Pour notre part, nous ne comprenons pas votre surprise, monsieur le ministre. Permettez-moi de vous rappeler les conditions dans lesquelles la loi du 9 août 2004 a été adoptée.
L'objectif initial du gouvernement de l'époque était bel et bien la privatisation de nos deux grandes entreprises nationales, EDF et GDF. Souvenons-nous, cependant, que l'opinion publique n'y était pas du tout favorable, pas plus que ne l'étaient, il faut bien le reconnaître, bon nombre de parlementaires de la majorité. C'est certainement pour cette raison que les sénateurs du groupe UMP ne se bousculent pas aujourd'hui pour siéger, encore moins pour participer à ce débat de fond sur l'avenir de notre indépendance énergétique !
Dans ces conditions, le gouvernement, par l'intermédiaire de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avait finalement assuré que l'ouverture du capital de ces deux entreprises ne serait que partielle. Afin de donner toutes les garanties à ce sujet, il avait fait inscrire ce seuil dans la loi.
À la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité qu'avait déposée le groupe CRC lors de l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur ce texte, le rapporteur de l'époque, Ladislas Poniatowski, répondait : « ...vous considérez que l'article XVII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 n'est pas respecté. Vous précisez, notamment, que la nation sera dépossédée de sa propriété.
« Sur ce point également, je vais me répéter. Il est vrai que le Gouvernement a changé de position ; il a même été beaucoup plus restrictif à la suite du travail de fond mené par Nicolas Sarkozy et par Patrick Devedjian lors des négociations avec les syndicats. C'est la preuve que le dialogue social est une phase importante, décisive, et qu'il peut amener un gouvernement à modifier sa position.
« Le Gouvernement a pris des engagements : l'ouverture du capital n'ira pas au-delà de 30 %.
« Cela signifie que l'Etat restera propriétaire à plus de 70 % de Gaz de France et d'EDF. En conséquence, la nation n'est pas dépossédée ! »
Tels sont les propos qui ont été tenus à l'époque. Deux ans plus tard, finies les belles promesses !
La loi du 9 août 2004 s'appuyait sur cette conception, et c'est sur ce fondement qu'elle fut adoptée.
Aujourd'hui, est annoncée une éventuelle OPA hostile du groupe Pinault sur Suez, qui lui permettrait de reprendre le pôle eau, déchets et services à l'énergie, la branche énergétique revenant à Enel.
Or, chers collègues de l'UMP, faut-il vous rappeler que c'est pour empêcher une OPA hostile d'Enel sur Suez que le Premier ministre a donné, dans l'urgence, son feu vert à la fusion avec GDF, le 25 février dernier ?