Intervention de François Zocchetto

Réunion du 10 juin 2009 à 14h30
Débat sur le service civil volontaire

Photo de François ZocchettoFrançois Zocchetto :

Monsieur le président, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, il n’est évidemment pas question de refaire le débat du 27 mai dernier relatif aux travaux de la mission commune d’information sur la politique en faveur des jeunes.

Force est de le constater, monsieur le haut-commissaire, vous affichez un volontarisme que nous ne pouvons que saluer. Disant cela, je pense bien sûr au fonds d’expérimentation pour la jeunesse et à la commission de concertation.

Parmi les actions engagées en faveur des jeunes, le service civil volontaire, ou du moins ce que nous espérons qu’il devienne, devrait occuper une place de tout premier plan.

Moment d’insertion civique autant que d’insertion sur le marché du travail, temps du don de soi à la collectivité et du brassage social, un tel service pourrait être un vecteur irremplaçable de cohésion nationale. Mais il y a une condition à cela : il doit être obligatoire.

Depuis la création du dispositif dans la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances, la position du groupe de l’Union centriste est claire, et elle n’a pas changé. Nous sommes favorables à un service de remplacement de la conscription. Mais, de notre point de vue, un tel service n’aura de sens que s’il concerne tous les jeunes d’une même tranche d’âge.

En d’autres termes, de « civil », le service doit devenir « civique », et de « volontaire », nous souhaitons qu’il devienne « universel ». D’ailleurs, à l’époque, nous avions déjà déposé un amendement en ce sens, qui n’a malheureusement pas été adopté.

Près de trois ans après la mise en œuvre du dispositif, le service civil volontaire apparaît comme un rendez-vous manqué, comme une mesure potentiellement bonne mais qui n’a pas pu porter ses fruits. Jusqu’à présent, ce service n’a concerné qu’un petit nombre de jeunes, principalement des jeunes en difficultés.

Dans ces conditions, il n’y a pas de brassage possible entre individus de toutes origines et de toutes conditions sociales. Plus grave encore, ce service civil volontaire, au lieu d’être un intégrateur social, est apparu, nous semble-t-il, comme un facteur supplémentaire de stigmatisation. Or, c’est exactement le contraire de l’objectif qui était poursuivi !

C’est pourquoi nous ne pouvons souscrire que partiellement aux conclusions du rapport de M. Ferry, remis le 10 septembre dernier au Président de la République. Certes, tout comme M. Ferry, nous souhaitons que le service civil monte substantiellement en puissance pour concerner beaucoup plus de jeunes. Mais, lorsque l’auteur du rapport se rallie à l’idée que le service peut demeurer facultatif, nous divergeons totalement.

En réalité, notre inquiétude est réelle, parce que l’avenir du service civil nous semble incertain. Mais peut-être nous rassurerez-vous tout à l’heure sur ce point, monsieur le haut-commissaire.

En effet, l’expérience ayant mis en exergue les insuffisances du dispositif, la question se pose de savoir si l’on ne sera pas tenté d’abandonner ce dernier, plutôt que de le renforcer.

Quelles sont ces insuffisances ?

Je dirai, au risque de me répéter, que, selon nous, la principale insuffisance du dispositif réside dans son caractère facultatif.

Ensuite, le statut mis en place paraît d’une grande faiblesse, laquelle est d’ailleurs abondamment dénoncée par les associations chargées de mettre le dispositif en œuvre. Ces dernières réclament par exemple un horaire de dix à quinze heures par semaine et un assouplissement des contraintes administratives.

Disant tout cela, je ne feins bien évidemment pas d’ignorer que la mise en place d’un véritable service civique universel aurait un coût, probablement compris entre 3 et 5 milliards d’euros, ce qui n’est pas rien. Mais ces 5 milliards d’euros pourraient être dégagés par ventilation de crédits entre le soutien à la vie associative et l’éducation. L’argument financier nous semble donc être un faux argument.

Un autre argument invoqué contre le service civique obligatoire est la difficulté de trouver chaque année 700 000 postes. Il pourrait s’agir, là encore, d’un faux argument si l’on met en balance, d’un côté, le nombre de jeunes par tranche d’âge et, de l’autre, les immenses besoins collectifs actuellement non satisfaits dans la société. Je pense, en particulier, aux services à la personne, secteur très demandeur.

Monsieur le haut-commissaire, bien loin d’être financière ou économique, la problématique du service civique universel nous paraît relever, en réalité, d’un choix de société. Sommes-nous prêts à nous donner les moyens d’enrayer le délitement du lien social, en particulier chez les jeunes ?

Tel est, à nos yeux, le véritable enjeu, auquel je ne doute pas que vous apporterez tout à l'heure nombre de réponses.

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