Intervention de Brice Hortefeux

Réunion du 17 janvier 2006 à 10h00
Questions orales — Risques d'inondation à paris

Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales :

Monsieur Pozzo di Borgo, aussi jeune que vous soyez, vous avez évoqué la grande crue de 1910. Vous avez raison : le renouvellement d'une telle crue à Paris constitue un risque tout à fait réel. Or il faut savoir que 880 000 habitants d'Île-de-France, soit un quart de la « population inondable » de notre pays, en seraient victimes.

Une crue de cette ampleur toucherait en outre 170 000 entreprises et causerait, selon l'estimation qui a été réalisée en 1998 et à laquelle vous avez fait référence, 12 milliards d'euros de dégâts. Ce serait donc un désastre humain, économique et social.

Une telle crue affecterait gravement non seulement les transports, l'approvisionnement en eau et en énergie et la gestion des déchets de l'agglomération, mais encore la vie de toute la nation.

Comme vous l'avez suggéré, garder la mémoire du risque est la première des nécessités pour mieux s'en prémunir. Mais, ainsi que vous le souligniez, il ne suffit pas de se souvenir : il faut surtout agir.

Vous aviez déjà, le 21 janvier dernier, interrogé le Gouvernement sur ce sujet. Depuis, trois réformes fondamentales ont été menées par l'État.

Premièrement, en application de décrets du 12 janvier 2005 et du 30 mai 2005, un schéma directeur de prévision des crues du bassin Seine-Normandie a été élaboré en large concertation, notamment avec les collectivités territoriales, et il entrera en vigueur cette année.

Au lieu de treize services d'annonce de crues, le bassin sera doté de quatre services de prévisions de crues, plus opérationnels. En particulier, s'agissant plus précisément de votre question, monsieur le sénateur, l'objectif est de prévoir, à trois jours au lieu de vingt-quatre heures, une crue majeure de la Seine.

Deuxièmement, la mission inter-services interdépartementale de l'eau pour Paris et la petite couronne a été réorganisée afin de mettre en oeuvre une politique unifiée de l'État dans le domaine de l'eau. La prévention des inondations est l'un des axes prioritaires de cette politique. Cela impose un suivi et un contrôle des digues, mais aussi la maîtrise des ruissellements et une réduction de la vulnérabilité en lien étroit avec les collectivités territoriales concernées.

Enfin, dans chacun des départements intéressés, la direction départementale de l'équipement - ou la direction de l'urbanisme, du logement et de l'environnement pour Paris -sera, dès cette année, le service unique de la police de l'eau.

Ce nouveau dispositif a pour but de rendre la stratégie de l'État plus claire et de garantir une meilleure cohérence de ses actions.

Au-delà de la gestion de crise, pour laquelle un travail essentiel de préparation a été accompli depuis 2002 par le préfet de zone de défense, je souligne qu'aucune des solutions que vous avez avancées, monsieur le sénateur, ne relève de la compétence exclusive de l'État.

Ainsi, le comité de bassin est en train de réviser le SDAGE - schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux - du bassin Seine-Normandie. Il doit être achevé à la fin de 2009 et un avant-projet de SDAGE est prévu pour la fin de 2006.

Par ailleurs, le schéma directeur de la région d'Île-de-France est, comme vous le savez, en cours de révision par le conseil régional. Le mandat que, le 13 septembre 2005, le Gouvernement a confié à ce sujet au préfet de région, Bertrand Landrieu, prévoit que l'État sera attentif à ce que ce schéma directeur concourre à une réduction de la vulnérabilité de l'Île-de-France aux risques. Il veillera particulièrement à « l'exposition de nouvelles populations aux risques d'inondation ».

Enfin, s'agissant de la protection des zones habitées en Île-de-France, l'État, pour sa part, a déjà engagé près de 8 millions d'euros au titre du contrat de plan avec la région. Outre leur soutien coordonné, à hauteur de 25 % chacun, aux programmes des collectivités locales, l'État et la région ont également contribué aux études du projet de l'institution interdépartementale des barrages-réservoirs du bassin de la Seine dans la Bassée.

Cette institution, désormais appelée poétiquement « Les Grands Lacs de Seine », envisage de réaliser des casiers de rétention d'eau dans la Bassée, entre Bray-sur-Seine et Montereau, pour ralentir l'onde de crue de la Seine en amont de sa confluence avec l'Yonne et réduire ainsi d'environ vingt centimètres le niveau des inondations de Montereau à Paris.

Ce dispositif anti-crues a pour caractéristique de faire appel à des méthodes douces, comme le programme phare d'aires de sur-stockage mis en oeuvre par l'entente Oise-Aisne. Il mérite d'être examiné dans le cadre du plan Seine décidé au CIADT du 12 juillet dernier. L'année 2006 sera consacrée aux concertations nécessaires à la définition en commun d'un programme pluriannuel d'actions concrètes pour la période 2007-2015.

Vous pouvez donc le constater, monsieur le sénateur, c'est toute une panoplie de mesures de prévention, de prévision et de protection que l'État, les collectivités territoriales, les responsables économiques et sociaux doivent déployer en même temps et ensemble pour lutter le plus efficacement possible contre les inondations.

Dans ce domaine, il n'y a pas de grandes et de petites initiatives. Par exemple, le récent dossier publié par l'association La Seine en partage sur le risque d'inondation en Île-de-France est un document de référence qui, fort justement, s'adresse à tous.

En effet, il revient non seulement à l'État, mais encore à tout habitant, à toute entreprise et à toute collectivité situés en zone inondable, d'assumer leurs propres responsabilités en prenant les dispositions qui s'imposent. Pour faire face au risque de crues, la solidarité est essentielle.

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