Il semble que le Président de la République, à la veille des élections régionales, ait lui-même marqué la fin de la parenthèse écologique de ce gouvernement et de la chasse aux voix écologistes, en annonçant, le 6 mars 2010, que l’environnement, « ça commence à bien faire » !
Dès lors, on assista à une sorte de déferlement de propositions rétrogrades, venant de toutes parts à droite, qu’il s’agisse des bancs du Parlement, de certains ministères ou de groupes de pression, dont le comportement a été excellemment décrit tout à l’heure par Évelyne Didier.
Cette mécanique implacable, je l’ai connue il y a plus de dix ans. Ces pressions, je les ai subies. J’ai choisi à l’époque de les rendre publiques, pour les désarmer. Ces pratiques perdurent, vous le savez, sous des formes diverses, et je le déplore.
En ce qui concerne le contenu même du texte, la trame verte et bleue, ou TVB, qui représentait l’un des engagements majeurs du Grenelle de l’environnement pour la défense de la biodiversité, devait permettre la préservation et la restauration d’un maillage d’espaces et de milieux vitaux pour la faune et la flore sauvages, contribuant à l’équilibre des territoires, au bénéfice de tous.
Or, la portée juridique de cet outil a été profondément affaiblie par la commission mixte paritaire qui s’est réunie le 16 juin. Cette dernière a, en effet, supprimé la disposition qui constituait l’un des engagements du Grenelle et prévoyait que les infrastructures linéaires de l’État devaient être compatibles avec le schéma régional de cohérence écologique, outil de mise en œuvre de la TVB dans les régions.
Cette mesure était indispensable à la mise en place cohérente de la trame verte et bleue sur l’ensemble du territoire. Avec cette obligation de compatibilité, la construction d’une ligne ferroviaire à grande vitesse ou d’une autoroute aurait dû respecter les continuités écologiques.
On peut choisir de rire des propos qu’a tenus tout à l’heure M. François Fortassin, qui a donné une illustration de cette méthode bien française visant à disqualifier, par des anecdotes pagnolesques d’une démagogie un peu décalée, le travail du ministère chargé de l’écologie. §Comme si c’était par inadvertance que l’on assèche les zones humides indispensables à la reproduction de nombreuses espèces d’oiseaux ou de poissons ! Comme si c’était par méconnaissance d’une réglementation trop tatillonne que l’on donnait l’autorisation de prélever des gravillons dans le lit des rivières ou d’y rejeter des fientes, des lisiers, des vinasses, des gravats ! L’écologie réduite aux bavardages de café, très peu pour moi !
La mise en place d’une certification « haute valeur environnementale », ou HVE, pour les exploitations agricoles est une autre mesure contestable. Cette certification répond à des objectifs louables en matière de réduction des intrants, mais elle pose deux problèmes majeurs, comme l’a fait remarquer à plusieurs reprises, lors de la première lecture, mon collègue Jacques Muller : d’une part, son coût reposera essentiellement sur les petites exploitations et sur les consommateurs ; d’autre part, l’instauration de cette nouvelle certification illustre l’absence de volonté concrète de faire basculer notre modèle agricole vers un modèle non productiviste, notamment à travers la filière biologique. Tous les amendements déposés par les Verts, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, pour soutenir la filière « bio » ont été refusés. Je pense, en particulier, à un amendement qui visait à autoriser les cultures dans la bande des cinq mètres sous réserve d’une certification à l’agriculture biologique. N’est-ce pas surréaliste alors que, à l’Assemblée nationale, le Gouvernement ne s’est pas opposé à l’idée que la certification HVE puisse être octroyée à des productions transgéniques ?…
Où est la cohérence ? D’un côté, vous vous targuez de mettre en place le plan Écophyto 2018, prévoyant la réduction de 50 % de l’usage des pesticides en France ; de l’autre, il sera désormais écrit dans la loi que le retrait d’un produit phytosanitaire ne sera possible qu’après une évaluation des impacts socioéconomiques et environnementaux de ce retrait.