Il s’agit là d’un article important du projet de loi.
Je suis défavorable à l’amendement n° 151 rectifié, car, si l’on taxe le produit brut des jeux, il faut nécessairement lever la taxe dans le pays de l’opérateur. Il est bien évident que, si l’opérateur est installé dans un pays étranger, la perception de la taxe devient un peu compliquée. C’est pourquoi nous préférons taxer les mises engagées depuis la France.
Nous avons travaillé avec le Conseil d’État sur ce sujet et la solution retenue dans le projet de loi nous a semblé plus sûre, mais aussi plus conforme à la réalité.
J’ai étudié avec beaucoup d’attention l’amendement n° 24 présenté par M. Ambroise Dupont, au nom de la commission de la culture. Nous nous sommes également longuement demandé s’il fallait différencier la fiscalité de la filière hippique de celle du secteur sportif. La filière hippique risque-t-elle de souffrir de la concurrence exacerbée d’un nouveau secteur plus grand, plus large et de voir ses ressources se réduire ?
Nous avons considéré, au moins dans un premier temps – nous verrons ensuite comment les choses évoluent –, qu’il convenait dans ce texte de fixer un taux de prélèvement plus bas que celui qui est actuellement en vigueur. Nous avons donc ramené le taux applicable à la filière hippique de 9, 4 % à 7, 5 %. Ce niveau de fiscalité nous semble à même de favoriser l’offre légale de jeux en ligne, tout en restant acceptable.
Je souligne que la filière hippique gagnera tout de même beaucoup à ce changement de fiscalité, de l’ordre de 200 millions d’euros. Encore faut-il que la situation se stabilise dans le temps et qu’une concurrence exacerbée ou anormale ne s’exerce pas au détriment de l’une des deux filières.
Je ne pense pas que le taux de fiscalité soit la meilleure réponse, mais je ne prétends pas avoir la vérité révélée ! Je comprends et je partage votre préoccupation, qui est de sécuriser les ressources de cette filière importante en termes d’emplois et d’aménagement du territoire.
La filière hippique est fiscalisée à hauteur de 7, 5 %, auxquels il convient d’ajouter 0, 5 % de redevance au profit de la filière elle-même, soit un total de 8 % acquitté par le parieur.
Par contre, pour le sport, il faut ajouter au prélèvement de 7, 5 % celui de 1, 8 % au profit du Centre national pour le développement du sport.
Il faut aussi compter avec l’introduction du droit de propriété sur les événements sportifs. Cette notion, qui est loin d’être anodine, a d'ailleurs été contestée par certains, tandis que d’autres la trouvaient très intéressante. La Fédération française de tennis, qui organise le tournoi de Roland-Garros ou le Masters de Paris-Bercy, par exemple, a un droit de propriété sur ces événements, qu’elle peut vendre aux opérateurs de paris en ligne. Le même raisonnement vaut pour la Fédération française de football.
Et il ne faut pas oublier, non plus, le sponsoring.
L’accès aux paris sportifs coûte donc beaucoup d’argent et, au total, les niveaux sont à peu près équivalents entre paris hippiques et paris sportifs.
Nous avons également introduit la notion assez nouvelle de taux de retour aux joueurs. Vous remarquerez que ce taux a été assez judicieusement calculé par rapport à la fiscalité de la filière hippique. En tout cas, pour les paris hippiques comme pour les autres, il ne pourra pas dépasser 85 %. Comme vous le faisiez remarquer, les joueurs, surtout les gros joueurs, bien entendu, sont très sensibles à la moindre variation.
Dans la filière hippique, le TRJ de 85 % est bien respecté sur les paris simples ; il est inférieur sur les paris complexes, pour lesquels les joueurs sont plutôt sensibles au gros lot, au fait de gagner beaucoup d’argent. En matière de paris simples, les personnes sont souvent peu expertes et jouent uniquement pour se faire plaisir, le taux de retour est donc très important. Le taux de retour de 85 %, c’est celui que connaissent les jeux hippiques en développement.
En cumulant le droit de propriété sur les événements, le plafonnement du taux de retour aux joueurs à 85 %, le sponsoring et l’achat du droit de jouer sur tel ou tel événement, les deux filières sont selon moi très largement à égalité.
La filière sportive pourrait même parfois distribuer plus, et il arrive effectivement que ce soit le cas. Cela signifie que ses revenus vont augmenter, il sera donc plus intéressant pour un opérateur de développer des jeux en ligne sportifs que des jeux hippiques. En conséquence, l’hippisme aura moins de sites mais une plus grande visibilité. On peut en effet retourner l’argument : le PMU, et c’est une grande chance qu’il doit saisir, sera encore plus visible sur un marché dans lequel il possède une grande expertise. Et, en organisant des paris sportifs, il va également attirer des joueurs vers les paris hippiques.
Attendons de voir comment les choses évoluent et la clause de rendez-vous nous permettra notamment de vérifier – c’en sera même un élément majeur – que la filière hippique n’est pas perdante. Il ne s’agit nullement d’assécher une filière qui concerne beaucoup de monde un peu partout sur notre territoire.
En Allemagne comme en Italie, la mauvaise santé de la filière hippique n’est pas due à l’ouverture à la concurrence des jeux. L’Allemagne, qui ne les a pas ouverts, autorise à la fois les paris à cote fixe et les paris mutuels pour les jeux hippiques en dur, ce qui crée des interférences que nous n’avons pas. En Italie, les problèmes de la filière ne sont pas liés à des questions de fiscalité ou de jeux.
En tout cas, nous sommes très attentifs à ne pas fragiliser le secteur hippique. Mais, pour cela, il faut jouer l’ouverture, car le pire serait de ne rien faire. Nous avons ce débat pendant près de deux ans !
Par conséquent, monsieur le rapporteur pour avis, je suis très sensible à votre amendement, mais je pense que le système que nous avons élaboré est équilibré. Nous y reviendrons, s’il le faut, ultérieurement. Compte tenu de ces explications, vous comprendrez que le Gouvernement émette un avis défavorable sur cet amendement, à moins que vous ne le retiriez.
Les amendements n° 139, 78 et 79 visent à augmenter la fiscalité sur les jeux. Je n’y suis pas favorable… même si cela me fait mal, je vous l’avoue, en tant que ministre du budget, de refuser de faire entrer de l’argent dans les caisses de l’État !