Intervention de Jean-Paul Emorine

Réunion du 15 juin 2006 à 9h30
Politique énergétique de la france — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Jean-Paul EmorineJean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le débat sur l'énergie qui nous réunit aujourd'hui concerne de nombreux sujets qui sont à même de stimuler nos réflexions prospectives : le caractère stratégique essentiel de notre industrie nucléaire dans un contexte d'énergie chère, les conséquences du développement économique de pays « continents » tels que la Chine et l'Inde sur le marché des énergies fossiles, la perspective rapprochée du fameux « peak oil », à partir duquel la production mondiale de pétrole décroîtra, l'intérêt d'une politique volontariste d'économie d'énergie, les perspectives offertes par les recherches en matière de fusion nucléaire.

Cependant, je n'aborderai aucun de ces sujets qui intéressent pourtant en premier chef la commission des affaires économiques que j'ai l'honneur de présider. Je consacrerai mon intervention à une question politique qui se pose aujourd'hui avec une acuité marquée, à savoir le projet de fusion de deux de nos grands groupes énergétiques, Suez et Gaz de France.

L'appréciation de la valeur de ce projet impose, en premier lieu, de répondre à plusieurs interrogations cruciales. Ce projet présente-t-il un intérêt pour notre pays ? Est-il porteur de sens pour notre économie ? Préserve-t-il les droits sociaux des employés de ces entreprises ? Ces éventuelles modalités de mise en oeuvre ont-elles fait l'objet d'une concertation suffisante avec les partenaires sociaux ? Permet-il de garantir le maintien des obligations de service public auquel est actuellement assujetti Gaz de France ? Prend-il correctement en compte les intérêts des consommateurs ?

Des réponses positives me paraissent pouvoir être apportées à chacune de ces interrogations. Pour s'en convaincre, il suffit d'énoncer les faits et de formuler les conditions pouvant être réunies pour réaliser ce projet.

Tout d'abord, il faut le rappeler d'emblée, il s'agit d'un projet industriel commun à Suez et à Gaz de France, qui est porté par les présidents des deux entreprises. De plus, il est riche de perspectives prometteuses. Ainsi, le groupe qui serait constitué atteindrait la taille critique qui semble aujourd'hui indispensable dans un contexte européen et mondial en plein bouleversement. Il offrirait toute la gamme de services énergétiques et contribuerait à la sécurité des approvisionnements nationaux.

Premier producteur mondial de gaz liquéfié, le nouveau groupe contribuerait puissamment à réduire la dépendance énergétique de notre pays sur le plan gazier. Il offrirait ainsi à la France des marges de liberté supplémentaires au regard de ces importations par gazoducs, dont nous avons pu récemment constater, à l'occasion de la crise ukrainienne, les vulnérabilités politiques et économiques.

Ensuite, ce projet de rapprochement éviterait également l'éclatement du groupe Suez, qui résulterait inéluctablement de la réussite de l'OPA envisagée par ENEL. Le groupe italien a essentiellement pour objectif la filiale belge Electrabel de Suez. Il n'a pas fait mystère, dans un premier temps, de sa volonté de vendre le reste du groupe, par blocs, aux plus offrants.

Pourrions-nous donc, sans hésitation, envisager que les activités de Suez en matière de gestion de l'eau, si importantes pour nombre de collectivités locales, soient vendues à l'encan ? J'en doute !

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