Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 10 juin 2009 à 14h30
Débat sur le service civil volontaire

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Monsieur le président, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, c’est par la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances et son décret du 12 juillet 2006 que le service civil volontaire, promis en 1996 par Jacques Chirac, a été instauré.

C’est donc après une dizaine d’années de débats sur les différentes possibilités de substitution du service militaire et après les émeutes de 2005 que l’idée d’un tel service a été relancée.

Toutefois, alors que le service civil volontaire était censé concerner 50 000 jeunes à la fin de l’année 2007, ces derniers sont à peine 3 000 à s’engager annuellement, soit une part très minoritaire des 750 000 à 800 000 jeunes de la classe d’âge correspondante.

Cette situation n’est donc pas satisfaisante, et ce pour plusieurs raisons : tout d’abord, le champ d’application du service civil volontaire est très limité ; ensuite, outre les difficultés pratiques de la mise en œuvre du dispositif, le problème tient surtout à l’insuffisance des moyens financiers et humains, qui ne sont pas à la hauteur de ce qui devait être une ambition nationale. Si l’on devait appliquer le service civil à toute une classe d’âge, il en coûterait, selon les estimations, de 3 à 5 milliards d’euros par an.

Pourtant, aujourd’hui, l’idée qu’il faut renforcer le service civil volontaire semble faire son chemin.

Ainsi, la mission commune d’information du Sénat sur la politique en faveur des jeunes propose, dans son rapport rendu public le 27 mai dernier, de relancer ce dispositif afin que « 50 000 jeunes y participent chaque année », ce qui, vous l’avouerez, ne nous renvoie qu’à la case départ.

Pour notre part, nous considérons qu’il est urgent de permettre aux jeunes d’accéder à de nouveaux droits pour répondre à leurs aspirations.

C’est un constat largement partagé que, dans notre pays, les nouvelles générations vivent plus mal que celles qui les ont précédées. En effet, les jeunes sont les plus touchés par les maux de notre société, à commencer par le chômage et la précarisation de l’emploi. Les jeunes adultes sont aussi les premiers à rencontrer de grandes difficultés à se loger, à se former, à se soigner, à se déplacer, à s’épanouir... Pour le détail, je vous renvoie aux chiffres figurant dans le rapport précité.

Et quand ils travaillent, très nombreux sont les jeunes faisant partie de la catégorie que l’on appelle aujourd’hui celle des « travailleurs pauvres », puisqu’ils perçoivent un salaire leur permettant à peine de survivre.

Alors que les jeunes femmes et les jeunes hommes – 8, 2 millions de jeunes âgés de seize à vingt-cinq ans – représentent l’avenir de notre société, de notre pays et, au-delà, de l’Europe et du monde, l’État investit trop peu sur leur avenir.

Pis, le discours du pouvoir en place relatif aux jeunes a trop souvent une connotation négative : il est question, entre autres, de racaille, de bandes de jeunes, de fouilles des cartables, de portiques dans les collèges et les lycées.

Dans ces conditions, comme s’étonner que 51 % des Français déclarent avoir une image négative de la jeunesse ? Il est donc urgent de changer le regard que notre société porte sur les jeunes.

Pour notre part, nous considérons que les pouvoirs publics, les responsables politiques, ont le devoir de construire avec les jeunes les réponses à leurs difficultés, à leurs besoins, à leurs aspirations.

Pour relever ces défis, nous nous prononçons en faveur d’un dispositif comprenant de nouveaux droits en faveur des jeunes en matière d’emploi, de formation, d’autonomie, de logement, de transports, de santé, de culture.

Ce sont les aspirations et les difficultés des jeunes qui constituent le point de départ de notre réflexion quant à une relance du service civil, que nous préférerions, pour notre part, nommer « service national de solidarité ».

C’est dans la même démarche en faveur des droits des jeunes que je détaillerai à présent la nature de ce que devrait être, selon nous, ce nouveau service national que nous jugeons nécessaire de généraliser, afin de parvenir à un système équitable pour tous les jeunes, contrairement à la situation qui prévaut actuellement.

Fondé sur la citoyenneté, l’égalité des droits, la solidarité et l’attention que les pouvoirs publics doivent porter aux jeunes, le service national de solidarité que nous proposons doit être construit démocratiquement : les contours et les contenus doivent en être définis avec les jeunes, leurs associations, leurs organisations et les conseils de la jeunesse.

Proposé aux jeunes femmes et aux jeunes hommes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans, y compris les résidents de nationalité étrangère, il serait effectué selon un projet élaboré avec l’intéressé au cours de la dernière année de sa scolarité ou dans les deux ans suivant l’obtention d’un diplôme sanctionnant ses études supérieures.

Avec l’instauration de ce service, l’État, les pouvoirs publics marqueraient un engagement nouveau et fort en direction des jeunes. Nous proposons à l’ensemble des jeunes une rencontre forte et utile avec l’institution, à l’âge de la majorité qui marque l’entrée dans la vie d’adulte.

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