Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 25 juillet 2007 à 15h00
Travail emploi et pouvoir d'achat — Discussion générale suite

Christine Lagarde, ministre :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai écouté très attentivement toutes vos interventions et je me suis abstenue de tout commentaire cynique sur celles qui m'ont parfois le plus surprise.

Je tiens tout d'abord à saluer le travail formidable effectué par les rapporteurs. Le brillant exposé de M. le rapporteur général m'aurait sans aucun doute convaincue - si je ne l'avais déjà été - du bien-fondé de ce texte, de l'efficacité de son dispositif et du fait que le Gouvernement a raison de croire en ses vertus.

Je vais bien entendu m'efforcer de convaincre ceux d'entre vous qui restent sceptiques, car je ne désespère jamais.

Monsieur le rapporteur général, vous avez comparé vos appels à ceux de Jean-Baptiste. Eh bien, je vous rassure d'emblée : vous avez été entendu. D'ailleurs, le Sénat tout entier a été entendu. Le Gouvernement s'est en effet inspiré des rapports successifs élaborés par vos différentes commissions dont il a emprunté certaines des recommandations et des prescriptions ; elles figurent dans le présent projet de loi. Soyez donc ici tous remerciés.

Je suis par ailleurs rassurée et heureuse de pouvoir compter sur le soutien sans faille de notre majorité. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur général, la majorité présidentielle a été reconduite à l'Assemblée nationale et j'ai plaisir à voir qu'au Sénat elle soutiendra sans faille le projet qui est soumis à sa sagacité.

Monsieur le président de la commission des finances, je partage dans une large mesure, et pour ma plus grande satisfaction, votre sentiment sur la plupart des points que vous avez évoqués, qu'il s'agisse de vos commentaires sur l'économie ouverte, de vos craintes sur les perspectives d'une éventuelle aggravation du déficit de la balance commerciale, de votre inquiétude, partagée par M. Mercier, que, sur les trois moteurs de la croissance, seule la consommation soit encouragée.

Je voudrais aussi vous rassurer, car ce projet de loi, me semble-t-il, est véritablement destiné à redonner de la compétitivité à nos entreprises, et de l'attractivité à la France.

L'exonération des cotisations sociales patronales, que j'aurai l'occasion d'expliquer le plus clairement possible - je m'y engage, monsieur Mercier - au moment de l'examen de l'article 1er et des différents amendements qui s'y rapportent, prendra la forme d'un abattement forfaitaire, selon que l'entreprise comptera plus ou moins de 20 salariés.

Cette mesure sera de nature à améliorer la compétitivité de nos entreprises, puisqu'il s'agit de réduire le coût des heures supplémentaires pour elles, mais sans mettre en cause le bénéfice qu'en tirent les salariés, bien au contraire !

De la même manière, la possibilité, pour les redevables de l'ISF, de s'acquitter de l'impôt, certes, mais sous la forme d'un « impôt choisi » - c'est une belle formule, monsieur le rapporteur général ! - aura aussi pour effet de fluidifier les mouvements de capitaux. Les petites et moyennes entreprises en ont bien besoin, comme certains d'entre vous l'ont dit de manière très claire, pour créer des emplois et participer aux efforts en matière de recherche et de développement.

Je vous rejoins tout à fait, monsieur le président de la commission des finances, à propos de la moralisation de la vie économique. En revanche, je ne vous rejoins pas lorsque vous émettez des doutes sur l'effet que produira l'article 7.

Peut-être ne sera-t-il pas suffisant pour entraîner un comportement moral chez tous les dirigeants, mais il participera, de toute évidence, à la réflexion actuellement engagée par la Commission européenne sur la nécessité de mieux réguler la rémunération des mandataires sociaux.

Par ailleurs, je suis favorable, comme vous, au développement des codes de bonne conduite en matière de gouvernance d'entreprise. Les exemples étrangers - je pense en particulier aux États-Unis, à l'Allemagne ou à la Grande-Bretagne - peuvent nous instruire utilement dans ce domaine. Je crois à l'efficacité des codes de bonne conduite, qui sont d'ailleurs prônés par un certain nombre d'entreprises ; ils ne sont pas du tout incompatibles avec les dispositions de l'article 7.

J'observe au passage que l'AMF, l'Autorité des marchés financiers, joue un rôle important dans ce domaine, en contrôlant l'application de ces codes dans son rapport annuel sur le gouvernement d'entreprise.

Je vous rejoins enfin, monsieur le rapporteur général, monsieur le président de la commission des finances, sur vos réticences concernant l'intermédiation, et je partage profondément votre goût pour l'affectio societatis et la nécessité de créer, de développer ou, tout simplement, d'améliorer le lien entre l'entreprise et l'investisseur que chacun peut devenir.

Quant au problème des niches fiscales que vous avez soulevé, il conviendra impérativement de l'évoquer dans le cadre du rapport sur l'impôt minimum, que nous soumettrons au Parlement avant le 15 octobre prochain. Par ailleurs, nous devrons également traiter ce problème dans le cadre d'une autre réforme qui figure dans ma lettre de mission, celle qui concernera l'ensemble des prélèvements obligatoires.

J'en viens maintenant à des réponses plus spécifiques sur différents points techniques, en m'excusant par avance de ne pouvoir tous les aborder. En effet, les amendements déposés sur les articles 1er et 6 sont si nombreux que je préfère m'en expliquer à l'occasion de leur examen.

En ce qui concerne l'articulation entre le crédit d'impôt au titre des intérêts d'emprunt et le prêt à taux zéro, je tiens à préciser que les deux dispositifs sont parfaitement complémentaires ; simplement, ils s'adressent à deux catégories de propriétaires.

Le prêt à taux zéro est destiné à faciliter l'accession à la propriété aux ménages à revenus modestes, tandis que le crédit d'impôt au titre des intérêts d'emprunt s'adresse à tous les publics, c'est-à-dire à tous les électeurs, à tous les électeurs de vos électeurs, mesdames, messieurs les sénateurs, sans aucune condition de ressources.

Certains d'entre vous ont affirmé que ces mesures concernaient plus spécifiquement les hauts revenus. Je le dis et le redis, 93 % du financement prévu bénéficieront à une très large majorité de contribuables, de salariés et d'héritiers, leur patrimoine fût-il modeste.

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