Monsieur le ministre, tout à l'heure, vous avez évoqué, à juste titre, le chiffre de plusieurs centaines de milliers de dollars.
Dans ces conditions, je ne peux que me réjouir de la récente décision du conseil d'administration d'EDF de lancer officiellement les démarches devant conduire à la construction d'un premier modèle de réacteur nucléaire de nouvelle génération.
Ces éléments importants étant rappelés, il n'en reste pas moins que les grands débats relatifs aux orientations de la politique énergétique ont été tranchés l'an dernier. Je centrerai donc essentiellement mon propos d'aujourd'hui sur la question du moment : le projet de rapprochement entre les entreprises Suez et Gaz de France, en préparation depuis de nombreux mois et mis à jour en février dernier.
Mes chers collègues, il s'agit, à mon sens, d'un projet extrêmement important pour la politique industrielle et économique de notre pays, puisqu'il est directement lié à l'indépendance énergétique de la France, ainsi qu'à sa sécurité d'approvisionnement.
Depuis deux ans, le secteur industriel de l'énergie en Europe a poursuivi un mouvement profond de réorganisation. Dans le cadre de l'approfondissement de la concurrence sur les marchés de l'électricité et du gaz, nous sommes à l'aube d'une nouvelle ère industrielle. La France doit prendre toute sa part à ce mouvement.
Cette nouvelle ère se caractérise, tout d'abord, par l'émergence de grands acteurs industriels présentant une taille critique sur ces marchés, tant par les capacités de production que par les portefeuilles de clientèle dont ils disposent. L'importance des capacités financières requises pour procéder aux investissements de production en matière énergétique exclut, , les opérateurs de taille moyenne, vous nous l'avez rappelé, monsieur le ministre.
Pour répondre à la demande de leurs clients, notamment professionnels, les opérateurs se doivent également de proposer des offres « multi-énergie » - gaz et électricité en particulier - assorties de services énergétiques.
Dans un tel contexte, la France ne saurait observer ces évolutions sans réaction, les bras croisés, au risque d'être marginalisée dans un domaine où elle a pourtant su créer les conditions propices au développement d'entreprises « leader ».
Je vous rappelle que la France peut se prévaloir d'être, avec Total, l'un des premiers pétroliers au monde, avec EDF, le premier électricien, avec Gaz de France, le premier gazier en Europe, ou encore, avec AREVA, l'un des premiers constructeurs de centrales nucléaires dans le monde.
À l'heure du regroupement entre grands électriciens et gaziers européens - je pense notamment au rachat possible d'ENDESA par EON -, il nous revient de prendre les devants dès maintenant.
Monsieur le ministre, vous nous l'avez dit, le projet de fusion entre Gaz de France et Suez procède avant tout d'un travail de rapprochement progressif entre les deux entreprises, envisagé de longue date.
Après les explications qui nous ont été fournies au cours des dernières semaines - et encore hier, comme le rappelait le président de la commission, Jean-Paul Emorine -, et compte tenu des détails qui ont été donnés sur les modalités de réalisation de l'opération, le constat est clair à mes yeux : il s'agit d'un excellent projet, qui présente, à de nombreux égards, des avantages industriels considérables.
Premier élément positif : en raison des complémentarités entre les différents métiers exercés par les deux entreprises, cette fusion permettra de constituer un opérateur de taille mondiale, qui sera une entreprise leader en Europe.
Deuxième élément, très prometteur : la nouvelle entité sera le numéro un mondial sur le marché du gaz naturel liquéfié. Il s'agit là d'un point déterminant, de nature à réduire notre dépendance en matière d'approvisionnements gaziers, notamment - et vous en êtes tous conscients à la suite des événements intervenus voilà quelques mois -, au regard de la Russie.
Je vous rappelle au passage que les pays qui ont été récemment menacés en termes d'approvisionnements énergétiques se tournent, tous sans exception, vers le gaz naturel liquéfié. C'est le cas du Chili qui a été privé du gaz argentin, du Brésil menacé d'être privé du gaz bolivien, de l'Ukraine et de la Biélorussie menacées d'être privées du gaz russe de Gazprom.
Enfin, la fusion rendra possibles un grand nombre de synergies, la première d'entre elles étant de permettre à la nouvelle entité, grâce au pouvoir de négociation dont elle disposera, de résister à des hausses du coût de l'approvisionnement gazier imposées par les producteurs. M. le ministre, ainsi que M. le président de la commission, ont beaucoup insisté sur cet élément.
A ce stade de mon propos, je veux rappeler les raisons pour lesquelles c'est ce projet qui a été retenu, et non pas celui d'une fusion entre EDF et GDF. Il semblerait que cette idée, pourtant repoussée à plusieurs reprises, trouve toujours des partisans nostalgiques.