Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 12 octobre 2006 à 15h00
Secteur de l'énergie — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari :

En ce qui concerne le gaz, les missions de service public consistent notamment à assurer la sécurité de nos approvisionnements, la continuité de la fourniture de gaz naturel et la distribution de cette énergie au consommateur final, à des prix abordables et faiblement variables sur l'ensemble du territoire.

La France ne dispose plus de gisement de gaz depuis l'abandon du site de Lacq, qui produisait autrefois une quantité négligeable, et ses capacités de stockage équivalent à trois mois de consommation, ce qui permet de réguler les fluctuations saisonnières de la demande. Elle est donc obligée d'importer son gaz de pays producteurs tels que la Norvège, l'Algérie, la Russie, les Pays-Bas.

Le secteur gazier a été organisé afin que nous n'ayons pas à subir de ruptures d'approvisionnement ou à acheter du gaz à des prix très élevés. Il est caractérisé par des investissements lourds et fixes, propres à une industrie très capitalistique : gazoducs, terminaux de liquéfaction et de regazéification, méthaniers.

La rentabilité de ces investissements n'est assurée que sur le très long terme. Comme nous avons eu l'occasion de le souligner, ce type d'industrie a conduit à la mise en place de contrats à long terme, qui lient des producteurs, comme Sonatrach en Algérie ou Gazprom en Russie, et des acheteurs, comme Gaz de France, partageant les risques et les intérêts économiques.

Ces accords relèvent en premier lieu du politique. Par exemple, l'accord politique avec le producteur algérien Sonatrach a été « gagnant-gagnant ».

L'acheteur s'engage à enlever des quantités données sur des périodes très longues, allant de vingt à trente ans : le fournisseur dispose ainsi d'une garantie de recettes, qui lui permet d'emprunter pour financer son développement. De cette manière, les pays fournisseurs ont pu développer une activité totalement publique, avec des interlocuteurs eux-mêmes publics, portant garantie de l'État, comme Gaz de France.

L'acheteur doit, de son côté, être assuré qu'il trouvera des débouchés pour le gaz acheté par le biais de ces contrats à long terme.

Une telle situation, marquée à la fois par des investissements lourds et par des engagements à long terme, tend naturellement à engendrer des modes d'organisation monopolistiques ; d'où l'apparition de monopoles de fait et de droit, pour que ce secteur énergétique puisse fonctionner de manière optimale, dans le respect des missions de service public, s'agissant notamment de la sécurité d'approvisionnement.

C'est ce mode d'organisation, fondé sur des relations d'État à État, qui risque de voler en éclats, et avec lui la pérennité de notre service public du gaz.

Gaz de France, lorsqu'il était un établissement public à caractère industriel et commercial, achetait du gaz au nom de la France et bénéficiait de contrats de long terme d'approvisionnement gazier. Or toute cette organisation semble peu compatible avec la logique marchande et actionnariale d'une société, déjà cotée en bourse, que vous entendez privatiser.

Comment croire que le changement de statut de l'entreprise n'aura pas de conséquences sur la formation des tarifs ? Les hausses récurrentes du prix du gaz - plus de 30 % d'augmentation de 2004 à 2006 - sont tout à fait révélatrices à cet égard.

De plus, les annonces faites par le président de Gaz de France lors de la dernière présentation des comptes de l'entreprise, relatives à une hausse des dividendes versés aux actionnaires l'année prochaine, incitent à la réflexion. À quel prix paierons-nous demain notre gaz, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur ?

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