui, pour nous, ont vocation à être un jour intégrées dans le budget de l'État.

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