Intervention de Yves Coquelle

Réunion du 12 octobre 2006 à 15h00
Secteur de l'énergie — Articles additionnels avant le titre ier

Photo de Yves CoquelleYves Coquelle :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la directive gaz dont nous transposons la teneur dans le cadre de ce projet de loi répond, quant au fond, à un certain nombre d'attendus philosophiques que nous pouvons au demeurant parfaitement critiquer.

Ainsi, pour ne citer que quelques exemples, prenons les termes du second considérant de la directive : « L'expérience acquise avec la mise en oeuvre de cette directive [la première directive gaz] montre les avantages considérables qui peuvent découler du marché intérieur du gaz, en ce qui concerne les gains d'efficacité, les réductions de prix, l'amélioration de la qualité du service et l'accroissement de la compétitivité. Cependant, d'importantes lacunes subsistent et il est encore possible d'améliorer le fonctionnement de ce marché, il faut notamment prendre des dispositions concrètes pour assurer des conditions de concurrence équitables et pour réduire le risque de domination du marché et de comportement prédateur, en garantissant des tarifs de transport et de distribution non discriminatoires par l'accès au réseau sur la base de tarifs publiés avant leur entrée en vigueur, et en garantissant la protection des droits des petits consommateurs vulnérables. »

Cependant, à la lumière de l'expérience, on pourrait dire au moins deux choses.

Premièrement, les attendus de la directive gaz sont fondés sur un texte - celui du traité sur l'Union Européenne - que nos compatriotes ont rejeté l'an dernier dans nombre de ses acceptions, les dispositions relatives à la concurrence libre et non faussée figurant dans la partie III du traité ayant été particulièrement combattues.

Deuxièmement, depuis 2003, le retournement tendanciel en matière de prix du gaz est pour le moins évident : il ne se passe quasiment pas de trimestre sans qu'une nouvelle poussée de fièvre, purement spéculative, ne vienne tirer les prix vers le haut, mettant précisément en cause les droits des usagers et la protection des plus vulnérables.

Enfin, comment ne pas souligner, une fois encore, que le texte de la directive est, comme souvent en matière de texte communautaire, empli de contradictions diverses. La transposition se doit de faire mieux !

En effet, l'alinéa 2 de l'article 3 de la directive indique notamment ceci : « En tenant pleinement compte des dispositions pertinentes du traité, en particulier de son article 86, les États membres peuvent imposer aux entreprises opérant dans le secteur du gaz, dans l'intérêt économique général, des obligations de service public qui peuvent porter sur la sécurité, y compris la sécurité d'approvisionnement, la régularité, la qualité et le prix de la fourniture, ainsi que la protection de l'environnement, y compris l'efficacité énergétique et la protection du climat. Ces obligations sont clairement définies, transparentes, non discriminatoires et contrôlables et garantissent aux entreprises de gaz de l'Union européenne un égal accès aux consommateurs nationaux. »

Plus loin, l'alinéa 4 de l'article 3 précise ceci : « Les États membres mettent en oeuvre les mesures appropriées pour atteindre les objectifs en matière de cohésion économique et sociale, de protection de l'environnement, qui peuvent comprendre des moyens de lutte contre le changement climatique, et de sécurité d'approvisionnement. »

Ce sont ces dispositions que nous souhaitons transposer au travers de cet amendement qui vise à spécifier le contenu du titre Ier de ce projet de loi.

Plutôt que de constater l'ouverture totale des marchés énergétiques, nous devons en effet valider, par l'adoption de cet amendement, le sens que nous donnons au service public dans notre législation nationale et, au sein de ce service public, la place prépondérante que nous donnons aux droits mêmes des usagers à un service de qualité.

Ce qui est devant nous en matière d'énergie est non pas la persistance de difficultés plus ou moins affirmées de fonctionnement du principe de libre concurrence - celle-ci étant de toute manière une vue de l'esprit, notamment au stade actuel de développement de l'économie -, mais bien plutôt la création de conditions d'une primauté des critères de service public dans le service rendu à la population.

Le service public à la française, quelle que soit la nature de ceux qui le mettent en oeuvre, est effectivement l'égalité de traitement des usagers, la garantie de tarifs abordables pour un service de qualité, la possibilité de prendre en compte des stratégies de long terme quant à la desserte ou à la sécurité d'approvisionnement.

Ce sont des éléments contenus dans cet amendement que nous vous invitons à adopter.

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