Le texte de l'article 2 tel qu'il nous est soumis, tout comme l'amendement n° 10 rectifié de la commission, introduit la rédaction définissant le test en trois étapes, à l'instar de ce qui a été fait à l'article 1er bis. Or ni la convention de Berne ni la directive ne nous y obligent. La seule contrainte est de respecter les critères, c'est-à-dire les étapes.
Aujourd'hui, l'Union européenne va remettre en discussion cette rédaction, fruit d'un compromis et surtout du lissage des traducteurs. Cette remise en cause est liée aux incertitudes engendrées par l'application des critères, qui s'avère être potentiellement « à géométrie variable » tant les termes sont généraux et vagues.
Au fond, entre nous, que signifie l'expression « cas spéciaux » ? Que signifient « exploitation normale » ou « préjudice injustifié » ? Est-ce à dire que certains préjudices sont justifiés ? Cela se réfère-t-il à l'intérêt public ?
La justification ne saurait être l'exception écrite puisque c'est l'exception écrite qui est la conséquence du critère, et non l'inverse !
Que feront les juges saisis, par exemple, pour une courte citation de chanson ? Est-ce ou non un cas spécial ? S'agit-il ou non d'une exploitation normale ? Le préjudice est-il justifié ou injustifié ? Le tribunal de grande instance de Bayonne, celui de Paris et celui de Bordeaux feront-ils les mêmes interprétations ? N'y aura-t-il pas relaxe dans l'un et condamnation à une amende de 1 000 euros pour contrefaçon dans les deux autres ?
La prudence voudrait donc que nous ne fassions pas figurer dans la loi ce test aux contours impressionnistes, peu apte à clarifier ce qui est licite ou non, ce que nos débats ont, en revanche, bien arbitré, avec des exceptions choisies et bien définies, après avoir fait l'objet d'amendements.