Intervention de Philippe Madrelle

Réunion du 7 décembre 2005 à 22h30
Loi de finances pour 2006 — Compte de concours financiers : accords monétaires internationaux

Photo de Philippe MadrellePhilippe Madrelle :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget 2006 ne restera pas dans les annales en ce qui concerne l'aide publique au développement. Les rapporteurs, notamment mon collègue et ami Michel Charasse, ont déjà exprimé les caractéristiques principales de ce budget peu enthousiasmant.

On ne peut, en effet, que regretter la dispersion et la diminution des crédits de l'aide publique au développement, qui risquent de marquer ou d'accentuer le recul de l'influence française dans le monde.

Dans le peu de temps qui m'est imparti, je voudrais attirer rapidement votre attention sur les crédits alloués pour l'appui à la coopération décentralisée, qui s'élèvent à 11, 5 millions d'euros, dont 2 millions d'euros au titre de la dernière tranche des contrats de plan État-région.

Cela reste vraiment très perfectible, pour employer un euphémisme ! Surtout si on prend en compte le fait que l'effort d'aide publique au développement des collectivités territoriales représentera 57 millions d'euros en 2006, soit 0, 7 % de l'effort global. De plus, il ne faudrait pas que, dans ce domaine également, l'État se décharge de ses devoirs et de ses engagements sur les collectivités locales pour combler, en termes d'affichage politique, sa défaillance en matière d'aide internationale.

J'ai la faiblesse de penser que les projets de coopération décentralisée conduits par les collectivités territoriales françaises représentent un vecteur important de démocratie, de développement durable et de solidarité. C'est aussi donner un sens à la vie. Cette coopération constitue un apport considérable au rayonnement de notre pays, d'autant plus important, d'ailleurs, que les crédits d'aide au développement sont en diminution.

Ne pensez-vous pas, madame la ministre, qu'il en va de la responsabilité de l'État d'accepter une plus forte implication financière en matière d'aide au développement et de solidarité internationale ?

Je prône l'addition de nos efforts - collectivités et État -, et non leur soustraction. À ce sujet, je voudrais rappeler l'importance du texte de notre collègue Michel Thiollière, adopté à l'unanimité le 27 octobre dernier. En donnant une base juridique aux actions d'aide au développement menées par les collectivités, ce texte sécurise l'action extérieure des collectivités locales et vient compléter la loi du 6 février 1992. Depuis sa création, au moment de la première loi de décentralisation de Gaston Defferre, la coopération décentralisée n'a cessé de se développer en qualité et en quantité.

La politique de coopération décentralisée doit aussi être reconnue comme une dimension importante de la politique européenne de développement. Actuellement, l'apport des collectivités locales est largement méconnu au sein des institutions européennes. L'Union européenne doit assumer et prendre en compte l'évolution des pratiques et la diversité des acteurs de la solidarité internationale. Elle doit veiller à ce que le dialogue et la concertation soient la règle entre les institutions communautaires et nos collectivités locales actives dans la coopération décentralisée. Saluons l'initiative récente du comité des régions qui a fait des recommandations fort pertinentes destinées à une meilleure intégration dans la politique européenne de l'apport des collectivités territoriales en matière de démocratie et de développement. Le Gouvernement doit faire en sorte que les propositions soient entendues par la Commission.

Les déséquilibres et les inégalités entre pays riches et pays moins favorisés exigent des efforts dans le cadre d'une coopération solidaire, soutenue et respectueuse de nos cultures et représentations différentes.

C'est ainsi qu'au conseil général de la Gironde, nous nous efforçons de mener cette politique de coopération décentralisée, en relation avec nos ambassades, en faveur du développement local, qui sert aussi bien nos amis du Burkina-Faso, de la Pologne, de l'Algérie que nos concitoyens, lesquels prennent ainsi conscience de l'interdépendance de nos populations. Cette participation au combat contre les inégalités est l'un des enjeux majeurs de ce début du XXIe siècle.

Enfin, à titre d'exemple, je souhaiterais attirer votre attention sur un point précis concernant l'échange de fonctionnaires. Il s'agit d'une difficulté que l'on peut attribuer à cette frilosité française bien connue quant à la mobilité. C'est ainsi que le séjour à l'étranger d'un fonctionnaire dans le cadre d'une mission précise est très souvent perçu comme une période entre parenthèses, voire comme du tourisme déguisé, et, à ce titre, nullement pris en compte pour l'avancement de l'agent. Cette non-reconnaissance de l'expérience acquise à l'étranger dans un plan de carrière ne devrait plus constituer un handicap pour les fonctionnaires français.

Je regrette, une fois de plus, le dangereux décalage entre les discours et la triste réalité des chiffres. C'est pourquoi le groupe socialiste ne votera pas les crédits de la mission « l'Aide publique au développement ».

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