Le Gouvernement ne prouvera sa volonté de pérenniser une prise en charge solidaire que quand il acceptera de mener un débat de fond sur ce sujet avec les Français !
Il faut réorienter le financement de la protection sociale pour tenir compte de l’évolution d’un contexte qui, ne nous leurrons pas, amènera un accroissement des dépenses de santé étant donné le vieillissement de la population et le progrès des technologies médicales.
La réflexion doit être commune, car nous avons des idées et ne demandons qu’à les développer, comme nous le ferons au cours de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010. Nous devrions, notamment, tirer des conclusions pratiques du débat mené dans cette enceinte, il y a quelques jours, sur les prélèvements obligatoires : il y va de notre avenir et de celui de nos enfants, pour lesquels nous voulons garantir la stabilité et la pérennité de notre système social, même si nous avons bien conscience qu’il doit évoluer.
Refuser l’augmentation des prélèvements obligatoires sous prétexte que ce serait porter atteinte au pouvoir d’achat des Français relève de l’hypocrisie, quand il est demandé par ailleurs à nos compatriotes de débourser toujours plus pour se soigner ! Oui, c’est bien de l’hypocrisie, puisque vous n’hésitez pas à prélever des taxes à tire-larigot sur le tabac, le carburant, les assurances, les mutuelles, etc.
Les déficits sont reportés d’année en année sur la CADES, donc mis à la charge des générations futures. L’augmentation de la CRDS est devenue inévitable pour faire face solidairement à l’explosion de la dette sociale. Tous les spécialistes sont d’accord sur ce point, mais le Gouvernement s’entête à choisir une autre option : ce sera l’ACOSS qui, en relevant son plafond d’emprunt de 65 milliards d’euros, portera les nouvelles dettes. Alourdir la dette, tel est votre programme !
Si les difficultés étaient seulement conjoncturelles, comme vous le prétendez, ce serait compréhensible ; mais ce n’est pas le cas. La crise économique n’explique pas tout. Le déséquilibre de nos finances est ancien et structurel, et les perspectives, contrairement à ce que vous annoncez de façon irréaliste, pour ne pas dire utopiste, ne sont pas bonnes.
Ainsi, faute de faire les bons choix dans l’intérêt commun, le recul des acquis sociaux se poursuit : ceux qui le peuvent accroissent leur effort de capitalisation en vue de la retraite, et le transfert de la protection aux mutuelles et aux assurances en matière de santé s’accélère. C’est bien vers une privatisation que nous nous dirigeons !
D’année en année, les inégalités dans l’accès aux soins s’accentuent : aujourd’hui, plus de 30 % des Français ne se soignent plus ou retardent les soins, et bénéficier d’une mutuelle devient un luxe. Les fractures, sociale et territoriale, s’aggravent. C’est ainsi que 182 blocs opératoires ont été fermés, pour de prétendues raisons de sécurité : n’en doutons pas, il s’agissait plutôt d’une question de rentabilité !
Ainsi, la mise en œuvre d’une logique libérale affirmée précipite le détricotage de notre système sanitaire et social. Nous sommes bien loin de l’esprit du pacte social issu du programme du Conseil national de la Résistance, qui préconisait « un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se le procurer par le travail », et prévoyait « une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours ».
À ce propos, le rendez-vous de 2010 sur les retraites ne se présente pas sous les meilleurs auspices : aucun des engagements pris n’a été tenu, qu’il s’agisse de l’intégration de la pénibilité dans les critères d’évolution du dispositif ou de l’application de mesures visant à augmenter le taux d’emploi des seniors.
À la suite de ma collègue Christiane Demontès, je voudrais insister sur la situation des agriculteurs retraités. Encore une fois, tout comme leurs conjoints, ils sont les oubliés du projet de loi de financement de la sécurité sociale !