Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette première année d'application effective de la loi organique relative aux lois de finances, nous pouvons constater avec satisfaction que l'effort global de l'État en faveur de l'outre-mer reste important, avec plus de 11 milliards d'euros de crédits, et assure une stabilité budgétaire par rapport à l'exercice précédent, comme l'ont souligné les orateurs qui m'ont précédé.
Compte tenu de son éloignement de la métropole, de ses spécificités et de ses difficultés structurelles, l'outre-mer mérite en effet, monsieur le ministre, toute notre attention et une expression affirmée de la solidarité nationale.
Nous pouvons également constater, mais avec regret cette fois, que les crédits de la mission « Outre-mer », placés sous la responsabilité du ministère de l'outre-mer, ne représentent, comme les années précédentes, qu'un faible pourcentage de l'effort de l'État, sans compter des modifications répétées du périmètre budgétaire qui rendent la lecture du projet de budget pour le moins ardue. On peut donc souhaiter que la montée en puissance de la mise en oeuvre de la LOLF permette de nettes améliorations à cet égard.
Les trois programmes couverts par cette mission -« Emploi outre-mer », « Conditions de vie outre-mer », « Intégration et valorisation de l'outre-mer », avec un effort tout particulier en faveur de l'emploi - répondent dans l'ensemble à notre attente, ce dont nous pouvons nous féliciter.
Toutefois, malgré des avancées en matière de coopération régionale, on peut regretter que l'effort financier ne soit pas plus important dans ce domaine, alors que c'est là un facteur essentiel de dynamisme économique, en vue du désenclavement des départements et collectivités d'outre-mer.
En raison du temps de parole particulièrement limité qui m'est accordé en tant que rapporteur pour avis de la commission des lois, je centrerai mon propos sur quelques aspects politiques de ce projet de budget.
Tout d'abord, les départements d'outre-mer ont fait les frais du vote négatif sur le projet de traité établissant une constitution pour l'Europe, qui comportait des dispositions avantageuses pour les régions ultrapériphériques.
Aussi est-il fondamental que le Gouvernement se montre persuasif à l'égard de nos partenaires de l'Union européenne, afin que les nouvelles dispositions qui seront arrêtées en la matière consacrent, et ce rapidement pour lever toutes les inquiétudes, les avancées qui étaient inscrites dans le texte constitutionnel.
Il est également indispensable, ainsi que l'ont souligné les précédents intervenants, qu'une politique de grande fermeté, assortie d'idées novatrices et de mesures d'accompagnement, soit conduite en matière d'organisation commune des marchés dans les secteurs du sucre et de la banane.
En outre, la question de la lutte contre l'immigration clandestine dans les départements d'outre-mer, tout particulièrement en Guyane, est très préoccupante. La Guadeloupe n'est pas non plus épargnée, notamment à cause de la porte ouverte à Saint-Martin, de même que la Martinique et, dans un autre contexte, la Réunion.
Enfin, nous attendons, monsieur le ministre, que des textes législatifs soient présentés pour que soit prise en compte la volonté exprimée par nos compatriotes de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin par rapport aux nouvelles dispositions de la Constitution.
Par ailleurs, Mayotte rencontre de sérieuses difficultés, par suite d'une pression démographique importante et d'une grave immigration clandestine. Certes, des efforts substantiels sont entrepris, et nous nous en réjouissons, mais l'urgence est grande et je ne saurais trop insister sur ce point, monsieur le ministre.
Saint-Pierre-et-Miquelon mérite toute l'attention du Gouvernement, non seulement en raison des difficultés économiques que cette collectivité rencontre à la suite de la réduction drastique des quotas de pêche de morue, mais également parce qu'il faut sauvegarder les intérêts de sa zone économique exclusive.
En effet, le Canada a décidé unilatéralement d'étendre sa zone économique exclusive, englobant ainsi la zone française et la privant de toute communication avec les eaux internationales. La France ne peut rester inerte devant cette situation, même si les Canadiens sont nos amis. Nous devons veiller sur nos intérêts et réagir fermement, d'autant que la zone en question est pétrolifère.
En outre, une utilisation optimale des importantes infrastructures réalisées à l'aéroport de Saint-Pierre serait plus que souhaitable, à la fois pour désenclaver l'archipel et pour rentabiliser l'investissement. Or, actuellement, seuls un ATR 42 et un Cessna de neuf places sont autorisés à atterrir, ce qui est pour le moins curieux ! Il s'agit là d'un véritable gâchis financier, monsieur le ministre.
En ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie, elle doit voir son avenir garanti, comme prévu par les accords de Bercy, avant le 31 décembre de cette année. M. le rapporteur spécial a abordé ce point, ce qui me permettra d'être bref.
Toutefois, je ne saurais trop insister sur l'importance de ce dossier. En effet, le projet d'usine de traitement du nickel dans le nord doit être lancé dans les délais. Tout doit être fait, monsieur le ministre, pour que cette échéance capitale soit respectée et pour que l'engagement pris à l'égard des Calédoniens soit honoré. Voilà plus de trente ans que l'on promet la réalisation de cette usine, il est donc temps de la construire. Cela est vital pour l'avenir économique, social et institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.
La Polynésie française a retrouvé une période de calme et nous ne pouvons que nous en réjouir.
Il importe, toutefois, de conforter désormais le développement économique de cette collectivité si nous voulons maintenir cette situation.
La situation de Wallis-et-Futuna s'est heureusement apaisée, mais reste préoccupante. Elle démontre qu'une adaptation de son statut, dans le cadre des nouvelles dispositions constitutionnelles, est nécessaire. Aussi, convient-il de s'y employer dès maintenant avec tact, certes, mais détermination.
Enfin, monsieur le ministre, les Terres australes et antarctiques françaises, les TAFF, se développent harmonieusement, ce qu'a pu constater le groupe d'études parlementaire que j'ai l'honneur de présider.
Il serait utile, pour conforter cette collectivité d'outre-mer que les îles éparses, actuellement gérées ad personam par le préfet administrateur supérieur des Terres australes et antarctiques françaises, puissent y être incorporées officiellement. N'oublions pas que les TAFF, avec ces îles éparses, représentent une zone économique exclusive de 2.500 000 kilomètres carrés.
Il serait également souhaitable, monsieur le ministre, que l'État compense la perte financière annuelle de 900.000 euros qu'a fait subir aux TAFF la création du pavillon maritime français en vidant de sa substance le pavillon des Kerguelen.
Après ce rapide survol de la situation des départements et collectivités d'outre-mer, et sous le bénéfice de ces observations, j'indique que la commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».