Intervention de David Assouline

Réunion du 9 mai 2006 à 16h00
Volontariat associatif et engagement éducatif — Article 7, amendement 12

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Je pourrais écrire une ode au mouvement associatif, à l'esprit de générosité des jeunes et, notamment, au volontariat, c'est-à-dire au besoin de s'engager.

Toutefois, cela ne se résume pas en quelques mots. Pour prendre un exemple, je rappellerai que j'ai consacré une grande partie de mon existence à cet engagement. Par ailleurs, en tant qu'adjoint au maire de Paris chargé de la vie étudiante, j'ai mis en place une maison des initiatives étudiantes regroupant mille associations qui animent la vie universitaire après s'être beaucoup engagées dans des actions de volontariat répondant à cette demande d'engagement des jeunes, et ce avec succès, je dois le dire ; à cette occasion, j'ai pu découvrir une mine de créativité. Mais cela ne signifie pas que la générosité se situe en marge d'un besoin de sécurité dans le monde actuel, ni qu'a fortiori elle serait en contradiction avec lui. C'est bien cela que vous ne voulez pas prendre en compte, monsieur le ministre !

Si nous étions dans une situation de plein-emploi et qu'aucun problème d'emploi ne se posait pour les jeunes, que ceux-ci trouvaient sans difficulté un travail stable, rémunéré, ce dont nous discutons n'aurait pas grand sens. Le volontariat serait alors vraiment une voie différente qui ne pourrait jamais être utilisée par qui que ce soit, ne serait-ce que par le jeune lui-même qui, indépendamment de sa générosité, peut y trouver aujourd'hui une réponse partielle au manque d'emploi.

Par ailleurs, certaines associations connaissent de grandes difficultés, et ce par la faute du Gouvernement qui a, notamment, supprimé les emplois-jeunes. Disposant de peu de moyens, elles peuvent parfois être tentées - je ne dis pas que c'est le cas de toutes les associations - d'utiliser le volontariat à la place du salariat.

C'est bien dans ce contexte que nous posons cette question et non pas en général.

Il nous faut être précautionneux et, sans vouloir m'appesantir sur cet amendement n° 12, je dirai simplement que nous y abordons les nombreuses incertitudes qui entourent le montant de l'indemnité qui sera octroyée aux volontaires ainsi que ses modalités de versement.

Pour ce qui est du montant, tout d'abord, je me permettrai de faire observer l'existence de certaines contradictions dans les arguments avancés pour expliquer la manière dont est envisagé le volontariat.

On nous dit tout et son contraire, monsieur le ministre, à savoir que le volontariat doit être une activité à temps plein et que l'indemnité versée aux volontaires doit leur permettre de bénéficier de conditions de vie décentes. Dès lors, il est permis de déduire de ces affirmations que le montant de l'indemnité devrait se situer aux alentours du SMIC, qui n'est autre que le minimum légal de rémunération d'un travail à temps plein, même si, comme nous le savons, la majorité des minima conventionnels leur demeurent inférieurs.

Cela étant dit, en l'occurrence, il s'agit non pas d'un travail mais d'une mission. C'est pourquoi nous n'aboutissons pas aux mêmes conclusions.

En effet, selon le projet de décret, l'indemnité annoncée serait de 400 euros par mois, sans que le sort d'éventuels avantages en nature soit clairement fixé. Ces derniers seront-ils compris dans l'indemnité ? Pourront-ils venir en supplément ? Pourraient-ils même y suppléer ?

Bien entendu, monsieur le ministre, vous n'êtes pas obligé d'accepter notre amendement, mais en répondant aux questions précises que je vous pose, vous pourriez lever un certain nombre d'incertitudes quant à l'interprétation des choses et au montage des projets.

Ce problème n'est pas simple et entraîne deux autres questions qu'il n'est décidément pas possible de contourner : quelle est la nature du volontariat et, en conséquence, qui pourra y accéder ?

Pour notre part, nous avons le sentiment que ces questions n'ont pas été résolues avant de venir en discussion devant le Parlement.

Soyons précis : avec une indemnité de 400 euros par mois, soit moins que le montant du RMI, il est évident que l'on ne peut vivre décemment, puisqu'il s'agit précisément du revenu minimum !

Parallèlement, il nous est dit que la rémunération doit permettre aux volontaires de vivre décemment. N'est-il pas contradictoire de nous proposer un montant inférieur au minimum vital, tout en nous disant que ce minimum est nécessaire ?

Il ressort de tout cela qu'il faut soit disposer d'un hébergement gratuit, soit pouvoir vivre des revenus de son patrimoine. En d'autres termes, le volontariat serait réservé aux personnes disposant d'une certaine aisance financière ou aux femmes au foyer désireuses de s'engager dans un semi-bénévolat afin de pouvoir bénéficier d'un petit complément de revenus non imposable. Or, pour cette catégorie de la population, une activité à temps plein sera-t-elle acceptable ?

Si nous nous situons dans l'hypothèse d'un temps plein, les étudiants ne pourront pas non plus accéder au volontariat, puisqu'il leur faudra consacrer du temps à leurs études. Au reste, ils gagneront sans doute plus en travaillant à temps partiel !

Cette question en amène une autre, inévitable, monsieur le ministre : pour les représentants des collectivités locales que nous sommes, ce texte conduit, une nouvelle fois, à laisser celles-ci se débrouiller s'agissant du fonctionnement des associations et du financement de l'emploi associatif, et ce sans même que soit évoqué un transfert de charges, puisque l'État s'en est préalablement déchargé !

Enfin, les associations auront, on le conçoit sans peine, quelques difficultés à recruter des personnes à temps plein pour 400 euros par mois, ce qui ne manquera évidemment pas de limiter le volontariat.

Certains n'ont-ils pas imaginé, dans le cadre des nouvelles procédures de contrôle des chômeurs et des allocataires de minima sociaux, de contraindre ceux qui ne parviennent pas à retrouver un emploi ou qui sont jugés récalcitrants à se consacrer pendant quelque temps au volontariat ?

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