Intervention de Renaud Donnedieu de Vabres

Réunion du 9 mai 2006 à 21h30
Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information — Article 7, amendement 17

Renaud Donnedieu de Vabres, ministre :

Tout d'abord, s'agissant du concept d'interopérabilité, je souligne, monsieur Retailleau, que ce qui importe, c'est de définir non pas un mécanisme optionnel mais une garantie. Le rapporteur l'a tout à l'heure parfaitement exprimé.

De la même manière, en définissant, en précurseurs, ce nouveau concept, nous formulons, sans arrogance aucune vis-à-vis de quiconque, un principe qui sera repris par l'ensemble des autres pays. Il ne s'agit pas de régler des comptes, il s'agit de définir une valeur opérationnelle à l'ère du numérique.

En ce qui concerne l'amendement n° 17 rectifié, j'émets un avis favorable. En effet, la rédaction proposée par la commission contribue à la clarification du texte en consacrant un certain nombre de dispositifs relatifs à l'interopérabilité.

En ce qui concerne les sous-amendements identiques n° 52 rectifié et 188 rectifié ter, j'émets un avis favorable puisque leurs auteurs ont opéré la substitution entre algorithme et méthode.

Sur le sous-amendement n° 115 rectifié, j'émets un avis défavorable.

Le sous-amendement n° 189 rectifié bis est satisfait par l'amendement n° 18 de la commission, qui prévoit que l'autorité de régulation pourra ordonner la délivrance des informations nécessaires à l'interopérabilité, complété par le sous-amendement n° 113 de M. Dufaut, auquel le Gouvernement est d'ores et déjà favorable. J'émets donc un avis défavorable sur le sous-amendement n° 189 rectifié bis.

Je suis également défavorable au sous-amendement n° 190 rectifié bis.

Sur les sous-amendements identiques nos°191 rectifié bis et 271, j'émets un avis défavorable. C'est en effet le mécanisme de la décompilation qui permet d'offrir une voie à la gratuité. L'accès aux informations essentielles qui font l'objet d'investissements doit répondre à des conditions équilibrées et non discriminatoires.

Le sous-amendement n° 277 rectifié bis est très important, car il permet de rappeler que ce projet de loi n'a pas pour objet de revenir sur le droit existant en matière de logiciels. L'exception de décompilation est le mode actuellement privilégié pour permettre aux auteurs de logiciels, en particulier de logiciels libres, d'accéder aux informations essentielles à l'interopérabilité. Elle présente, en effet, de nombreux avantages puisqu'elle ne nécessite ni autorisation, ni procédure de nature juridictionnelle, ni rémunération de l'auteur - ou compensation pour celui-ci - du logiciel ainsi décompilé.

Pour le ministre de la culture et de la communication que je suis, c'est une garantie que la technique n'a pas pour objectif de brider l'accès aux oeuvres ou d'enfermer le consommateur dans des modèles propriétaires. Au contraire, elle doit être un vecteur d'une circulation plus large des oeuvres, d'une relation la plus directe possible entre les créateurs et leur public et d'un développement de nouveaux modèles de distribution ou de diffusion des musiques et des films sur Internet.

J'émets donc un avis favorable sur ce sous-amendement n°277 rectifié bis.

Sur le sous-amendement n° 228, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.

En effet, je partage votre préoccupation, madame Catherine Morin-Desailly, mais la notion d'acte autorisé par la loi est trop large et, surtout, trop vague. Ce sont les mesures techniques qui permettent d'offrir aux consommateurs, en contrepartie d'un abonnement très modique, des possibilités d'écoutes illimitées d'un nombre considérable d'oeuvres. Elles favorisent ainsi une offre d'une très grande diversité, et des plus attractives, ce qui est très important. Il est urgent que ces nouvelles offres et ces nouveaux modèles apparaissent ; cela changera d'ailleurs complètement la perception du travail que vous êtes en train d'accomplir.

Je rappelle par ailleurs que seules sont protégées les mesures techniques portant sur une oeuvre protégée, point que nous reverrons dans un autre sous-amendement. Mesdames, messieurs les sénateurs, qui dit « mesures techniques » dit « oeuvres protégées ». S'il n'y a pas d'oeuvres protégées, il n'y a pas de mesures techniques. La mise en place de mesures techniques ne saurait donc entraver l'utilisation des oeuvres du domaine public.

En ce qui concerne le sous-amendement n° 229, qui est satisfait par le sous-amendement n° 277 rectifié bis, j'en demande le retrait.

Sur le sous-amendement n° 272 rectifié, j'émets un avis défavorable.

L'amendement de la commission, sous-amendé, répond à votre préoccupation d'un équilibre entre la sécurité des droits des créateurs et les intérêts des développeurs de logiciels libres. Rien dans la rédaction proposée n'interdit la publication du code source d'un logiciel indépendant. La lecture d'un DVD sous logiciel libre Linux ou sous tout autre système est parfaitement légale. Un code source doit être soumis aux mêmes règles que le logiciel correspondant. Il est notamment nécessaire d'éviter qu'un code source ne puisse contenir des indications telles qu'un commentaire facilitant une atteinte au droit d'auteur.

Voilà les principes positifs qui conduisent le Gouvernement à émettre un avis défavorable sur ce sous-amendement n° 272 rectifié.

En ce qui concerne le sous-amendement n° 278, le Gouvernement émet un avis défavorable.

De même, sur le sous-amendement n° 284 rectifié, l'avis du Gouvernement est défavorable. En effet, le projet de loi ne remet nullement en cause l'application des dispositions protectrices de la vie privée que vous avez adoptées en 2004, en modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. La surveillance des communications d'une personne à son insu est ainsi contraire à cette loi, il faut le rappeler pour éviter un certain nombre de peurs inutiles parmi nos concitoyens. Cette loi impose notamment dans son article 6 que les données soient « collectées et traitées de manière loyale et licite ».

Sur le sous-amendement n° 285, je rappelle qu'il n'y a aucune ambiguïté : seules sont protégées les mesures techniques portant sur une oeuvre elle-même protégée. J'émets donc un avis défavorable.

En revanche, pour ce qui concerne l'amendement n° 181, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée. Le contrôle visé par cet amendement est celui qui est assuré par la mesure technique elle-même. Ce type de contrôle permet précisément de garantir le respect des autorisations consenties en amont par les titulaires de droits.

Par ailleurs, le nouvel article 6 A introduit par l'Assemblée nationale impose au producteur d'obtenir le consentement des auteurs et artistes interprètes pour mettre en place une mesure technique. Il répond donc, monsieur le sénateur, à votre légitime préoccupation.

S'agissant de l'amendement n° 73, il me paraît nécessaire de garantir dans le cadre du présent projet de loi le principe de l'interopérabilité, c'est-à-dire, faut-il le rappeler, la liberté pour l'internaute de lire une oeuvre acquise légalement sur tout type de support.

J'en profite pour apporter une précision sémantique : une oeuvre acquise « légalement » ne l'est pas nécessairement « commercialement ». J'y insiste parce d'autres interprétations sont parfois données. Cette précision fait d'ailleurs l'objet de l'article 7 bis dans la rédaction résultant des amendements de votre rapporteur. De surcroît, un amendement n° 113 de M. Dufaut, auquel le Gouvernement est favorable et que nous examinerons ultérieurement, répond à cet objectif en articulant clairement les missions de l'autorité de régulation des mesures techniques de protection avec celles du Conseil de la concurrence. Ces deux organismes ne sont pas antagonistes, leurs interventions peuvent s'articuler, leurs vocations ne sont pas les mêmes.

L'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 73 est donc défavorable.

En ce qui concerne l'amendement n° 114, l'avis du Gouvernement est défavorable.

Sur l'amendement n° 116, l'avis du Gouvernement est également défavorable, tout simplement parce que le sous-amendement n° 277 rectifié bis répond déjà à votre préoccupation, madame la sénatrice.

En ce qui concerne l'amendement n° 117, l'avis du Gouvernement est défavorable.

Sur l'amendement n° 118, l'avis est également défavorable. Cet amendement souligne avec une grande perspicacité l'ambiguïté qui entoure la notion d'interopérabilité. Je me réjouis que nous nous rejoignions sur la nécessité de garantir cette interopérabilité, tout en précisant très clairement que cette garantie ne saurait servir de prétexte à porter atteinte aux droits des créateurs. L'amendement n° 18 de la commission répond de manière plus précise à cette préoccupation dont je suis heureux qu'elle soit partagée.

S'agissant de l'amendement n° 205 rectifié, l'avis du Gouvernement est défavorable pour des raisons que j'ai déjà indiquées, notamment le respect de la vie privée.

Concernant l'amendement n° 206, l'avis du Gouvernement est défavorable. Je rappelle une fois de plus qu'il n'y a aucune ambiguïté : seules sont protégées les mesures techniques portant sur une oeuvre protégée. La mise en place de mesures techniques ne saurait donc entraver l'utilisation des oeuvres du domaine public, qui est très souhaitable pour l'accès le plus large à la culture et à la connaissance.

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