Monsieur le sénateur, toute notre action est empreinte de pragmatisme. Rien ne serait pire que d'en appeler à l'idéologie et au dogme alors même que nous savons bien que nous avons chaque fois à faire face à des problèmes spécifiques et que les situations en zone rurale ne sont pas les mêmes selon qu'il s'agit de secteurs périurbains ou de secteurs purement ruraux. C'est tout l'enjeu du travail que nous accomplissons ensemble.
Pour ce qui concerne l'état de la réglementation en matière de transports de fonds, vous exprimez vos préoccupations à propos des conséquences de l'application du décret du 29 mars 2004 sur l'activité des petites agences bancaires situées en zone rurale.
Ce décret élargit la possibilité de recourir aux véhicules banalisés pour le transport de valeurs. Il est donc sans incidence sur le maintien ou la fermeture d'établissements bancaires.
Ce décret a fait l'objet d'une intense concertation. La réglementation en vigueur résulte de compromis très difficiles à obtenir, mais notre démarche est tout entière inspirée du pragmatisme dont je parlais à l'instant, parce qu'il est absolument indispensable que, dans ce domaine, chacun puisse trouver des éléments de consensus. Or il y avait beaucoup de monde autour de la table : les syndicats de transporteurs de fonds, les employeurs, les donneurs d'ordre et les représentants du ministère de l'intérieur.
Je vous le dis tout net, il n'est pas facile de proposer aujourd'hui de revenir sur un accord consensuel et, encore une fois, empreint de pragmatisme.
Il faut bien avoir à l'esprit que les règles applicables aux transports de fonds par les salariés des donneurs d'ordre n'ont été modifiées ni par la loi de mars 2003 ni par le décret de 2004.
L'interdiction du transport de fonds par des employés des établissements bancaires relève de principes posés par un décret antérieur, datant du 28 avril 2000. Ce n'est donc pas une nouveauté pour les établissements bancaires, qui se sont déjà adaptés à cette contrainte.
Pour ce qui est des installations de sécurité nécessaires à l'accueil des transporteurs de fonds, là encore, la palette de solutions proposée par le décret de décembre 2000 est large.
Le sas isolé n'est pas l'unique dispositif autorisé. Des trappons permettant l'accostage latéral ou l'accolement du véhicule sont autorisés. En outre, si ces installations ne peuvent pas être réalisées, d'autres dispositifs plus souples peuvent être combinés : le coffre ou le guichet sécurisé, le système de vidéosurveillance, le système d'alarme.
Là encore, le décret de mars 2004 n'a rien changé à la réglementation existante. Par conséquent, même si certaines banques justifient par cet argument leurs décisions de fermeture, je ne suis pas dupe : la loi pour la sécurité intérieure et ce décret d'application ne sont pas la cause des fermetures d'agences.
Les clients sont néanmoins en droit de se demander si tout cela n'obéit pas plutôt à une logique de rentabilité : c'est un sujet plus vaste qui concerne l'attractivité de nos territoires.
Comme tous nos concitoyens, vous avez encore en mémoire la trop longue liste des attaques menées contre les convoyeurs de fonds, notamment entre 1998 et 2002, et vous vous rappelez les vastes mouvements de protestation des transporteurs qui en ont résulté.
Au cours de cette période, trente-sept convoyeurs de fonds ont été blessés et douze ont payé de leur vie l'exercice d'un métier périlleux. Pour éviter la répétition de ces agressions aux conséquences tragiques, nous devons nous montrer intransigeants sur l'application des règles de sécurité : il n'est pas question de nous contenter d'une « sécurité au rabais ».
Enfin, monsieur le sénateur, puisque vous avez évoqué les fermetures de services publics en milieu rural, je tiens à revenir sur le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.
Le Gouvernement avait donné un avis très favorable à un amendement du Sénat visant à améliorer la concertation et à donner aux préfets de nouveaux pouvoirs pour « initier toute action visant à garantir que l'offre d'accès aux services publics est adaptée aux caractéristiques des territoires, concourt à leur attractivité et au maintien de leurs équilibres ». C'est sur cela que nous allons nous appuyer pour faire en sorte que l'attractivité des services publics en zone rurale soit désormais une priorité absolue. Dans ce domaine, nous aurons grand besoin de la représentation parlementaire qui, sur le terrain, joue un rôle précieux, et je sais que c'est particulièrement vrai dans votre cas, monsieur le sénateur.