Intervention de Gilbert Barbier

Réunion du 10 novembre 2009 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2010 — Discussion générale

Photo de Gilbert BarbierGilbert Barbier :

On m’objectera certainement le poids déjà excessif des prélèvements obligatoires et les contraintes de compétitivité de notre économie…

Il est clair que nous avons besoin d’une grande remise à plat des prélèvements sociaux. Asseoir essentiellement les recettes sur le fruit du travail ne correspond plus à la réalité. En attendant cette hypothétique réflexion, nos concitoyens doivent comprendre que le maintien d’un haut niveau de protection sociale a un prix, et qu’il n’est ni raisonnable ni décent de le laisser à la charge des générations futures.

Dans ces conditions, le choix est mince : soit l’on augmente les prélèvements, soit l’on réduit drastiquement les dépenses.

Pour ma part, et quitte à choquer, je pense qu’il faudrait avoir le courage de repenser certaines prestations, de remettre en cause des avantages catégoriels non justifiés, de faire la part des choses entre ce qui relève de l’assurance et ce qui relève de la solidarité. On ne peut laisser filer les dépenses au rythme où elles vont, que ce soit pour la branche maladie ou, plus encore, pour la branche vieillesse. Notre système de protection sociale a certainement joué un grand rôle d’amortisseur en ces temps de récession, qui plaide plus que jamais pour sa sauvegarde, mais la crise ne doit pas éluder la question de sa soutenabilité financière. Ne pas vouloir transgresser le postulat de 1945 relève d’une utopie coupable en 2010 !

L’excellent rapport de M. Dominique Leclerc pose bien le problème concernant les retraites, qu’il s’agisse du régime général ou des régimes spéciaux. Je partage ses analyses.

Concernant l’assurance maladie, la commission des affaires sociales a auditionné, comme chaque année, le directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie, la CNAM. Ce dernier nous a avoué son pessimisme d’une manière tout à fait directe. Son analyse est partagée par le Premier président de la Cour des comptes, qui nous a exposé, dans son style quelque peu abrupt, mais très réaliste, une situation que chacun connaît d’ailleurs.

On ne peut plus se contenter de demi-mesures en la matière. Il faut, bien entendu, poursuivre l’application de la politique de maîtrise médicalisée des dépenses d’assurance maladie engagée ces dernières années, développer le recours aux médicaments génériques, mettre en œuvre les référentiels de la Haute Autorité de santé, la HAS, mener des campagnes de mise sous accord préalable des médecins « surprescripteurs », diffuser les contrats d’amélioration des pratiques individuelles, renforcer le contrôle des indemnités journalières.

Tout cela est bien. Pour autant, on comprend bien, en lisant les prévisions annexées au PLFSS, que ce ne sera pas suffisant. Même en fixant un ONDAM rigoureux de 3 % par an jusqu’en 2013, ce qui impose de réaliser chaque année 2, 3 milliards d’euros d’économies nouvelles, le déficit de l’assurance maladie restera supérieur à 10 milliards d’euros.

Cela étant, il serait injuste de dire que, cette année, le Gouvernement baisse les bras. Il a pris des décisions courageuses dans ces moments difficiles, notamment l’augmentation du forfait hospitalier de 16 euros à 18 euros et la réduction à 15 % du taux de remboursement de certains médicaments dont le service médical rendu est faible. Sur ce dernier point, je me demande d’ailleurs pourquoi maintenir un remboursement si les médicaments concernés sont reconnus par la HAS comme inefficaces !

Ces mesures sont courageuses, certes, mais elles restent insuffisantes au regard du problème. Pourquoi ne pas aller plus loin, en proposant pour la période triennale à venir d’appliquer une franchise annuelle qui varierait en fonction du revenu des intéressés ?

Cette proposition est sans aucun doute provocatrice dans l’environnement économique et social actuel, mais certaines questions méritent d’être débattues. Pourquoi les assurés ne participeraient-ils pas, tant soit peu, aux frais de leur traitement à hauteur de leurs moyens financiers ? Peut-on, dans la situation actuelle de l’assurance maladie, continuer de servir les mêmes prestations à tous, aux plus vulnérables comme aux plus favorisés ? La prise en charge des petits risques doit-elle valoir pour tous ? Est-il logique que la solidarité nationale prenne en charge les soins et les arrêts de travail du lundi matin des accidentés du sport et des loisirs du dimanche ?

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