“Les députés de la majorité doivent rester plus nombreux en séance que leurs collègues de l’opposition pour éviter d’être défaits lors d’un vote surprise. Mais prendre la parole, c’est alimenter la polémique, poursuit le député des Ardennes. Il faut donc se taire.” »
De fait, monsieur le président, depuis le début de cette discussion, nous sommes souvent confrontés au silence de la majorité, qui refuse le débat.
On a même vécu des moments qui, véritablement, défiaient toute pratique démocratique, ce qui explique ma colère d’hier soir.
Nous voilà, avec cet article 8, au cœur du cyclone. Depuis le début de nos débats, il est là, omniprésent, tout à l’image du Président de la République qui, par cet article, se verra définitivement conférer le droit de nommer par décret les présidents de l’audiovisuel public.
Nous avons déjà beaucoup parlé de cette disposition ô combien symbolique.
Symbolique tant elle écorne notre démocratie ! Où voit-on en Europe et en Amérique du Nord un Président, chef de l’exécutif, s’arroger ce pouvoir sur la télévision publique ? Nulle part !
Hier, à l’occasion des interventions de l’opposition, nous avons passé en revue les modèles allemand, britannique et même italien, sous Berlusconi : point de trace de cette horreur démocratique !
Symbolique aussi tant cette disposition pèsera lourd sur les épaules des futurs promus, sur l’indépendance des médias et, plus précisément en l’occurrence, sur celle de l’audiovisuel public. L’indépendance n’est pas seulement un concept que l’on se doit de défendre pour le principe. C’est une réalité au quotidien que les journalistes peinent à préserver et que nous avons le devoir, en qualité de parlementaire, de garantir. Ce mot a bien été maintes et maintes fois prononcé depuis le début de nos débats. Chacun jure vouloir la préserver !
Aussi, devant un tel texte, on tente de-ci de-là, à la marge, de rendre présentable, digestible, acceptable une disposition qui devrait nous faire nous lever comme un seul homme pour crier non au fait du prince !
Au lieu de cela, une partie de cet hémicycle se terre dans le silence…
Un silence qui en dit long sur le malaise qui entoure ce texte et que chacun perçoit, quelles que soient les travées sur lesquelles il siège dans cet hémicycle.
Allons-nous accepter sans broncher, que dis-je sans même parler, sans même utiliser ce pouvoir de la parole confié par le suffrage universel, une mesure qu’aucun gouvernement français depuis l’après-guerre n’a ni pensé, ni même envisagé ?
Si c’est le cas, alors, au regard de la réforme du débat parlementaire qui s’annonce dans la droite ligne de ce texte caporaliste, le silence n’a pas fini de régner entre les murs de cette assemblée !