pour des raisons qui relèvent essentiellement de la conception que nous avons de l'organisation de l'État. C'est donc surtout au ministre chargé de la réforme de l'État que je voudrais m'adresser.
L'article 30 confie au Centre des monuments nationaux la maîtrise d'ouvrage sur les monuments dont il a la charge et, par délégation, sur les monuments appartenant à l'État. À ce titre, celui-ci se voit affecter 25 % du produit des droits de mutation à titre onéreux d'immeubles et de titres immobiliers à compter du 1er janvier 2007, dans la limite de 70 millions d'euros ; cette mesure est étendue, à titre rétroactif, à l'année 2006, comme nous le verrons dans le collectif budgétaire.
Vous savez, monsieur le ministre, que nous sommes critiques, depuis le début de la discussion de cette loi de finances, sur les alimentations spécifiques et sauvegardées de différents besoins dans telle agence ou tel organisme par des dérivations budgétaires.
Si la question de l'affectation n'est pas essentielle à nos yeux, cet article a en revanche deux inconvénients majeurs.
Le premier inconvénient, c'est la création d'un maître d'ouvrage supplémentaire, en concurrence avec deux autres maîtres d'ouvrage au sein des services du ministère de la culture : le service national des travaux, d'une part, qui a une compétence nationale, et les directions régionales des affaires culturelles, d'autre part, qui exercent la maîtrise d'ouvrage sur de nombreux monuments, notamment sous la responsabilité d'un conservateur régional.
Nous préférerions de beaucoup une réforme globale du système de maîtrise d'ouvrage, car la proposition qui nous est soumise aboutit à un enchevêtrement supplémentaire de compétences, dans un monde de la culture où les choses sont déjà relativement complexes.
Le deuxième inconvénient, c'est l'affectation aux seuls monuments nationaux de la ressource supplémentaire de 70 millions d'euros en 2006 et en 2007, soit 140 millions d'euros au total à consommer en 2007.
Or nous ne cessons de dire que les retards de crédits concernant les travaux affectent l'ensemble des monuments historiques et non pas seulement le patrimoine de l'État. La meilleure façon de répondre à ce besoin est-elle véritablement de réserver des dotations au patrimoine de l'État ?
Certes, il existe une fongibilité des crédits, mais nous observons une baisse de 18, 5 % des crédits budgétaires consacrés aux monuments historiques rattachés au programme « Patrimoine » de la mission « Culture ». Aussi, une affectation supplémentaire au profit d'une agence nationale destinée uniquement à une partie du patrimoine appartenant à l'État ne nous semble guère cohérente.
À la vérité, monsieur le ministre, si l'on peut consacrer 140 millions d'euros supplémentaires, quoi de plus simple que d'abonder la ligne budgétaire classique ? Pourquoi aller chercher des systèmes de dérivation compliqués qui, surtout s'ils se multiplient, sont en contradiction avec le principe d'universalité qui inspire la loi organique relative aux lois de finances, comme d'ailleurs l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 ?
Nous voyons un État ballotté par les clientèles externes et internes, de plus en plus fracturé, qui, je le crains, ne sera plus vraiment en mesure d'exercer ses missions.
L'augmentation des ressources est en soi une bonne nouvelle et doit être saluée comme telle ; elle montre que, malgré la faiblesse des marges de manoeuvre, les difficultés de financement du patrimoine monumental ont été entendues, mais est-ce pour autant la bonne solution ?
Monsieur le ministre, ne vous méprenez pas sur le sens de cet amendement. La commission ne vous demande pas de faire moins pour le patrimoine monumental - elle n'ose pas non plus, en tant que commission des finances, solliciter plus -, elle vous demande surtout de faire plus simple, parce que nous risquons de nous perdre dans la complexité d'un État qui ne nous semble pas, avec de tels systèmes, sur la voie d'une bonne réforme.
Voilà ce que je voulais vous dire au nom de la commission, monsieur le ministre. Ne le prenez pas comme une critique à votre égard, mais nous avons une approche quelque peu différente de la gestion des crédits et de la réforme de l'État.