Monsieur Revol, je vous remercie de votre participation aux travaux de préparation sur l'ouverture des marchés menés au sein de l'ancien Conseil supérieur de l'électricité et du gaz. J'y ai fait référence dans mon discours ce matin. Nous disposons désormais des premiers éléments, riches en enseignements, pour dresser un premier bilan - attendu et maintenant disponible, et que je vous invite à consulter - de l'ouverture des marchés aux professionnels. Nous en tiendrons compte avec le plus grand soin.
Je vous remercie d'insister sur la nécessité d'encadrer l'ouverture des marchés par des garde-fous, à savoir le maintien des tarifs réglementés et les dispositions de protection des consommateurs. Ces mesures sont prévues dans le projet de loi que nous sommes en train d'élaborer et que nous souhaitons soumettre au Parlement.
Il est grand temps aujourd'hui de prendre nos responsabilités. Vous avez raison, nous ne pouvons pas nous permettre de laisser passer trop de temps par rapport à ce qui est devenu une réalité.
M. Laffitte nous a projetés dans l'avenir avec, comme d'habitude, clarté et un esprit visionnaire qui doit tous nous faire réfléchir.
Avec ce souffle que nous lui connaissons tous, il a évoqué la question de l'après-pétrole et des enjeux liés au changement climatique et à l'effet de serre
Répondre aux enjeux des hydrocarbures chers, c'est trouver des sources d'énergie de remplacement et limiter la croissance de nos besoins en hydrocarbures.
C'est vraiment dans cet esprit que le Gouvernement a décidé de prendre à bras-le-corps l'ensemble de la problématique énergétique.
S'agissant des énergies fossiles, nous sommes désormais parvenus à un sommet de production, ou peak oil. Dès lors, la production mondiale risque de décroître. C'est une question de temps, peut-être à l'horizon d'une génération.
Sans attendre, le gouvernement français m'a chargé de mener au sein du G8 une négociation pour l'ensemble des pays du G8 - ils représentent exactement la moitié de la consommation mondiale - avec les pays producteurs. L'objectif est d'essayer d'instaurer plus de clarté et de transparence sur un marché différent des autres et assez spéculatif, compte tenu du manque de visibilité et de l'acuité des données.
De plus, cette action générale porte sur toutes les sources d'énergie, dont le nucléaire bien sûr, avec la fission et la fusion. Ce n'est pas un hasard si le site France a finalement été retenu pour accueillir le projet ITER, dans le cadre duquel seront menées des expérimentations visant à préparer l'énergie d'après-demain.
Je veux aussi citer le plan biocarburants, que j'ai évoqué tout à l'heure, qui concerne tant le diester que le bioéthanol. En l'espèce, la France a décidé d'engager un plan extrêmement ambitieux. J'ai du reste choisi de confier cette mission bioéthanol à Alain Prost, qui est une figure emblématique et qui connaît bien les industries automobiles. Il a accepté de coordonner l'ensemble des acteurs, que ce soient les distributeurs, les pétroliers, les agriculteurs - ils auront un rôle éminent à jouer - ou les industriels de l'automobile. L'objectif est de faire en sorte qu'à l'horizon 2010 l'ensemble des stations-service de France proposent à nos compatriotes à la fois du carbone fossile et du carbone renouvelable.
Monsieur Détraigne, vous êtes revenu sur les dispositions de la loi de 2004, notamment sur le seuil de participation de l'État de 70 %. Vous vous interrogez sur le calendrier et les modalités du projet de fusion.
Comme vous, j'aurais peut-être préféré disposer de plus de temps et engager ce projet à un autre moment. Il se trouve cependant que c'est aujourd'hui que la question se pose. Il existe un temps pour les entreprises et un temps politique. Ces deux temps, respectables l'un comme l'autre, diffèrent parfois. Faut-il pour autant ne pas nous poser la question ? Faut-il pour autant ne nous intéresser qu'au temps politique ? C'est la question que je soulève avec le présent débat. En tant que membre du Gouvernement, j'estime qu'il faut aussi prendre en considération le temps des entreprises. C'est pourquoi j'ai pensé qu'il était opportun, après quatre mois de travail, de vous faire état de mes réflexions, mais aussi de mes convictions sur ces projets.
M. Sergent m'interroge sur des questions importantes qui se rapportent au maintien de tarifs réglementés de vente de l'énergie après l'ouverture totale du marché en 2007 ainsi qu'à l'évolution du rôle des collectivités locales - c'est très important - dans la distribution d'énergie.
Monsieur le sénateur, vous souhaitez tout d'abord savoir quelle réponse la France compte apporter à la mise en demeure que lui a adressée la Commission en raison de la transposition « non totale » des directives de 2003.
Outre certains aspects techniques, sur lesquels elle apportera des précisions ou des modifications marginales s'agissant des tarifs, la France défend une vision large en considérant que l'éligibilité étant une faculté et non une obligation, tous les clients qui n'exercent pas ce droit à l'éligibilité continuent à bénéficier des tarifs réglementés. C'est clair et c'est dit.
C'est d'ailleurs ce qu'a précisé le Parlement en adoptant l'article 66 de la loi du 13 juillet 2005, qui précise clairement ce point.
En outre, concernant vos craintes au sujet des collectivités locales, la loi du 9 août 2004 prévoit que le code des marchés publics n'impose pas à l'État et aux collectivités locales d'exercer leur éligibilité. Ces dernières pourront donc continuer de bénéficier des tarifs réglementés de vente, après le 1er juillet 2007.
Vous m'interrogez par ailleurs sur le rôle des communes, autorités concédantes de la distribution de gaz naturel et propriétaires des réseaux publics de distribution, au regard des droits exclusifs de distribution dont dispose Gaz de France dans sa zone de desserte historique.
Sur ce point, monsieur le sénateur, je souhaite vous rappeler que l'organisation de la distribution repose sur un lien contractuel entre la commune et l'opérateur gazier sous la forme, tout le monde le sait, d'un contrat de concession. Ce cadre légal n'a jamais été contesté par la Commission et ne sera pas modifié par la fusion envisagée.
La privatisation de Gaz de France n'affectera donc en rien les obligations nées de ces contrats de concession, notamment le contrôle efficace qu'il permet par les collectivités locales et l'État, notamment en matière de qualité de service public.
Monsieur Marini, vous avez apporté votre soutien au projet de fusion entre Suez et Gaz de France, ce dont je vous remercie. Votre intervention sur ce point a été très claire, et je peux vous rassurer sur le fait que le projet de loi est en plein accord avec tout ce que vous avez évoqué.
Vous avez également décrit de façon très précise l'esprit de responsabilité qui doit guider notre action ainsi que la nécessité d'agir dans ce temps économique auquel j'ai fait référence tout à l'heure. Comme vous le soulignez, le temps de la concertation s'achève, et nous pourrions donc entamer le temps du débat parlementaire.
Vous avez insisté sur le fait que l'ouverture des marchés, la structure capitalistique des opérateurs et les mécanismes de formation des prix ne sont pas liés. Votre démonstration était d'une clarté limpide, et je vous remercie de l'avoir exposée.
Par ailleurs, il nous faut effectivement réagir face à la hausse des prix de l'électricité. Je n'y reviendrai pas, puisqu'il en a beaucoup été question. En ce qui concerne la Commission de régulation de l'énergie, monsieur Marini, nous sommes prêts à aller de l'avant sur ce sujet, y compris par voie législative.
La CRE est actuellement financée par une dotation budgétaire inscrite au budget du ministère des finances. Ce financement est totalement indépendant des opérateurs énergétiques - c'est une bonne chose, me semble-t-il - ainsi que des services ministériels de tutelle, je tiens à le dire de la façon la plus claire. Je rappelle que ce mode de financement est similaire à celui du Conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA, ou de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l'ARCEP.
Nous pourrions évidemment poursuivre cette discussion et nous interroger sur la nécessité des moyens, même si je connais la vigilance avec laquelle vous veillez au bon usage des deniers de l'État. Je partage d'ailleurs systématiquement votre prudence.
J'en viens à l'intervention de M. Amoudry.
Monsieur le sénateur, vous avez axé votre discours sur le service public local de l'énergie, ce qui est un point très important. Les directives prévoient la séparation juridique des gestionnaires de réseaux de distribution d'électricité ou de gaz au plus tard le 1er juillet 2007. Dans cette perspective, la loi du 9 août 2004 a prévu la filialisation des activités de transport d'électricité et de gaz naturel. Elle devra être complétée pour prévoir la filialisation des réseaux de distribution d'EDF et de gaz de France, ainsi que de six distributeurs non nationalisés mais desservant plus de 100 000 clients.
À cet effet, je puis vous assurer qu'il sera proposé de laisser ouvert aux distributeurs non nationalisés, les DNN, le choix de séparer juridiquement soit l'activité de gestion de réseau, soit celle de fourniture.
Par ailleurs, j'entends vos interrogations sur l'évolution du rôle des collectivités locales, notamment en matière de contrôle des concessions de gaz et d'électricité.
L'organisation de la distribution repose sur un lien contractuel entre la commune et l'opérateur. La privatisation de Gaz de France, je le redis, n'affectera en rien les obligations nées de ces contrats de concession, notamment le contrôle, je le répète encore une fois, par les collectivités locales qu'il prévoit.
Vous m'interrogez, enfin, sur les conséquences d'un projet de loi autorisant la fusion entre Suez et Gaz de France sur les distributeurs locaux, notamment, de gaz naturel. L'actionnariat de ces entreprises locales de distribution n'est absolument pas concerné par le projet de rapprochement entre Suez et Gaz de France.
Le périmètre du service public évolue, la fourniture d'énergie devenant une activité concurrentielle. Mais pour autant, le Gouvernement ne reste pas et ne restera pas inactif : un tarif social du gaz permettra de protéger les consommateurs.
Pour ce qui concerne les tarifs, vous me faites part de votre inquiétude sur la rémunération des investissements dans les activités de réseaux. Sur ce point, les ministres fixent les tarifs de distribution, je le rappelle, sur proposition de la CRE. Par conséquent, l'État veille, avant d'approuver ces tarifs, à ce que cette rémunération permette de garantir un niveau d'investissement suffisant pour assurer le développement et le renouvellement de ces réseaux.
Madame Bricq, j'ai apprécié la qualité de votre intervention. Je connais votre rapport de 1999, et, sans partager votre analyse, je la respecte, et je répondrai précisément aux questions que vous avez soulevées.
Quelles sont vos propositions ? Au lieu de rejeter toute la responsabilité face à une ouverture des marchés que vous avez vous-même acceptée, il serait préférable que vous en tiriez avec nous toutes les conséquences.
Ce projet de fusion répond à une logique non pas capitalistique, mais purement industrielle. Les intérêts des consommateurs les plus modestes ne seront pas sacrifiés, bien au contraire, puisque nous voulons prendre l'initiative de créer, par ce biais, un tarif social pour le gaz.
J'ai déjà eu l'occasion de souligner tout l'intérêt industriel de ce projet. Comme l'ont dit les uns et les autres, il ne va en aucun cas à l'encontre des intérêts de Gaz de France. Je vous invite à cet égard à vous référer aux soixante et onze questions des organisations syndicales auxquelles nous avons répondu. Je pense que vous serez vous-même convaincue.
La combinaison de Suez et Gaz de France permet d'envisager l'accélération de la mise en oeuvre des offres duales électricité/gaz. Il est important de donner à l'ensemble des opérateurs qui ont accès à cette dualité les moyens de le faire.