On peut se poser la question de savoir quel est le rapport entre le titre III et le développement de la participation et de l'actionnariat salarié. En effet, sous couvert de sécurisation des parcours professionnels, le titre III comporte des dispositions qui ne sont en fait que des mesures de régression sociale visant à flexibiliser encore plus le marché du travail, avec des outils nouveaux permettant de contourner le droit du travail en vigueur.
L'article 22 prévoit la légalisation du prêt de main-d'oeuvre à but lucratif dans les pôles de compétitivité. Un contrat est passé entre les employeurs, qui précise les caractéristiques de l'emploi « d'affectation », notamment les horaires, le lieu d'exécution, l'accès à la formation, le terme de la mise à disposition, les conditions d'exercice des droits à congé et les modalités de rupture anticipée par le salarié ou l'une ou l'autre des parties à la convention. On peut se demander si le salarié en CDI dans une entreprise ou le fonctionnaire devient, dans ce cas, soumis à un double lien de subordination.
La question du lieu d'exécution est importante. Selon que le contrat de travail du salarié contient ou non une clause de mobilité, selon que les lieux de travail sont ou non dans le même secteur géographique, on se trouve en présence d'un simple changement des conditions de travail relevant uniquement du pouvoir de direction de l'employeur ou d'une modification du contrat de travail. La jurisprudence de la Cour de cassation est abondante et variée sur ce point.
Les représentants du personnel continueront à bénéficier des protections légales, mais seront de facto empêchés d'exercer leur mandat dans leur entreprise, où ils ne seront plus présents. N'étant pas non plus élus dans l'entreprise d'accueil, ils n'y exerceront aucun mandat. La Cour de cassation a précisé, dans un arrêt rendu le 30 avril 1997, que les garanties légales dont bénéficient les salariés protégés s'opposent non seulement à toute modification de leur contrat de travail, mais aussi à tout changement de leurs conditions de travail, ce qui peut poser un problème dans le cas d'un changement du lieu de travail.
La garantie de retour du salarié dans son emploi d'origine ou dans un emploi équivalent avec les mêmes droits attachés à son contrat de travail initial et dans les mêmes conditions d'ancienneté n'est pas prévue.
Ce dispositif permet donc tout type d'arrangement et conduira à des abus préjudiciables pour les salariés, dont la situation sera fragilisée.
En fait, cet article contredit tout simplement la jurisprudence constante et la loi qui réprime jusqu'à présent le délit de marchandage, alors que le prêt de main-d'oeuvre est encadré strictement et réservé aux entreprises d'intérim.
Les dizaines de milliers de salariés qui travaillent dans les pôles de compétitivité pourront être concernés, quelle que soit leur fonction dans l'entreprise. Ce n'est pas admissible !