Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite intervenir maintenant, de manière tout à fait dépassionnée, sur l'ensemble que constituent les articles 16 à 22, étant entendu que, naturellement, je resterai prêt, par la suite, à apporter toutes précisions complémentaires que vous pourriez solliciter.
Ces articles ne justifient aucune polémique dans la mesure où ils ne font que traduire le respect de nos engagements européens.
Je rappellerai d'abord aux différents orateurs du groupe socialiste que, sur le plan technique, l'exercice de transposition d'une directive en droit interne fait l'objet de toute l'attention du Conseil d'État, dont l'une des missions est de veiller à ce que la transposition se fasse de manière exhaustive et fidèle, afin d'éviter tout manquement. Les articles qui vous sont soumis sont donc le fruit d'un travail minutieux.
L'article 16 a pour objet de transposer la directive du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union européenne et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres. La date de la transposition était fixée au 30 avril 2006. Le Gouvernement s'est donc attaché, afin de respecter nos engagements européens, à utiliser le vecteur offert par le présent projet de loi.
Le législateur de 2003 a modifié le régime de séjour des Européens en France en décidant que les ressortissants communautaires « ne sont pas tenus de détenir un titre de séjour ». Il s'agit d'un point très important, qu'il n'est évidemment pas question de remettre en cause. À l'exception des ressortissants des nouveaux États membres, qui sont soumis à un régime transitoire, les citoyens de l'Union européenne ne sont plus astreints à posséder un titre de séjour pour résider en France, mais ils peuvent le demander s'ils le souhaitent.
En 2002, je le rappelle, 177 000 titres avaient été délivrés à des Européens, dont 50 000 premiers titres et 127 000 renouvellements. En 2005, 6 000 titres ont été délivrés, dont 3 400 titres à des ressortissants de nouveaux États membres. Ces chiffres permettent de mesurer l'impact de la réforme de 2003.
La directive de 2004 a un double objectif : d'une part, renforcer la libre circulation des Européens ainsi que celle des membres de leurs familles, quelle que soit la nationalité de ceux-ci et, d'autre part, faire en sorte que cette libre circulation ne pénalise pas l'État d'accueil. Le ressortissant européen séjournant en France avec sa famille ne doit ni constituer une charge pour le système d'aide sociale ni troubler l'ordre public.
Il faut aussi garder à l'esprit le caractère de totale réciprocité inhérente à ce nouveau dispositif. Ce que nous acceptons pour les Européens et leurs familles en France permet aussi d'assurer dans les mêmes conditions le séjour des Français et de leurs familles en Europe.
Quels sont les trois éléments clés de l'article 16 ?
Premièrement, tout citoyen européen a le droit de séjourner en France si ses ressources sont suffisantes, afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, et s'il dispose d'une assurance maladie. Il est dispensé de titre de séjour, conformément aux dispositions de la loi de 2003, mais il peut en obtenir un s'il le souhaite. Après cinq ans de présence en France, il acquiert un droit au séjour permanent.
Deuxièmement, le séjour de sa famille - enfants, conjoint, ascendants directs à charge - est également facilité. C'est toute la logique d'un texte qui contribue à la mobilité des Européens en Europe et donc des membres de leur famille, quelle que soit leur nationalité.
Ainsi, un ressortissant d'un pays tiers accompagnant en France un ressortissant européen a droit à une carte de séjour ad hoc, dite « carte de séjour de membre de famille d'un citoyen de l'Union ». Après cinq ans de séjour régulier, il a droit à une carte de dix ans.
Troisièmement, nous proposons que les citoyens européens qui souhaitent établir leur résidence habituelle en France se fassent enregistrer en mairie. Il est en effet souhaitable qu'ils se fassent connaître en mairie afin d'être mieux accueillis, d'être informés de la vie locale et associés à la vie de la cité dès les premiers temps de leur installation en France. Cette formalité leur ouvrira bien des portes et sera certainement l'occasion pour eux, s'ils le souhaitent, de s'inscrire sur les listes électorales puisque la citoyenneté européenne permet l'exercice du droit de vote aux élections européennes et municipales, ce dont nous réjouissons.