Intervention de Marc Daunis

Réunion du 13 janvier 2009 à 16h00
Communication audiovisuelle — Article 8

Photo de Marc DaunisMarc Daunis :

À la suite du Président de la République, dont certains se doivent d’être les porte-voix fidèles, vous nous avez présenté le dispositif instauré par l’article 8 comme le plus sûr moyen de sortir de l’hypocrisie entourant la nomination des présidents de France Télévisions et de Radio France actuellement en place.

Arrêtons-nous quelques instants, mes chers collègues, si vous le voulez bien, sur cette notion d’hypocrisie. En quoi consiste-t-elle, sinon dans le fait que les conseillers du CSA, et leur président en premier lieu, iraient chercher leurs ordres auprès des autorités les ayant nommés avant de choisir les dirigeants des chaînes de télévision publiques ?

Si nous voulions sortir de cette hypocrisie, sans rompre pour autant avec les nominations politiques des membres du CSA, il resterait à accepter de donner aux commissions des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat le droit d’émettre un avis remettant en cause la décision du Président de la République.

Madame la ministre, cette proposition pourrait constituer, éventuellement, la seule voie, certes étroite, qui permettrait d’éviter une situation qui porterait une atteinte profonde aux libertés dans notre pays, comme l’ont rappelé précédemment différents orateurs. Elle permettrait peut-être également à nos concitoyens de nourrir quelque espoir sur l’attachement des parlementaires aux libertés et sur leur capacité à faire preuve de courage en se prononçant, à l’avenir, contre la volonté présidentielle pour le choix des dirigeants de leur télévision publique.

Sans doute, madame la ministre, ne serez-vous pas réceptive à cet argument ; mais nous souhaitons que notre Haute Assemblée y soit sensible. Le présent amendement contribuerait à renforcer réellement le pouvoir législatif, en donnant aux assemblées la capacité réelle de s’opposer à la décision du seul président de la République, alors que la pratique du pouvoir, confirmée par la révision constitutionnelle de l’été 2008, a fait de celui-ci tout à la fois le chef de l’État, le véritable chef du Gouvernement et le chef de la majorité parlementaire, dans une confusion des pouvoirs préoccupante pour l’évolution de notre système politique.

Il me semble donc qu’il est temps pour nous, parlementaires, de poser des bornes à cette volonté du titulaire de la magistrature suprême de s’approprier des parcelles de pouvoir existantes. Cela est d’autant plus vrai que ces bornes permettront, comme c’est le cas avec cette proposition d’amendement, de préserver l’indépendance de l’audiovisuel public, et donc la liberté des journalistes d’informer sur le pouvoir et de le critiquer.

Enfin, permettez-moi de m’étonner que l’on puisse d’un côté parler d’hypocrisie à propos de la décision prise par les neuf membres d’une institution, au motif que ceux-ci seraient trop proches du pouvoir, et, de l’autre, considérer comme une amélioration le fait qu’il n’y ait plus qu’une seule personne – celle qui détient tout le pouvoir – qui décide !

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