Il revient au Président de la République de proposer le nom d’un candidat, tandis que, pour sa part, le CSA peut accepter ou refuser cette candidature.
Le processus comprend une troisième étape : une fois franchi le barrage du CSA, la proposition de nomination sera examinée par les commissions des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat, qui pourront la rejeter à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions.
Certes, on peut regretter – et c’est particulièrement le cas de votre commission – que l’article 13 de la Constitution prévoie un simple pouvoir de veto pour le Parlement requérant la majorité des trois cinquièmes.
On peut regretter que la Haute Assemblée ait alors accepté une telle rédaction de la Constitution, qui nous oblige aujourd’hui à relever que le CSA se verra reconnaître des pouvoirs plus étendus que les commissions parlementaires. C’est une forme de paradoxe qui ne nous satisfait guère. Cependant, dès lors que nous entrons dans le champ de l’article 13, nous ne pouvons pas aller plus loin.
En tout état de cause, deux verrous viendront encadrer la procédure de nomination : le pouvoir de codécision du CSA, d’une part, et le pouvoir de veto des commissions chargées des affaires culturelles, d’autre part.
Par ailleurs, ayant été soumises à la publicité grâce à l’amendement que nous avons voté jeudi dernier, les auditions des commissions constitueront une sorte d’épreuve publique préparant le choix qu’auront à faire le Président de la République, le CSA, puis nous-mêmes. Cette explication, accessible au grand public, du projet défendu par le candidat qui aura été présenté concourt donc à une forme de transparence. Elle n’aura rien d’une formalité, et l’on peut imaginer que la personnalité pressentie qui aura franchi ces trois étapes sera fondée à diriger l’audiovisuel public.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, la commission ne peut pas souscrire à la suppression de l’article 8 à laquelle tendent les amendements identiques n° 130, 260 et 332, sur lesquels elle émet donc un avis défavorable.
De la même façon, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 131 rectifié, proposé par nos collègues du groupe CRC-SPG. Nous pouvons saluer l’effort d’inventivité institutionnelle de ses auteurs, mais nous ne pouvons y être favorables, pour au moins deux raisons.
Tout d’abord, la commission considère que le dispositif proposé dans le projet de loi encadre de manière convaincante et suffisante la nouvelle procédure de nomination.
Ensuite, elle estime que les dispositions contenues dans l’amendement ne sont pas constitutionnelles. En effet, l’intervention du CSA n’y est pas prévue, alors qu’elle est une nécessité et que le CSA doit au moins disposer d’un pouvoir de codécision, comme c’est le cas dans l’actuel projet de loi.
Le CSA est une autorité administrative indépendante dont l’intervention garantit l’exercice effectif de la liberté de communication et de son corollaire, l’indépendance des présidents des sociétés nationales de programme. Or, la commission « pour le pluralisme et les médias » proposée dans l’amendement, si elle a pour elle les avantages du pluralisme, n’a pas la qualité d’autorité indépendante puisqu’il s’agit d’une autorité certes pluraliste, mais d’essence avant tout politique.
Le respect de la jurisprudence constitutionnelle commande donc que le CSA soit associé à la décision. Tel n’est pas le cas en l’espèce. En conséquence, la commission ne peut être favorable à l’amendement n° 131 rectifié.
Je tiens enfin à préciser que c’est cette même raison, à savoir la nécessité de l’intervention du CSA, qui a conduit à ne pas retenir les dispositifs proposés par la commission Copé. Celle-ci prévoyait que les présidents seraient nommés sur une liste de candidats proposés par le CSA, qui, dès lors, n’aurait eu qu’un simple pouvoir de proposition. Une telle mesure n’aurait pas été conforme à la Constitution, qui autorise le législateur à modifier les procédures de nomination sous réserve qu’il ne prive pas de garanties légales des exigences de nature constitutionnelle.
La commission a également émis un avis défavorable sur l’amendement n° 336 de nos collègues du groupe socialiste, parce qu’il tend à revenir au dispositif actuel. Même si elle comprend les intentions qui ont animé ses auteurs, elle ne croit pas possible de les partager.
La commission estime que la nouvelle procédure de nomination aura l’avantage – il n’est pas seulement symbolique – de lever tous les doutes qui, pendant de longues années, se sont exprimés sur tous les bancs à propos de la nomination par le CSA des présidents de France Télévisions et de Radio France, quelles que soient les qualités des présidents de la République et des membres du CSA.
Nous avons tous en mémoire les échos qui, depuis quelques années, résonnent à propos de la nomination des différents présidents. Dans les conditions actuelles, chacun suppute l’influence de l’Élysée sur les choix du CSA. C’est normal, c’est même le jeu classique de la démocratie, mais personne jusqu’ici n’a pu croire que le Président de la République se soit complètement désintéressé de la question et ait été écarté de la décision.
Nous connaissons donc une procédure de nomination qui est marquée par le doute, voire le soupçon, et ne contraint pas le Président de la République à expliciter publiquement ses choix : chacun sait ou suppose qu’il a choisi, mais nul ne peut lui reprocher sa décision puisqu’il ne l’a pas assumée publiquement. En clarifiant les choses, le dispositif prévu dans le présent projet de loi a l’immense qualité de faire peser la responsabilité du choix du président de France Télévisions et de Radio France sur les épaules du Président de la République, au vu et au su de tous.
Ce choix sera ensuite examiné à trois reprises : devant le CSA tout d’abord, puis devant chacune des commissions parlementaires chargées des affaires culturelles. La proposition du Président de la République devra donc être judicieuse, pertinente et argumentée.
Au vu des garanties posées à l’article 8, la commission estime qu’il s’agit d’une clarification utile pour la vitalité du débat démocratique et, partant, pour la télévision et la radio publiques elles-mêmes. Car, pour la démocratie, rien n’est pire qu’une forme d’obscurantisme et rien ne vaut mieux que la transparence.
La commission émet également un avis défavorable sur les amendements n° 333 à 335, qui, bien que sous des formes variées et inventives, tendent à revenir sur la rédaction du projet de loi.
Pour les raisons déjà évoquées, l’amendement n° 261 recueille lui aussi un avis défavorable : la nomination par le conseil d’administration ne suffit pas puisque l’intervention et la codécision du CSA sont nécessaires. Or celles-ci ne sont pas prévues dans le présent amendement.
L’amendement n° 338 a fait l’objet d’un long débat qui a conduit la commission à estimer que la proposition qu’il contenait n’était pas constitutionnelle. La raison en est simple : l’article 13 de la Constitution, qui s’applique nécessairement à la nomination des présidents des sociétés nationales de programme à partir du moment où l’on pose le principe que celle-ci relève du Président de la République, impose une procédure précise. Or celle-ci ne prévoit qu’un veto des commissions et ne pose pas le principe d’une confirmation par chacune des deux chambres. Le législateur ordinaire, qui est tenu par la loi fondamentale, ne peut modifier l’équilibre des pouvoirs s’il doit en résulter une contradiction avec une disposition explicite de la Constitution.
Sur le fond, la commission ne serait pas opposée à un tel avis conforme. Elle considère notamment qu’elle reconnaîtrait au Sénat son rôle d’assemblée parlementaire à part entière. Néanmoins, je le répète, la Constitution nous oblige et, lorsqu’elle définit clairement les règles applicables, le législateur n’a d’autre choix que de les appliquer.
La commission fait donc sienne la proclamation solennelle du Conseil constitutionnel selon laquelle la loi n’exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution.
Encore une fois, quelle que soit la sympathie que nous éprouvons pour cet amendement, nous ne pouvons qu’émettre un avis fermement défavorable compte tenu de la lettre de la Constitution.
Enfin, et pour les mêmes raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 337.