...tandis que les économistes de la santé doutent de sa pertinence et critiquent tant l'analyse des difficultés que les remèdes choisis.
Mais surtout, les Français redoutent que ce gouvernement ne soutienne le pilier de notre pacte social dont il s'agit ici comme la corde soutient le pendu. Au vu des mines réjouies et gourmandes des dirigeants des systèmes d'assurance privée et des responsables de l'industrie pharmaceutique, on ne peut s'empêcher de partager ce sentiment...
Cela étant, nous sommes ici avant tout pour faire oeuvre de raison. Or force est de constater que lorsque l'on s'éloigne du sentiment pour interroger les faits, ceux-ci confirment les appréhensions et redoublent les craintes.
Que penser, en effet, d'un projet de loi conçu selon une logique purement comptable, qui met en scène le déficit de façon dramatique sans en analyser les causes ? Que dire d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui ne s'appuie sur aucun objectif en matière de politique de santé publique, ne trace aucune perspective pour l'avenir, n'établit même pas de solution de financement pérenne ? Que comprendre d'un texte qui, plutôt que de répondre à des problèmes, préfère désigner des coupables ? Nul n'ignore à quel point le choix d'un bouc émissaire permet de faire l'économie des vraies réformes de structure. Puisque le lobby de l'industrie pharmaceutique et des praticiens est puissant, on a choisi de stigmatiser les assurés sociaux.
A défaut d'être juste, le choix est habile. Nous sommes tous des assurés sociaux, mais, tout le monde le sait, celui qui triche, c'est toujours l'autre. C'est toujours à cause de l'autre que l'on est moins bien remboursé, que le régime va mal... Si ce n'est pas là une manière de casser la solidarité, cela y ressemble fort.
Cependant, nous ne doutons pas que des solutions de remplacement existent : les assurances privées sont là pour prendre le relais et substituer à la protection collective et à la justice sociale la couverture individuelle et l'intérêt personnel.
Monsieur le ministre, la présentation aux représentants du peuple d'un projet injuste socialement, inefficace financièrement et inadapté au regard des enjeux pourrait susciter l'ironie. Malheureusement, la considération que nous avons pour vos capacités, loin de nous conduire à penser que vous n'êtes pas à la hauteur de la situation, nous convainc de vos mauvaises intentions.