Intervention de Guy Fischer

Réunion du 16 novembre 2004 à 21h45
Financement de la sécurité sociale pour 2005 — Article 3

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Cet article est important, car il fixe le montant de la contribution apportée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, au financement du volet médico-social de l'ONDAM.

M. Alain Vasselle, dans son rapport écrit, indique que le présent projet de loi prévoit l'affectation d'une somme « au financement, par les régimes obligatoires de base de l'assurance maladie, des établissements [...] », et qu'il s'agit d'une contribution de la caisse au financement de l'ONDAM médico-social. Il ajoute ceci : « On pourrait en conclure la substitution des crédits de la CNSA à ceux de l'assurance maladie, concrétisant un désengagement de cette dernière du secteur médico-social. En l'absence d'informations fiables sur la répartition finale de l'ONDAM, votre commission ne peut trancher. »

Je profite de l'examen de l'article 3, qui permet le versement d'une participation de la CNSA au financement des régimes obligatoires de base de l'assurance maladie, pour réitérer ma demande de clarification, s'agissant notamment des dépenses relevant de l'assurance maladie au titre des soins concernant les personnes âgées, les personnes handicapées et celles qui sont couvertes par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie au titre de la prise en charge de la perte d'autonomie.

Cette question maintes fois abordée à l'occasion de textes ayant trait respectivement à l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, à la réforme de l'assurance maladie et, plus récemment, lors de l'examen en première lecture à l'Assemblée nationale du présent projet de loi, continue de nous préoccuper.

Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à nous interroger sur les responsabilités respectives de la CNSA, de l'assurance maladie et des collectivités territoriales, en l'occurrence le conseil général, ou à craindre que la création de ladite caisse, improprement dénommée, celle-ci ne s'inscrivant pas dans le champ de la sécurité sociale, ne permette pas véritablement d'améliorer la prise en charge de la perte d'autonomie mais cache un désengagement de l'assurance maladie à l'égard des personnes âgées et des personnes handicapées.

Nos collègues du palais Bourbon ont profité du PLFSS pour tenter d'obtenir du Gouvernement un certain nombre de garanties. Yves Bur, rapporteur pour avis, a défendu un amendement définissant pour 2005 la nature des dépenses afférentes à la section des personnes âgées et à la section des personnes handicapées, répondant ainsi, mais en partie seulement, à notre exigence de voir les soins aux personnes en perte d'autonomie, quel que soit leur âge, rester du ressort de l'assurance maladie.

Il reste, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous n'avez pas donné votre accord à une autre proposition de nature à lever toute ambiguïté sur les compétences respectives de la CNSA et de l'assurance maladie. Je fais référence à l'amendement précisant que, dans les établissements médico-sociaux accueillant des personnes âgées ou handicapées, la rémunération des professionnels inscrits au code de la santé publique et de leurs collaborateurs, les matériels et les traitements prescrits sont financés par les régimes obligatoires de l'assurance maladie.

Cette proposition de financement par l'ONDAM de tous les métiers de la santé que les sénateurs communistes ont portée cet été lors du débat sur l'assurance maladie, comme d'autres parlementaires d'ailleurs, est toujours d'actualité, selon la fédération hospitalière de France.

Vous me direz, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'entre-temps le Sénat a examiné en deuxième lecture le projet de loi sur le handicap. Outre le fait que le Gouvernement en a effectivement profité pour déposer une série d'amendements restrictifs sur la question de l'accessibilité des transports et des lieux publics ou sur les délégations possibles de soins, notamment, fâchant ainsi les associations et les infirmières, il a également saisi cette occasion pour mettre en place le dispositif institutionnel de la CNSA au mépris de l'engagement pris d'une seconde loi et de l'avis négatif des organismes de sécurité sociale.

Certes, le principe d'universalité de l'assurance maladie a été confirmé. Pour autant, aucune garantie réelle n'a été posée contre de futurs transferts de financements. La frontière entre ce qui relève du domaine de la santé et ce qui relève du domaine social reste à définir.

Si nous continuons à voter l'ONDAM médico-social, ces crédits seront transférés à la CNSA, qui les répartira en fonction des programmes interdépartementaux de prise en charge des handicaps et de la perte d'autonomie. Non seulement ce dispositif est d'une complexité redoutable, comme vous l'avez noté, monsieur le rapporteur, mais, de surcroît, il augmente les risques d'un démantèlement de la sécurité sociale.

Quelle est la légitimité de la CNSA pour gérer l'essentiel de l'ONDAM médico-social, une fraction de l'ONDAM sanitaire pour les unités de séjour de longue durée et la contribution de 0, 3 % au titre de la journée de solidarité ? De quels moyens disposerons-nous pour vérifier l'affectation de ce nouveau prélèvement aux établissements médico-sociaux ?

Des voix s'élèvent déjà aujourd'hui pour tenter de savoir pourquoi le prélèvement de 40 % sur la contribution de 0, 3 % provenant du jour férié et affectée à la médicalisation des établissements médico-sociaux a été réduite de moitié.

Dans ces conditions, vous comprendrez, mes chers collègues, qu'il nous soit impossible de nous contenter de la réponse faite par d'aucuns aux critiques formulées.

Le fait que, cette année, la CNSA apporte 480 millions d'euros à l'ONDAM médico-social ne saurait suffire en soi. Pour nous, ce résultat seul ne compte pas.

En tout état de cause, cette mobilisation de moyens supplémentaires sans commune mesure avec les chiffres annoncés par le Premier ministre au lendemain de la canicule -850 millions d'euros par an - ne peut justifier les moyens utilisés pour y parvenir.

Nous continuons de regretter vivement que ce gouvernement, par ses choix, qu'il s'agisse du mode de financement retenu - le jour férié - ou de l'architecture institutionnelle privilégiée - une agence - se soit interdit la seule réponse à hauteur des besoins des personnes en situation de handicap, à savoir l'intégration de ce risque nouveau qu'est la perte d'autonomie dans le champ de la sécurité sociale.

Monsieur le président, veuillez m'excuser d'avoir été un peu long, mais la complexité et l'importance des questions soulevées le justifiait.

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