Mes chers collègues, la commission a toujours exprimé, depuis le début de ces débats, son désir de renforcer l’indépendance de l’audiovisuel public.
C’est la raison pour laquelle elle vous propose un tel amendement, car, pour elle, la véritable indépendance tient, bien sûr, au mode de nomination, mais, surtout, au mode de révocation éventuelle. Le droit en vigueur le montre : il prévoit la nomination des magistrats du siège sur avis du Conseil supérieur de la magistrature, mais reconnaît leur inamovibilité ; il prévoit la désignation des membres des autorités administratives indépendantes par des autorités politiques, mais prévoit, le plus souvent, leur irrévocabilité. Tout cela est donc logique, car nul n’est réellement dépendant de celui qui l’a nommé s’il ne risque pas d’être révoqué par celui-ci.
C’est pourquoi la commission a souhaité proposer une procédure plus exigeante pour le retrait de mandat – autrement dit, pour la révocation – que pour la nomination du président des sociétés nationales de programme.
Pour la nomination, cela a longuement été évoqué tout à l’heure, il faut en effet un avis conforme du CSA, puis un avis des commissions des affaires culturelles des deux assemblées, lesquelles peuvent opposer leur veto à la majorité des trois cinquièmes.
Pour la révocation, la commission propose en outre que les commissions des affaires culturelles confirment la décision du Président de la République à la majorité des trois cinquièmes. Leur accord sera donc exigé dans l’éventualité d’une révocation du président de France Télévisions, de Radio France ou de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.
Compte tenu du seuil exigé, la révocation ne pourra se faire, en pratique, que si l’opposition ou le Sénat s’y opposent. La commission tient à cette mesure, car il lui semble important que le Sénat puisse bénéficier de toute latitude pour s’opposer éventuellement à une telle décision.
La commission tient enfin à préciser qu’il revient au législateur ordinaire de prévoir un tel dispositif. L’article 13 de la Constitution ne vise en effet que la seule nomination et ne serait sans doute pas applicable à la révocation. En revanche, l’article 34 nous donne compétence, depuis la réforme de la Constitution, pour garantir « l’indépendance des médias ». Il nous revient donc de nous saisir de cette compétence.
J’ajoute, enfin, que le dispositif proposé par le Gouvernement offrait des garanties inférieures à celles qui étaient prévues par le droit en vigueur. Jusqu’à présent, l’autorité qui nommait révoquait dans les mêmes formes. Or, dans le projet de loi initial, la procédure de nomination était plus lourde que celle de révocation, ce qui, à l’évidence, constituait un recul qui, à notre avis, aurait été censuré par le Conseil constitutionnel.
Il fallait donc renforcer la procédure de révocation. La commission propose de le faire avec résolution en posant ce principe simple : pour la nomination, le Parlement peut dire « non » ; pour la révocation, il doit impérativement dire « oui ».
Ces remarques me permettent de revenir sur les supposés manquements à l’indépendance des parlementaires.
Pourquoi les parlementaires seraient-ils moins indépendants que les journalistes, par exemple, en faveur desquels nous avons voté un certain nombre d’amendements visant à garantir leur indépendance, leur liberté de conscience et d’expression ? Nous, parlementaires, ne sommes pas plus qu’eux des moutons de Panurge. C’est la raison pour laquelle nous avons le droit, mais aussi le devoir, d’exprimer en conscience notre vote, le cas échéant.
L’amendement proposé par la commission permettra à chacun, en conscience, d’exprimer ce qu’il souhaite lors d’une éventuelle décision de révocation.