Tout à l'heure, j'ai émis des réserves sur l'article 22 du projet de loi. Sur l'article 23, je vous ferai part, mes chers collègues, d'une certaine méfiance.
Je ne comprends toujours pas en quoi l'article 23 relève de l'actionnariat salarié et encore moins en quoi il peut prétendre participer de la sécurisation du parcours professionnel ! Mais il est vrai que nous n'avons peut-être pas les mêmes valeurs concernant la sécurisation.
Outre le fait que l'article 23 est en contradiction avec celui qui le précède, il m'inspire un certain nombre de remarques.
L'obligation de congé de reclassement en cas de licenciement économique existe ; c'est un encadrement légal. Elle garantit au minimum des transitions équilibrées, en contraignant, certes, les entreprises qui licencient ou cherchent à délocaliser, afin de moraliser ces pratiques.
Les conditions générales du congé de mobilité n'apportent pas la moindre amélioration au dispositif de reclassement qui existe déjà. Elles ne sont qu'un assouplissement pur et simple de l'article L. 321-4-3 du code du travail.
Sous couvert d'accompagnement et de sécurisation, le congé de mobilité instaure une individualisation non encadrée du « dialogue » entre les instances de l'entreprise et le salarié, là où la concertation entre l'ensemble des partenaires doit s'appliquer. S'agit-il vraiment d'un dialogue ? Le salarié isolé dispose-t-il d'une quelconque marge de manoeuvre ? L'article 23 ne permet pas de répondre à ces questions.
Cet article fait l'impasse sur l'éventualité d'un rejet du congé de mobilité par le salarié, sur les alternatives à une telle proposition, sur une divergence de vue concernant les objectifs et sur un éventuel échec du dispositif. En somme, le congé de mobilité libère l'entreprise des contraintes légales qui ont vocation à prévenir les abus en matière de « dégraissage » salarial. Pour résumer, le congé de mobilité, c'est pratique !
Ce dispositif, qui n'offre aucune garantie de succès, de continuité et encore moins de retour au travail, fait supporter les risques au seul salarié, qui est tout bonnement invité à renoncer aux droits dont il dispose dans le cadre de son contrat de travail ou d'un licenciement. Encore une fois, c'est pratique !
Enfin, le statut intermédiaire du salarié placé en congé de mobilité, qui devient stagiaire de la formation professionnelle, permet à l'entreprise de se décharger sur la collectivité d'une charge financière qui lui incombe ! C'est également pratique !
Les amendements n° 68 rectifié et 69 nous renseignent, d'ailleurs, sur la légèreté du dispositif en termes d'anticipation des aspects contractuels et des éventuelles options alternatives.
Cet article ne favorise pas le dialogue social, il le supprime. Il ne sécurise pas le parcours professionnel, il le fragilise. Il ne peut donc qu'être rejeté.