Intervention de Annie Jarraud-Vergnolle

Réunion du 9 novembre 2006 à 15h00
Participation et actionnariat salarié — Article 22

Photo de Annie Jarraud-VergnolleAnnie Jarraud-Vergnolle :

Ma collègue Gisèle Printz a exposé clairement un certain nombre de réserves sur l'article 22, que je partage : elles concernent les conditions générales de la mise à disposition de main-d'oeuvre, le contrat de travail, la protection des salariés mandatés dans la représentation du personnel et l'absence de retour dans l'entreprise, le cas échéant.

J'y ajouterai les remarques suivantes, un peu plus pragmatiques : cet article fait référence aux articles L. 125-1 et L. 125-3 du code du travail prohibant toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d'oeuvre lorsqu'elle n'est pas effectuée dans le cadre des dispositions relatives au travail temporaire. L'article L. 125-3 va même plus loin, en spécifiant qu'il n'y a plus à rechercher les conséquences à l'égard du salarié pour toute mise à disposition en dehors de l'intérim.

Or, dans le projet initial, qui excluait de cette mise à disposition les entreprises de travail temporaire, il semblait légitime de s'appuyer sur ces deux articles du code du travail pour bien différencier la mise à disposition. La réintégration dans ce cadre des entreprises de travail temporaire et des entreprises de temps partagé ouvre la porte à une dérégulation de la mise à disposition de personnel.

Les entreprises de travail temporaire qui, rappelons-le, bénéficient d'un fonds de garantie, sont les seules habilitées à la mise à disposition de personnel vers des tiers utilisateurs dans un but lucratif, dans un cadre social et fiscal très précis et bien défini : les salariés mis à disposition sont soumis aux mêmes mesures que les salariés des entreprises utilisatrices et bénéficient de primes de précarité et de congés payés. De ce fait, la facturation de la mise à disposition tient compte, d'une part, de l'ensemble de ces éléments et, d'autre part, d'une marge assez confortable.

Quel sera le mode de facturation des entreprises prêteuses dans le cadre des pôles de compétitivité ? La facture sera-t-elle établie à l'euro, c'est-à-dire sans but lucratif ? Sera-t-elle fiscalisée ? des différences de facturation ? Quels seront les liens financiers, notamment entre les deux entreprises cocontractantes ?

Et quel avantage le salarié peut-il attendre de cette mise à disposition, sachant que si elle était réalisée dans le cadre de l'intérim, il bénéficierait d'une prime supplémentaire de 10 % ?

On pouvait penser, madame le rapporteur, que le salarié en CDI mis à disposition conserverait, quoiqu'il arrive, son contrat à durée indéterminé - il s'agit du paragraphe II de l'article -, ce qui aurait pu constituer un avantage pour lui.

J'ai cru comprendre que la majorité, selon ses propres termes, souhaitait favoriser les transferts de savoir dans le cadre d'une mise à disposition de salariés en CDI. Or la proposition de Mme le rapporteur de supprimer les mots : « titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée » ouvre la porte à la création d'une nouvelle catégorie d'emplois précaires, qui s'ajoute à celles qui existent déjà.

En l'état actuel du texte, n'étant pas pris en compte dans le calcul des effectifs - sans que l'on sache d'ailleurs pourquoi -, le salarié mis à disposition se trouve intégré à une communauté de travail sans bénéficier des avantages dont elle jouit, notamment au regard du comité d'entreprise, de l'action sociale et culturelle. Il ne bénéficie donc pas d'une égalité de traitement

L'examen des amendements nous amènera sûrement à préciser et à confirmer ces réserves. Néanmoins, il est d'ores et déjà possible de penser qu'en somme cet article, comme le suivant, tend à se jouer discrètement des dispositions prévues par le droit du travail. Mais nous ne sommes pas dupes !

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