Intervention de Serge Vinçon

Réunion du 12 décembre 2006 à 21h30
Conseil européen des 14 et 15 décembre 2006 — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Serge VinçonSerge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées :

Madame la ministre, vous avez évoqué à l'instant toutes les crises que connaît actuellement le monde. À cet égard, je veux saluer l'action lucide et pertinente de la France pour tenter de les résoudre.

Alors que nous approchons du terme de la présidence finlandaise et que nous nous préparons à entamer un cycle, très attendu, allant de la présidence allemande à la présidence française, pour sortir de la crise ouverte par le résultat des référendums français et néerlandais, nous constatons que la construction européenne n'a pas encore retrouvé sa dynamique.

La crise existe ; elle est réelle, profonde et certainement durable.

D'abord, la crise est réelle. L'avenir institutionnel de l'Union est toujours discuté entre les porteurs d'une ambition exigeante pour l'Europe et les tenants d'une révision minimale du traité de Nice.

Ensuite, la crise est profonde. Des intérêts divergents et des visions différentes font apparaître une Union européenne divisée. Sur des sujets aussi cruciaux que la relation avec notre voisin russe, la définition d'un intérêt commun peine à se faire jour. L'Union à vingt-sept a besoin de temps pour se consolider et retrouver un élan.

Enfin, la crise est durable. Dans notre pays, en dépit d'une adhésion profonde à la construction européenne, le « non » au référendum fut le fruit non pas de turbulences passagères, mais bien d'interrogations et de doutes sur la nature et le sens mêmes de l'aventure européenne.

Chez nos partenaires, ce phénomène n'est pas non plus absent, y compris, et ce n'est pas le moins inquiétant, parmi les nouveaux États membres.

Aussi, si nous continuons à placer nos espoirs dans le semestre qui vient, reconnaissons qu'il faudra du temps pour renouer avec la confiance et la solidarité.

Dans ce contexte, nous devons, me semble-t-il, nous garder de deux écueils.

Le premier serait d'anticiper sur l'échec, en remettant en cause l'édifice patiemment construit depuis près de cinquante ans et en renationalisant des pans entiers de l'action communautaire. Je pense naturellement aux débats sur la politique agricole commune, mais également aux propos entendus ces derniers temps sur les compétences des commissaires européens. Ne remettons pas en question ce que nous avons su construire ; il est loin d'être certain que les États seuls puissent faire mieux que l'Union en matière agricole ou commerciale.

De façon symétrique, le second écueil à éviter serait de considérer la méthode communautaire comme une sorte de panacée, susceptible de créer automatiquement de la cohésion et du consensus. C'est la tentation, bien légitime, de la Commission, avec l'appui du Parlement européen, que d'essayer de faire progresser l'intégration européenne dans des domaines où les compétences ne sont pas communautaires.

Ainsi, alors que nos concitoyens ont cru devoir s'opposer à la prétendue « constitutionnalisation » des politiques communes de la troisième partie du traité constitutionnel, la passe d'armes institutionnelle entre le Conseil et le Parlement européen à laquelle nous avons assisté sur le budget de la politique étrangère et de sécurité commune ne me semble pas être de nature à rétablir la confiance. Le débat sur le traité constitutionnel n'a que trop souffert de ces reproches d'inaction supposée dans des matières où l'Union n'a pas compétence ou, à l'inverse, d'interventionnisme excessif dans des domaines qui lui sont étrangers.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion