...sous prétexte d' « aligner » les dépenses que la France alloue à la HALDE sur celles que la Belgique accorde à l'autorité équivalente, alors que nos populations ne sont pas quantitativement comparables. Au Royaume-Uni, l'organisme analogue luttant contre les discriminations dispose de 30 millions d'euros.
Ainsi, les grandes déclarations de lutte contre les discriminations n'auront peut-être duré que le temps d'un affichage.
Pourtant, il a été clairement dit que la Haute autorité ne serait qu'une coquille vide si les moyens prévus ne permettent pas de mettre en place des relais locaux susceptibles de recueillir les plaintes ni d'accompagner les victimes.
Nous ne saurions conclure sans rappeler que la lutte contre les discriminations est la voie principale pour aboutir à l'égalité des droits et des chances, à laquelle nous aspirons toutes et tous.
Mais de quelle égalité parlons-nous ? De l'égalité républicaine, quitte à faire de notre République un rouleau compresseur qui exclut ?
Où est l'égalité ? Quand on ne peut pas travailler ni se loger en raison d'un état de santé ? Quand on refuse d'assurer des personnes en raison de leur séropositivité ? Quand, lors de leur entretien d'embauche, les jeunes sont sélectionnés en fonction de leur nom ou de leur adresse ? Quand des millions d'emplois sont réservés aux nationaux ? Quand, selon sa nationalité, on peut subir une double peine ? Quand, parce que l'on est ressortissant d'un Etat tiers, on est exclu d'une citoyenneté active, exclu du droit de vote et de la liberté de circulation ?
Où sont les droits des enfants ? Quand l'école publique exclut et produit un tel échec ?
Où sont les droits fondamentaux ? Quand le droit de travailler, de se marier, de vivre en famille, de se soigner ou de s'éduquer est bafoué quotidiennement ? Quand des milliers d'exilés sont enfermés dans des camps et que la vie des étrangers pèse aussi peu dans la guerre que l'Europe livre pour défendre ses frontières ?
Il est évident que la naissance de cette Haute autorité souligne l'échec de toutes les politiques de lutte contre les injustices et les exclusions.
Nous attendions de ce projet de création d'une autorité indépendante des résultats tangibles et concrets, car il s'agit de rétablir l'universalité des principes d'égalité entre tous les citoyens.
Or, le texte reste bien en deçà de toutes les attentes suscitées par l'ampleur de ce problème, qui met en danger notre démocratie.
Nous espérons que la Haute autorité ne se réduira pas à un « observatoire des discriminations » pour informer les victimes et pour favoriser les médiations, tout en servant de masque à une certaine impunité.
Nous exprimons ici notre déception et affirmons que nous serons vigilants.
Madame la ministre, le fait de créer cette autorité n'est pas suffisant pour que nous vous donnions « carte blanche ». Si nous ne pouvons, bien sûr, pas être défavorables à la création de cette instance, il n'en reste pas moins que nous veillerons très attentivement à sa réalité.
Nous refusons qu'il s'agisse d'un organisme pour rien, pour masquer seulement l'absence de volonté politique.
Face à l'hypocrisie de la majorité de nos instances, face au manque de souffle et d'ambition d'un tel projet, notre abstention est la meilleure des réponses.