Intervention de Daniel Reiner

Réunion du 12 octobre 2006 à 21h30
Secteur de l'énergie — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Daniel ReinerDaniel Reiner :

Quoi qu'il en soit, avec votre projet, l'ensemble de ces terminaux deviendra privé.

Les infrastructures lourdes, ce sont également les capacités de stockage - dont la France est légitimement fière, et, là, c'est un point fort de GDF -, et les réseaux de transport et de distribution.

Une fois de plus, vous allez nous opposer le dispositif de l'action spécifique, mais il est bien fragile.

Ainsi, le commissaire européen Mac Greevy estime que l'actuel projet n'est pas de nature à contrevenir aux règles de l'Union européenne, mais il émet néanmoins tellement de réserves que nous ne pouvons qu'avoir des doutes ! Je le cite : « Ma conviction profonde est que les droits spéciaux, que les gouvernements s'attribuent afin de contrôler les entreprises privées, créent des obstacles aux investissements directs visant à influencer la gestion de ces entreprises, et sont contraires... » - le mot est tout de même très fort - « ...au marché unique ».

Neelie Kroes, de son côté, anticipe ce que pourrait être l'avenir et prépare un nouveau paquet de directives. Nous le savons bien, la Commission européenne est fondamentalement libérale.

J'ajoute que, dans la loi du 6 août 1986 relative aux modalités d'application des privatisations, l'État s'est arrogé le droit d'avoir un poids particulier qui dépasse sa part dans le capital. La loi précise que « hormis les cas où l'indépendance nationale est en cause, l'action spécifique peut à tout moment être définitivement transformée en action ordinaire par décret ». On pourrait donc perdre le bénéfice de l'action spécifique très rapidement, sans qu'il soit d'ailleurs nécessaire de repasser devant le Parlement.

Comment, dans ces conditions, ne pas douter de l'efficacité de tels outils.

Dans le cadre du pôle public que nous souhaitons, la position de Gaz de France sera confortée, et il pourra continuer en tant qu'entreprise publique, grâce à sa proximité avec l'État, à négocier avec les pays producteurs des contrats d'approvisionnement de long terme, dans des conditions plus stables et plus avantageuses.

Nous sommes convaincus que la privatisation de GDF, dans le cadre de la fusion avec Suez, conduira à privilégier à terme l'approvisionnement sur le marché spot, en dépit du contrat actuellement signé, mais limité dans le temps. On entrera à un moment ou à un autre - l'exemple américain le prouve - dans un marché spéculatif sur le gaz, ce qui est extrêmement dangereux pour la stabilité des prix.

Je voudrais ajouter un dernier élément, qui reprend un de vos arguments : avec ce pôle public, il ne s'agit pas de constituer une « forteresse » nationale. L'interconnexion du réseau européen est absolument nécessaire : il faut certes créer un pôle européen de l'énergie face aux pays producteurs qui eux-mêmes s'organisent. Gazprom, c'est la Russie ; Sonatrach, c'est l'Algérie... Les États sont derrière ces entreprises.

La vocation de notre pôle public n'est pas de se comporter en prédateur sur d'autres marchés nationaux, mais d'être le vecteur d'une nouvelle politique européenne active de l'énergie, qui ne se limite pas seulement à des directives et qui ne passe pas nécessairement par la concurrence entre les divers opérateurs.

Dans quels domaines le pôle public peut-il jouer un rôle moteur ? Les capacités de production d'électricité, les contrats d'approvisionnement en gaz, les programmes de recherche - ô combien importants -, les actions de diversification des sources d'énergie - cela satisfera notre collègue Desessard - et les efforts de maîtrise de la consommation.

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