...de mieux structurer l'évaluation et la notation de l'aide projet et de ne pas céder, sur le terrain, à la tentation de faire des promesses que nous ne pourrons pas tenir.
Or, mes chers collègues, selon les documents qui nous sont fournis, nous affichons sept à neuf priorités sectorielles. Cela fait évidemment perdre son sens au terme « priorité » : en effet, lorsque tout est prioritaire, plus rien ne l'est ! La technocratie interministérielle doit se traduire sur le terrain : dans chaque pays, notre ambassadeur doit connaître tout ce que finance la France en matière d'aide au développement et de coopération en général, toutes missions et tous établissements publics confondus. La moindre initiative financière d'un autre ministère que le Quai d'Orsay ou d'un établissement public doit recueillir l'avis préalable de l'ambassadeur et même, si c'est possible, son accord. Vos services, madame le ministre, nous ont annoncé qu'une circulaire était en préparation : pourrez-vous nous le confirmer ?
La réforme se traduit aussi par la consécration de l'AFD, l'Agence française de développement, qui est généralement efficace, voire très efficace, et dont les ressources budgétaires ont un effet de levier. Mais le Quai d'Orsay aura-t-il enfin les moyens de jouer le rôle de chef de file de l'agence qui lui a été assigné, à sa demande ? Où en est le contrat d'objectifs avec l'AFD ? Comment la tutelle sera-t-elle rénovée ?
L'une des principales caractéristiques de l'aide française en 2006 réside dans la forte augmentation de 21 % du canal multilatéral, alors que l'aide bilatérale, après avoir augmenté en 2005, diminuerait de 6 %. Cette évolution contrastée est la conséquence de notre importante contribution au FED pour cette année. À cet égard, madame le ministre, je vous demande de bien vouloir remercier de ma part Mme Colonna, qui m'a fait porter ce matin une lettre dans laquelle figure, enfin, le détail précis des décaissements du FED et des restes à financer. La contribution au FED est d'ailleurs probablement sous-évaluée, même si elle représente plus du tiers de l'aide du ministère des affaires étrangères. Cette évolution contrastée est également due au relèvement des dotations au Fonds de lutte contre le sida et aux contributions obligatoires et volontaires aux organismes multilatéraux.
Je répète, malheureusement, ce que je dis depuis longtemps : notre importante contribution à l'aide multilatérale n'est acceptable que si elle est visible sur le terrain, et non noyée dans des fonds internationaux gérés, souvent, en anglais, par des Américains ; elle n'est, en outre, acceptable que si nous sommes réellement actifs dans les débats, si l'effectif de nos concitoyens présents dans les institutions internationales est à la hauteur de notre contribution - je pense, en particulier, à la Banque mondiale, où il nous manque du monde - et si l'action financée est réellement conforme à nos objectifs affichés et exposés dans le projet annuel de performance. Quant aux contributions volontaires, elles doublent en 2006 : à quels organismes seront-elles affectées et quels moyens mettrons-nous en oeuvre pour être sûrs que les actions engagées par ce biais sont conformes à nos objectifs ?
La diminution de l'aide bilatérale ne devrait pas, en principe, s'effectuer au détriment des subventions aux projets du FSP, le Fonds de solidarité prioritaire, et de l'AFD. Elle est essentiellement liée à la baisse de la coopération technique et, surtout, aux allégements de dette, qui représentent cependant encore le quart de notre aide. Mes chers collègues, je n'insiste pas sur les incertitudes qui pèsent à propos de l'efficacité de ces annulations, mais je constate que celles qui ont été accordées à l'Irak et au Nigeria représenteront, à elles seules, un montant énorme en 2006, soit 1, 6 milliard d'euros, c'est-à-dire deux fois plus que le montant consacré à la coopération technique du ministère des affaires étrangères et les crédits d'aide projet du FSP.
La lisibilité des annulations de dette a été améliorée après les demandes répétées du Parlement, notamment du Sénat. Mais il n'est pas acceptable qu'une seule ligne du DPT soit consacrée aux annulations portées par la COFACE, la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur, alors que celles-ci représenteraient, en 2006, 1, 4 milliard d'euros d'APD.
Ce constat conduira d'ailleurs les rapporteurs spéciaux de la commission des finances compétents en la matière à procéder, l'année prochaine, à un contrôle sur pièces et sur place auprès de la COFACE.