Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 17 mai 2011 à 14h30
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Exception d'irrecevabilité

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

… et qu’elle inclut notamment les violences urbaines, en écartant les infractions financières et économiques ainsi que les trafics de stupéfiants, considérés par vous, monsieur le ministre, comme délits non sensibles et ne portant donc pas atteinte à la cohésion sociale.

Ajoutons à cela le problème des infractions connexes, pour lesquelles l’étude d’impact révèle que 1 500 affaires relevant de la compétence d’attribution du tribunal correctionnel avec citoyens assesseurs seront jugées par le tribunal correctionnel sans assesseurs, en fonction de l’existence d’infractions connexes, alors que le Conseil constitutionnel a déjà rappelé, à propos de la loi du 23 juillet 1975, que le principe d’égalité « fait obstacle à ce que des citoyens se trouvant dans des conditions semblables et poursuivis pour les mêmes infractions soient jugés par des juridictions composées selon des règles différentes ». Sans régler la question du statut du parquet, vous élargissez les possibilités, pour ce dernier, de choisir les juges !

Quant à l’expérimentation des tribunaux correctionnels citoyens dans au moins deux cours d’appels jusqu’en 2014, si vous la fondez sur l’article 37-1 de la Constitution, elle n’en est pas moins très contestable, car elle entraînera de facto une rupture d’égalité entre les justiciables : des personnes ayant commis à la même date la même infraction dans les ressorts de tribunaux différents ne seront pas jugées par la même catégorie de juridictions.

En ce qui concerne la justice des mineurs, pourquoi modifier pour la trente-cinquième fois l’ordonnance de février 1945, alors que le code pénal des mineurs est supposé être en préparation ? Dans ce domaine, monsieur le ministre, vous ne construisez pas, vous détruisez, au préjudice de nos plus grands principes !

Plusieurs points justifient pleinement le dépôt de notre motion, car le droit pénal des mineurs est strictement encadré constitutionnellement, avec la garantie de l’atténuation de la responsabilité pénale, la garantie de recherche du relèvement éducatif et la spécialisation des procédures et juridictions.

La convocation par officier de police judiciaire devant le tribunal pour enfants est une transposition de la mesure applicable aux majeurs que le Conseil constitutionnel, le 10 mars 2011, a censurée dans son application indifférenciée aux mineurs ; manifestement, votre projet de loi n’apporte pas de garanties suffisantes à cet égard.

Quant à la création du tribunal correctionnel des mineurs, cela constitue une brèche dans le principe de la spécialisation des juridictions. De plus, la composition de cette juridiction n’est pas conforme à ce principe, puisque le juge des enfants en sera le seul membre spécialisé. En fait, vous remplacez des assesseurs qui ne sont pas des magistrats professionnels, mais qui sont qualifiés eu égard à leur carrière et à leur expérience, par des citoyens assesseurs sans formation : c’est aberrant !

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