Il convient également de faire en sorte que l'État puisse, de la même manière, tester sur une partie de territoire un dispositif nouveau avant de passer directement à la règle générale. Cela évitera de constater, trois ans plus tard, que ce n'est pas ce qu'il fallait faire.
L'État, pour être garant de la solidarité, n'a pas à définir dans le moindre détail des règles qu'il imposera aux différents acteurs, à commencer par les collectivités locales. Au contraire, il doit leur fixer un cadre clair leur permettant d'exercer leurs responsabilités et d'adapter leurs politiques à des réalités différentes.
C'est déjà ce que l'on commence à constater ! Lorsque l'on discute avec les présidents de conseils généraux, ils nous expliquent les difficultés auxquelles ils sont confrontés selon leur territoire, leur population et les différents acteurs économiques. Ils nous exposent les premières démarches qu'ils ont réussi à entreprendre pour y répondre et nous montrent ensuite les obstacles devant lesquels ils se trouvent lorsque, pour modifier la situation, quelquefois pour quelques centaines de personnes dans un canton, il faut réformer la loi générale.
Les collectivités territoriales, qui sont devenues les acteurs-clés de la solidarité, seront les « coconceptrices » de la réforme que nous allons engager. Elles le seront d'abord, et dès maintenant, par leurs programmes expérimentaux. Elles le seront ensuite, et tout au long de l'année, parce que nous les associerons, dans un partenariat étroit, à la conception de l'étape suivante : la généralisation.
La troisième ligne directrice est celle de la réciprocité des droits et des devoirs. C'est une notion à laquelle je suis particulièrement attaché, à condition que cette clause de réciprocité ne pèse pas seulement sur les plus faibles, ne soit pas déséquilibrée, mais engage l'ensemble des acteurs, y compris l'État, les employeurs et les personnes en difficulté.
Les droits et les devoirs de l'État, les droits et les devoirs des collectivités territoriales, les droits et les devoirs face au service public, les droits et les devoirs des acteurs économiques, les droits et les devoirs des citoyens, c'est le fondement de la vie en société, le fondement réel de la cohésion sociale et de la cohésion économique.
J'ai appris d'années de militantisme dans un mouvement associatif, qui m'est cher à jamais, le mot « estime », cette manière de redonner de la valeur aux personnes, celles qui sont dévalorisées parce que l'on considère qu'elles n'ont pas leur place dans la société. La plus belle marque d'estime vis-à-vis des personnes les plus en difficultés, c'est de pouvoir à la fois faire preuve de solidarité et d'avoir des exigences adaptées à leurs capacités. Élever le niveau d'exigence au moment même où on les aide à acquérir de nouvelles capacités, c'est ce que nous allons essayer de mettre en oeuvre.