Sur cet amendement, le Gouvernement ne pourra pas invoquer l'article 40 de la Constitution. En effet, je propose une mesure d'économie qui consiste à supprimer un dispositif fiscal appelé « amortissement Robien ».
J'aurais aimé assortir mon propos d'éléments tangibles. Mais je veux, monsieur le ministre délégué au logement et à la ville, vous faire part des difficultés que j'ai, en tant que rapporteur pour avis du budget du logement, pour obtenir un état des lieux précis de ce dispositif : nous ne connaissons ni son coût pour l'Etat, ni le nombre de contribuables concernés, ni l'étude qui a été réalisée sur les loyers pratiqués.
Je souhaite que cette demande soit prise en compte par vos services pour que le rapporteur pour avis du budget du logement dispose d'un certain nombre d'éléments pour éclairer la représentation nationale.
Monsieur le ministre, l'amortissement Robien est un contresens économique. Créé en « haut de cycle », c'est un contresens par rapport à la crise de l'immobilier, qui est certes quantitative, mais avant tout qualitative : il manque dans notre pays des logements à prix abordables pour l'accession à la propriété et des logements à loyers modérés pour la location, car l'amortissement Robien concurrence et déstabilise aussi bien le secteur de l'accession sociale à la propriété que le secteur locatif. Ce dernier est tellement séduisant que les promoteurs préfèrent investir dans le logement locatif plutôt que dans le secteur de l'accession sociale à la propriété. Cette tendance se vérifie dans ma circonscription.
L'amortissement Robien concurrence et déstabilise le secteur locatif parce que, dans certains endroits, les plafonds de loyers sont semblables aux prix du marché libre. Le dispositif a donc pour effet de tirer vers le haut le prix des locations, qui ont augmenté de 48 % dans l'ensemble de la France au cours de ces trois dernières années.
Enfin, ce dispositif participe à la flambée des prix du foncier. Il n'y a plus de repères sur ce marché ! Le président de la fédération nationale des promoteurs constructeurs, la FNPC, le reconnaît lui-même dans un article récent paru dans un grand journal du soir, et M. Braye, dans son rapport pour avis, prend l'exemple de la communauté de Strasbourg - je parle sous le contrôle de M. Roland Ries - où les prix du foncier ont augmenté de 60 % en trois ans.
Cet exemple le confirme, laisser un tel dispositif en l'état revient, si vous me permettez l'expression, à se tirer une balle dans le pied ! Dans nos territoires respectifs, nous savons tous en effet combien il est difficile de faire en sorte que le foncier demeure à des prix qui nous permettent d'équilibrer les opérations.
Par ailleurs, alors que l'argent public devient une denrée rare, il n'est pas acceptable que l'Etat, donc la collectivité, ne tire pas un avantage d'un tel cadeau fiscal, car il s'agit bien d'un cadeau fiscal ! Il suffit de constater les démarches dont nous sommes l'objet, les uns et les autres, de la part d'organismes qui viennent nous conseiller à titre individuel sur la façon de payer moins d'impôts !
En fait, on achète non plus un appartement ou une maison, mais un produit fiscal pour payer moins d'impôts. En effet, lorsque l'acheteur investit dans un programme immobilier, le plus souvent situé dans des grandes villes éloignées de son lieu de domicile, on lui demande le montant de ses impôts afin de mieux le conseiller sur l'achat le plus propice pour réduire sa facture en fin d'année ! Et peu importe que le bien acheté corresponde ou non aux attentes du marché !
A titre personnel, je trouve ce cadeau fiscal d'autant plus scandaleux qu'il ne comporte aucune contrepartie sociale. Comme on le répète, la crise du logement est une crise du logement à bas prix. Par conséquent, il faut soutenir l'investissement locatif, mais avec une contrepartie sociale, comme le dispositif Besson, par exemple, même s'il doit lui-même être amélioré.